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Mais qui est Rand Paul, ce chantre du "populisme libertarien" et nouvel espoir du parti républicain?
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Trans-Amérique Express

Dans la course à l'élection présidentielle américaine de 2016, déjà lancée, le fils de Ron Paul surfe sur la vague "libertarienne". Terme barbare auquel il faudra s’habituer. Il traduit la foi historique américaine en l’individu, base sur laquelle Rand Paul veut refonder le parti républicain.

Gérald Olivier

Gérald Olivier

Gérald Olivier est journaliste et  partage sa vie entre la France et les États-Unis. Titulaire d’un Master of Arts en Histoire américaine de l’Université de Californie, il a été le correspondant du groupe Valmonde sur la côte ouest dans les années 1990, avant de rentrer en France pour occuper le poste de rédacteur en chef au mensuel Le Spectacle du Monde. Il est aujourd'hui consultant en communications et médias et se consacre à son blog « France-Amérique »

Il est aussi chercheur associé à  l'IPSE, Institut Prospective et Sécurité en Europe.

Il est l'auteur de "Mitt Romney ou le renouveau du mythe américain", paru chez Picollec on Octobre 2012 et "Cover Up, l'Amérique, le Clan Biden et l'Etat profond" aux éditions Konfident.

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La prochaine élection présidentielle américaine est dans plus de trois ans. Mais les prétendants, surtout chez les Républicains, se disputent déjà les faveurs du public, des médias, et des donateurs. Histoire de se faire un nom, une image et de se constituer l’indispensable trésor de guerre.

L’homme le plus actif en ce début de saison est un sénateur du Kentucky du nom de Rand Paul. Qui n’est autre que le fils de Ron Paul, candidat à la nomination républicaine en 2012 et chantre de l’idéologie « libertarienne », un courant de pensée,  longtemps marginal, et aujourd’hui en plein essor outre-Atlantique.

Rand Paul a, à peu près les mêmes idées que son père. Mais il compte porter le flambeau « libertarien » bien plus loin que lui. Jusqu’au sommet du parti républicain. Qu’il y parvienne ou pas, son message résonne. Et c’est cela qui change le paysage politique américain. Les Français vont devoir s’habituer à un nouveau néologisme anglo-saxon, car le mot « libertarien » n’existe pas dans la langue de Molière.

Rand Paul a cinquante ans. Marié, père de trois garçons, il est mince, a le nez et le menton pointu avec un tignasse rousse frisée qui lui donne des faux airs de Danny Kaye. Ancien ophtalmologiste avec un diplôme de médecine de l’Université Duke de Caroline du Nord, il est devenu sénateur du Kentucky en 2010, surfant sur la vague de popularité du Tea Party.

Rand Paul fait partie de ces Américains qui pensent que le gouvernement en général, et l’administration Obama en particulier, sont « hors contrôle » (« out of control »). Pour lui, l’étendue des pouvoirs et des activités de l’Etat n’a plus rien à voir avec la vision des Pères Fondateurs. Les impôts nécessaires pour financer une telle organisation sont excessifs, voire confiscatoires. Et loin d’aider les Américains, la machine gouvernementale  leur rend la vie impossible, par sa manie de la règlementation. Il faut donc en revenir à un système plus simple, réduire le rôle de l’Etat, réduire les impôts en proportion et laisser les citoyens américains mener librement leur vie. Au passage, le rôle international des Etats-Unis serait également revu à la baisse. Et certaines activités, comme la consommation de drogue, pourraient être dépénalisées…

Rand Paul a le sens du spectacle. Début Mars, il a mené ce que les Américains appellent un « filibuster ». C’est-à-dire qu’il a monopolisé la parole au Sénat jusqu’à ce que l’épuisement l’empêche de parler. Le but de la manœuvre étant de paralyser le débat et de retarder le vote d’un texte de loi. Et bien sûr de faire parler de soi… En ce sens sa démarche a été un succès. Sa performance, qui a duré treize heures et des poussières, a fait le « buzz » sur Internet. C’était pourtant une performance modeste. En 1957, le sénateur de Caroline du Sud Storm Thurmond avait parlé pendant plus de 24 heures pour défendre la ségrégation… Rand Paul est entré de justesse dans le top 10 des « filibusters » les plus longs… Mais il s’est fait un nom !

Plus récemment, Rand Paul était en Californie. Il a fait le tour des grandes compagnies de la Silicon Valley, Google, eBay et Facebook. Parce qu’elles représentent l’avenir. Et surtout parce que leurs patrons sont milliardaires. Or en politique, comme ailleurs, l’argent demeure le nerf de la guerre. Et Paul a conclu sa visite par un discours remarqué le 31 mai dans la bibliothèque Ronald Reagan de Simi Valley, près de Los Angeles. Haut lieu symbolique pour les Républicains. Car Ronald Reagan occupe toujours une place à part dans leur cœur. C’est le dernier des grands. Un peu comme de Gaulle en France.

Rand Paul ambitionne justement de réformer le parti républicain pour en faire à nouveau une machine à gagner des scrutins et pourquoi pas le porter jusqu’à la Maison blanche… Il reproche à son parti d’avoir perdu ses racines populaires. Pour lui, Mitt Romney a été battu en 2012 parce qu’il n’a pas su établir de lien avec le peuple américain. Le parti républicain est assimilé au  parti des « riches », des « blancs » et du « big business ». « Quand le parti républicain ressemblera à nouveau au peuple américain, il remportera à nouveau des élections, » proclame Rand Paul. Il veut ouvrir le parti aux minorités et se fait le chantre du « populisme libertarien ».

Le courant « libertarien » a toujours existé dans l’histoire et l’imaginaire américains. Il est constitutif de l’idéologie du « self made man ». Présenté de façon schématique  ce courant peut s’assimiler à une forme d’anarchisme de droite. C’est-à-dire à une totale liberté laissée à l’individu d’agir en société dans le respect de la loi et du droit de propriété. Le rôle du gouvernement étant réduit à celui de garantir la sécurité, à l’extérieur comme à l’intérieur des frontières.

Rand Paul n’en offre pas une version extrême. Au contraire. Il concède au gouvernement un rôle de régulateur. Notamment sur les questions environnementales et revendique une forme d’écologie de droite. « Je fais de la marche, du vélo, du kayak, et même du compost », dit-il.

En fait Rand Paul se présente contre les trois « big » de la politique américaine. Contre le « big government », contre le « big business »,  et contre le «  big money ». Il rejette l’Etat tentaculaire, critique les multinationales qui délocalisent  au nom du profit, et pourfend leur allié, la finance internationale. Bref il veut capitaliser sur le vent de révolte qui souffle aussi bien contre Washington que contre Wall Street.

Il soutient le petit entrepreneur, le petit artisan, ou le petit agriculteur, surtout si ce dernier fait du bio… Et Paul est ouvert sur la question de l’immigration à quiconque « vient aux Etats-Unis avec l’ambition de travailler, pas d’être assisté ».  Au passage,  il inquiète à gauche, parce qu’il n’hésite pas à labourer sur leurs terres naturelles.

Le parti Républicain est en pleine reconstruction suite au choc de la défaite de Mitt Romney en novembre 2012. Le visage qui sera le sien en 2016 est encore flou. Rand Paul compte le modeler à son image, pour en devenir le leader naturel et être candidat à la présidence.

Certains signes ne trompent pas. A part la Californie, Paul a visité deux autres Etats récemment, l’Iowa et le New Hampshire, les Etats-Unis où se tiennent les deux premières primaires de la saison électorale…

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