Covid 19 : Macron n’avait pas d’autre choix que de mettre les Français en liberté provisoire <!-- --> | Atlantico.fr
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Emmanuel Macron président de la république allocution coronavirus covid-19
Emmanuel Macron président de la république allocution coronavirus covid-19
©Thomas COEX / AFP

Atlantico Business

Après la garde à vue qui a duré un mois, Emmanuel Macron ouvre la porte à la liberté provisoire et promet le déconfinement pour janvier. Le président de la République avait trois raisons pour céder sur un déconfinement qui n’ose pas dire son nom.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Emmanuel Macron a confirmé ce que l’on attendait, c’est à dire l’essentiel de ce qu‘on nous avait prévenu qu’il dirait : le déconfinement du petit commerce à partir de samedi et un allègement des mesures restrictrictives de liberté individuelle.  Personne ne critiquera l’initiative.  Il suit d’ailleurs la majorité des pays occidentaux dans la gestion du Covid. 

Mais ce qui est nouveau dans le discours du président français, c’est l’annonce de l’agenda et les différentes étapes qu’il faudra franchir avant de sortir complètement du tunnel. C’est la première fois depuis le début de la crise que le président donne un cap, avec un échéancier. Cette demande était récurrente parce que c’est un moyen de rassurer la population. Maintenant, il faut que cet échéancier soit respecté et que les objectifs soient atteints.

Emmanuel Macron a donc fait le job... Mais il n’avait pas le choix. Il avait trois raisons d’organiser le début d’un déconfinement qui n’ose pas dire son nom, parce qu‘il ne s’agit que d’une mise en liberté provisoire.

La première raison de cet assouplissement est évidemment sanitaire. Les chiffres actuels ne permettent plus de dire que les services d’urgence sont saturés, les entrées en réanimation diminuent et les nouvelles contaminations aussi. La tendance est en bonne voie et les nouveaux objectifs sont fixés. Donc en théorie,  la vie va pouvoir reprendre son cours, même si cela va se faire à un rythme beaucoup plus progressif qu’avant. Rajoutée à cela la perspective d’un vaccin qui marcherait plus tôt que prévu, dans les mois à venir, il y a des raisons d’être optimiste. De là à penser qu’on aurait pu reprendre une vie tout à fait comme avant, personne n’a osé parce que les incertitudes que nous réservent ce virus n’ont pas disparu. Sauf à croire que le vaccin permettrait de nous immuniser tous et complètement ce qui serait complètement utopique. En dépit des critiques qui fusent contre le gouvernement, l’opinion publique n’aurait pas compris que toutes les mesures de protection soient levées. Tout le monde a encore dans l’esprit les effets du déconfinement brutal en mai dernier. La vie a certes repris, mais la circulation du virus  a repris. Donc normalement le confinement ne sera levé qu’à partir du 15 décembre et encore sous surveillance étroite des rassemblements, des réunions de familles et sans restaurant...

Ensuite, la deuxième raison est évidemment économique.  Le confinement ne peut pas durer éternellement parce chacun doit gagner sa vie. Même si l’activité a moins diminué qu’au printemps, le mois de novembre connaitra une baisse d’activité de 13%. Une baisse de création de richesses, couplée à de l’argent qu’on perfuse pour ne pas que les acteurs économiques sombrent complètement. L’ensemble des amortisseurs de crise représente un   coût budgétaire exorbitant, avec plus d’un milliard d’euros de dépenses publiques par jour, avec le financement de l’activité partielle ou le soutien aux indépendants. Mais  il fallait urgemment soutenir le secteur du petit commerce dans la mesure où ce secteur compte près de 400 000 commerçants qui n’ont ni chiffres d’affaires, ni revenus, ni aides sérieuses. Alors ils ont été exonérés d’une grande partie de leurs charges sociales et fiscales, leurs salariés ont été sécurisés par l’allocation de chômage partiel... mais restent les stocks et les loyers dont il va falloir étaler le paiement.

La France est avec l’Espagne le pays qui en Europe va voir son économie la plus abimée par l’épidémie, avec plus de 11% de récession pour 2020. Et Bruxelles commence déjà à taper sur les doigts des pays qui utilisent le « quoi qu’il en coûte » sans perspective de redressement des finances publiques sérieux. A noter que l’OCDE vient de révéler que la France est un des pays au monde à avoir organisé un confinement les plus sévères, d’où l’ampleur des difficultés économiques. Mais la crise économique n’a pas disparu pour autant. Le plus dur reste peut-être à venir avec le cortège de faillites et de dépôts de bilan. Il y avait donc urgence à alléger l’étau qui enfermait l’activité économique.

Enfin, il y a évidemment une raison politique. La nation est tombée dans la déprime et le mécontentement a nourri la colère de certaines catégories sociales et professionnelles, quelle que soit la décision prise. Il fallait urgemment se donner les moyens d’éviter une grogne sociale qui pourrait dégénérer très rapidement dans la violence. Le souvenir des gilets jaunes ou autres, est encore très présent. Dans ce cas , la situation deviendrait politiquement ingérable. A deux ans de la présidentielle, Emmanuel Macron est condamné à rétablir le calme, restaurer la confiance et dégager l’horizon.

Il n‘a pas le choix ... Sauf que l’évolution de la situation ne dépend pas que de l’exécutif, du président de la République et du gouvernement

Elle dépend de la situation du virus, de sa circulation et de ses mutations éventuelles. Elle dépend aussi de la façon dont le reste du monde va combattre le virus parce que nous sommes tous, sur la planète, dépendant les uns des autres. La situation dépend aussi de l’efficacité du vaccin et de l’organisation qui sera mise en œuvre pour toucher l’ensemble de la population.

L’évolution de la situation dépend aussi du comportement des contrepouvoirs. Ou bien les partis politiques d’opposition et les syndicats adoptent une attitude très responsable et proposent non seulement des critiques (c’est normal) mais aussi des alternatives réalisables. Le rôle des syndicats va être primordial dans l’organisation du travail et dans la pédagogie des grandes mutations qui se sont accélérées : le télétravail, la digitalisation et la transition écologique. Ou les contrepouvoirs travaillent à un compromis et ça passe. Ou ils jouent l’obstruction et ça casse.

Cela dit, l’évolution de la situation dépend enfin de la capacité de l’opinion publique à respecter les mesures de protection et  la discipline imposée pour limiter la circulation du virus. Quand on observe la vie quotidienne en France on ne peut que remarquer le sens des responsabilités du plus grand nombre, mais si on braque le projecteur, on s’aperçoit que certains ont dérivé pendant le dernier confinement, et se sont relâchés par rapport aux consignes.

Les Français ne sont pas des Allemands, nous nous sommes en France retrouvés avec  67 millions de médecins épidémiologistes en France qui donnent chaque jour leur avis

Mais si les choses sont ainsi, c’est aussi parce que le gouvernement allemand s’est montré autrement plus cohérent et plus efficace que le gouvernement français face à la pandémie.  La complexité administrative, les ratages du côté des masques et des tests, le centralisme de l’organisation, le cafouillage entre les scientifiques, les médecins et les politiques n‘ont pas contribué à sécuriser les Français et à protéger la confiance que l’on pouvait avoir dans les dirigeants.

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