Agriculture : 50 ans de PAC et encore un quinquennat voué à maintenir les agriculteurs en quasi fonctionnaires d'Etat<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Consommation
La future PAC (Politique agricole commune) est actuellement en discussions pour la période 2013-2020.
La future PAC (Politique agricole commune) est actuellement en discussions pour la période 2013-2020.
©Reuters

La subvention est dans le pré

A l'occasion des journées européennes du patrimoine, du 14 au 16 septembre, l'Europe fête les 50 ans de la Politique agricole commune. Un programme d'aide financière et de contrôle des prix qui dure, mais dont le prochain modèle reste à réinventer pour la période 2014-2020.

Jean-Philippe Feldman

Jean-Philippe Feldman

Jean-Philippe Feldman est agrégé des facultés de droit, ancien Professeur des Universités et maître de conférences à SciencesPo, et avocat à la Cour de Paris. Il est vice-président de l’Association pour la liberté économique et le progrès social (A.L.E.P.S.).

Dernier ouvrage publié : Exception française. Histoire d’une société bloquée de l’Ancien Régime à Emmanuel Macron (Odile Jacob, 2020).

Voir la bio »

François Hollande a prononcé un discours le 11 septembre au Salon International de l’élevage à Rennes pour déflorer sa « vision » de l’agriculture française. En deux mots, le nouveau président de la République a martelé que l’Etat protègerait et soutiendrait l’élevage, en lien avec les régions qui seraient les « chefs de file du développement économique, de la formation et de l’innovation », que la France défendrait un budget européen qui maintiendrait les crédits de la Politique agricole commune, que la « volatilité » des prix agricoles était inacceptable, que l’agriculture ne pouvait être abandonnée aux règles du marché, au « libéralisme sans limites », à la « mondialisation sans règles » et à la « financiarisation sans morale », que la « gouvernance mondiale » était indispensable, enfin que la concurrence serait « faussée » si les produits qui circulaient n’étaient pas soumis aux mêmes règles, conditions et contraintes. Certes, François Hollande témoigne d’une ignorance poussée à son acmé en la matière, mais celle-ci est excusable.

Ignorance, car son discours révèle une méconnaissance des nécessités du monde agricole et un mépris des contribuables. Comme depuis toujours -on pourrait aisément remonter à l’Ancien Régime-, les hommes de l’État français entendent intervenir dans le domaine agricole au motif que le libre jeu du marché ne serait pas pensable. De là, des règles, de la bureaucratie, des impôts et des subventions. On en vient à se demander comment diable font les agriculteurs et les éleveurs néozélandais pour survivre, et même prospérer… avec 1 % d’aides de leur État, contre 30 à 40 % pour les agriculteurs et éleveurs de l’Union européenne. On se demande comment font leurs homologues australiens avec des aides limitées à environ 5 % de leurs revenus. François Hollande confirme sans gloire la prégnance du « marché politique » qui règne en France et qui transforme bien des agriculteurs en simili-fonctionnaires nourris au lait de l’État. Combien de professionnels en France peuvent-ils se targuer de percevoir 30 ou 40 € de la part de celui-ci sur 100 € de revenus ?

Mais ignorance excusable. François Hollande ne poursuit-il pas finalement la politique de ses prédécesseurs ? Certes, Nicolas Sarkozy, tant lors de la campagne présidentielle de 2007 qu’au cours de son quinquennat, avait qualifié plusieurs fois les agriculteurs d’entrepreneurs. L’idée avait été favorablement accueillie, mais les actes n’avaient pas suivi, en ce point comme en beaucoup d’autres. Le ministre de l’Agriculture reste ce qu’il a toujours été depuis la fin du XIXème siècle : celui des Subventions agricoles. Les agriculteurs demeurent soumis à une paperasserie édifiante pour « bénéficier » de la Politique agricole commune. Les syndicalistes agricoles, quémandeurs de droits et de passe-droits,  rendent toujours l’État responsable de la pluie néfaste ou du beau temps excessif, sous menace de quelques pneus brûlés devant les préfectures ou sous-préfectures. Le corporatisme le plus éculé enrichit les uns -une minorité- et appauvrit tous les autres.

Que François Hollande n’ait pas saisi qu’il fallait, tant dans l’intérêt des consommateurs (qui payent deux fois leurs produits : à l’achat et en subventions) que dans celui des producteurs, dépolitiser la question agricole, ne saurait surprendre. Il reste à espérer que la droite et le centre profite de leur cure d’opposition forcée pour « changer le logiciel intellectuel », selon l’excellente expression de Mathieu Laine (Le Monde, 13 septembre 2012).

On comprendra alors que les agriculteurs ne doivent pas être des assistés, mais qu’ils sont des entrepreneurs. On comprendra qu’ils n’ont pas à être à la charge des consommateurs, dont il ne faut pas oublier qu’ils sont aussi et avant tout des contribuables. Le territoire français recèle des richesses et un savoir faire remarquables. Cessons de les gaspiller du fait d’une politique surannée, et libérons enfin l’agriculture française et européenne !

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !