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Air France-KLM : l’Etat français choisit un proche de François Hollande pour remettre de l’ordre et faire plier les pilotes !
©wikipédia

Atlantico Business

L’Etat a finalement choisi Jean-Marc Janaillac pour prendre les commandes d’Air France. Pourvu qu’il ait d‘autres qualités que d’être le meilleur copain de François Hollande...

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Il est aussi l'auteur du blog http://www.jeanmarc-sylvestre.com/.

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Il a fallu pratiquement supplier Jean Marc Janaillac pour qu’il accepte de prendre les commandes d’Air France... Le conseil d’administration et l’Etat français avaient été pris de court par le départ d’un Alexandre de Juniac fatigué de tourner en rond à la tête du groupe Air France-KLM, et surtout épuisé par les interventions intempestives et contradictoires des ministres de tutelle qui exigent en permanence des réformes structurelles et douloureuses tout en refusant d’en assumer l’impact sur les personnels.

Alexandre de Juniac a donc rendu son tablier à la veille d’une négociation très importante avec les compagnies du Golfe, au moment aussi où le syndicat des pilotes considérait qu’il pouvait préempter une partie des progrès réalisés par les premiers efforts de gestion, alors que le groupe Air France-KLM n’a pas réussi le tiers de ce qu’il faudrait faire pour retrouver l’équilibre et engager la bataille du low cost au niveau international.

Lors du dernier trimestre, le chiffre d’affaires global a baissé de 1,3%, à 5,6 milliards d’euros ... et le résultat d’exploitation a été ramené à 99 millions d'euros contre 400 millions un an auparavant.

La gestion Juniac a commencé à produire quelques résultats, mais les marchés financiers ne sont pas rassurés pour autant. Ils attendaient au début de cette année un léger bénéfice (une prévision de 20 millions d'euros) et au pire, un retour à l’équilibre. Les objectifs n’ont pas été atteints.

Or, ce que les analystes soulignent au crayon rouge, c’est que l’amélioration de l’exploitation est liée à une organisation du trafic un peu améliorée, une gestion du personnel plus serrée, et surtout la baisse des prix du pétrole.

Tous ces facteurs sont, en fait, des vecteurs de fragilité. Les perspectives de trafic ne sont pas très bonnes pour l’année en cours. La baisse des prix de l’euro pèse évidemment sur les rapports concurrentiels.

Mais ce n’est pas tout. Rien que sur l’Europe, la compagnie allemande Lufthansa a déclaré la guerre à tout le monde pour affronter la concurrence des compagnies du Golfe, et elle s’en sort assez bien.

Autre facteur d’incertitude, les prix du pétrole. Toutes les compagnies se frottent les mains de payer un carburant si peu cher, d’autant que cela réduit l’avantage concurrentiel des avions du Golfe. Mais elles n’ont aucune certitude sur la durée de cette situation. Ni à Paris, ni à Francfort, ni à Londres, on ne se risquera à faire des budgets d’exploitation à moyen terme sur la base d’un pétrole à moins de 40 dollars le baril.

Le problème pour Air France, c’est que dans cette situation économique qui peut paraître favorable, le personnel n'est pas très enclin à négocier des accords de compétitivité. "La situation va mieux, dit-on chez les pilotes, aucune raison que nous soyons victimes d’une politique d’austérité qui ne s’impose pas".

C’est dans cette situation et cet état d’esprit que le nouveau président du groupe Air France-KLM va atterrir la semaine prochaine.

Alors, Jean-Marc Janaillac connaît un peu la musique, il a géré AOM, il y a quelques années, et le syndicat des pilotes, il le connaît par cœur.

Bien qu’il n‘ait pas fait de campagne pour avoir le job, le conseil d’administration du groupe a considéré qu’il avait sans doute quelques-unes des qualités pour manœuvrer une telle galère.

D’abord, il sort de Transdev, une compagnie de transport qui ne faisait pas la Une des journaux mais qu’il a redressé en cinq ans sans trop de dégâts sociaux. L’entreprise a retrouvé, non seulement l’équilibre, mais aussi de la croissance.

Ensuite, c’est lui qui avait été chargé de dénouer le sac de nœuds qui s’était formé sur la route entre la France et la Corse. La compagnie SNCM a réussi à éviter le naufrage et la faillite. L’Etat s’en est bien sorti, la Corse aussi, et les syndicats ont digéré la nécessité d’adopter des mœurs sociales compatibles avec les équilibres financiers et les impératifs commerciaux. Bref la concurrence qui existe sur ces lignes maritimes pour la Corse a bien dû, finalement, rendre les syndicats plus raisonnables.

La pédagogie et l’autorité de Jean-Marc Janaillac y ont été pour beaucoup dans le retour au calme.

Enfin, le nouveau PDG d’Air France-KLM a 63 ans, sa carrière est donc faite et il n’a plus rien à perdre. Les administrateurs ont sans doute considéré qu’avec un caractère aussi trempé, il pouvait affronter le syndicat des pilotes de ligne et il pouvait même prendre le risque de perdre sa chemise, comme son prédécesseur.

Dans le climat social actuel, le pari qu’il prend de rétablir l’ordre et les comptes paraît compliqué à gagner.

D’autant qu’il a une autre caractéristique, qui, en d’autres temps, aurait pu l’avantager, mais qui aujourd’hui lui est déjà reprochée : Jean-Marc Janaillac est un très bon et vrai copain de François Hollande. Ils se sont connus à HEC, puis ils ont préparé l‘ENA ensemble, l'ont ensuite intégré, et ont cogéré leur promotion devenue la principale réserve de collaborateurs du système "Hollande". Comme Jean-Pierre Jouyet, ou Ségolène Royal, Jean-Marc Janaillac appartenait à la célèbre promotion Voltaire.

Beaucoup en ont profité depuis quatre ans. Lui pas.

Aujourd’hui, les administrateurs ont peut-être pensé que cette proximité entre le PDG d’Air France et le chef de l’Etat pouvait faciliter les négociations en apportant un peu de grain à moudre.

Sans doute que l’Elysée peut en période électorale acheter un bout de paix sociale, mais Jean-Marc Janaillac n’est pas homme à se laisser prendre à ce jeu auquel il n’a rien à gagner.

Alors, certains membres de la direction espèrent que cette proximité entre l’Elysée et la compagnie permettra au président de faire la pédagogie du pragmatisme, non seulement au corps social de l’entreprise, mais également à tout l’entourage du président de la République.

Le nouveau PDG d‘Air France a, comme beaucoup de patrons d‘entreprises liées à l’Etat, besoin du courage politique au plus haut niveau. Son prédécesseur n’a peut-être pas été soutenu exactement comme il l’aurait souhaité.    

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