Chirac, Moubarak, même combak ?

Si Chirac était égyptien, c’est en civière qu’il se rendrait au tribunal. Ni le grand âge ni les problèmes cardiaques de Moubarak ne semblent en effet susceptibles d’émouvoir les magistrats du Caire, et l’on subodore qu’ils accueilleraient une requête de procès in absentia pour « agnosonosie » avec un certain scepticisme…

OK, un dictateur corrompu jusqu’à la moelle et responsable de la mort de centaines de personnes, ça ne se traite pas exactement comme l’ancien président d’un grand pays démocratique tout juste accusé d’avoir confondu argent public et trésorerie partisane. Ils ont beau avoir été réélus l’un et l’autre avec des scores presque identiques (88,5% pour Moubarak en 2005, 82,21% pour Chirac en 2002), il faut bien que la comparaison s’arrête quelque part.

N’empêche, quelle déception ! Deux décennies d’attente pour un tel « anticlimax », c’est à vous dégoûter d’avoir de la patience. Et si personne, à l’exception d’une poignée de revanchards sans cœur, ne souhaite vraiment expédier « supermenteur » derrière les barreaux, la confession publique de pratiques trop longtemps banales dans l’univers politique aurait certainement fait du bien au système.

Oh, on sait bien que faute avouée est à moitié pardonnée, et que le remboursement par l'UMP des salaires versés aux employés fictifs de la mairie de Paris à Bertrand Delanoë est une étape majeure pour Chirac sur le chemin de sa rédemption. Mais rien n’y fait : on bloque…

On bloque parce qu'elle paraît tout de même un peu trop fastoche, cette capacité à freiner la machine judiciaire juste assez longtemps pour déclarer qu’il est trop tard, finalement. A fortiori lorsqu'on a passé des années à jurer ses grands dieux qu’on ne s’en tirerait jamais par une pareille pirouette...

On bloque encore parce que la comparution d’une poignée de lampistes, pour légitime qu’elle soit, transforme un procès majeur en procédure au rabais. On bloque enfin parce que sans partie civile (la mairie de Paris s’est retirée), on ne sait même plus qui accuse qui de quoi…

Ah, il est sympa, le Chirac étourdi qui écluse des pinacoladas sur les quais de Saint-Tropez avec des starlettes et se fait sermonner par une Bernadette en survêtement de rappeur. On imagine mal Hosni et Suzy en faire autant à Charm-el-Sheik ! Il est sympa, mais il nous aura tout de même bien roulés dans la farine jusqu'au bout.