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Amazon : Pour qui sonne le glas ?
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En fin de semaine passée Amazon, spécialiste de la vente en ligne, a annoncé vouloir acheter Whole Foods pour 13 Milliards de Dollars. Cette acquisition soulève énormément de questions.

Alain Pitous

Alain Pitous

Alain Pitous, Directeur Général Adjoint Associé de Talence Gestion (@alainpitous).

Talence Gestion est une société de gestion de portefeuille indépendante spécialisée dans la gestion sous mandat pour les particuliers et la gestion de fonds commun de placement en actions.

Précédemment, il a été pendant 5 ans (2009-2014) Deputy CIO d’Amundi (850 Milliards d’Euro sous gestion) et gérant du fonds Amundi Patrimoine de 2012 à juillet 2014.

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En fin de semaine passée Amazon, spécialiste de la vente en ligne, a annoncé vouloir acheter Whole Foods pour 13 Milliards de Dollars. Cette acquisition soulève énormément de questions.
Amazon achète-t’il une chaîne de magasin « en dur » pour changer de métier ? Ou bien s’agit-il d’une acquisition totalement déstabilisante pour les supermarchés de la planète qui vont devoir soit disparaître soit se regrouper pour survivre ou trouver un partenaire « internet » pour espérer s’adapter à un monde de la distribution en total chamboulement. 
Avant d’aller plus loin Whole Foods c’est quoi ? 
Il s’agit d’une chaîne de 465 magasins vendant des produits bio, employant 87000 salariés et offrant, à travers 30000 références produits, ses produits à 30 Millions de clients. Whole Foods réalise un Chiffres d’Affaires de 16 Milliards de Dollars.  
L’irruption d’Amazon dans cette activité de la vente de produits frais et bio n’est pas une surprise. Jeff Bezos, l’emblématique patron d’Amazon l’annonçait depuis longtemps. Ce n’est pas le signe d’un changement stratégique visant à venir concurrencer les supermarchés sur leur terrain de la vente en magasin. 
Le jour de l’annonce de l’opération, tous les titres des entreprises de distribution à travers la planète ont nettement reculé : l’arrivée d’Amazon est clairement ressentie  comme une menace…aussi bien pour Carrefour que pour Wal-Mart son équivalent américain. Plus de  40 Milliards de $ de capitalisation ont été perdu par le secteur ce jour-là. 
La réaction du marché nous a semblé assez fondée sur l’émotion…en effet bien souvent on a tendance à surestimer les effets à court-terme d’une révolution technologique et à sous-estimer les puissants changements induits sur plus longue période.
La réaction des concurrents va être d’abord de protéger leur territoire et la plupart des grands distributeurs vont se défendre en investissant massivement dans le commerce numérique sous leur marque ou en faisant l’acquisition de marchand en ligne. C’est vrai aux Etats-Unis bien sûr mais aussi en France. 
La nouveauté est qu’Amazon attaque désormais des marchés « vierge » de sa concurrence. Plus personne n’est à l’abri. Mais dans le cas de Whole Foods, l’enjeu est double. Auparavant, il y avait deux mondes : celui des distributeurs « en dur » et les distributeurs en ligne. 
Désormais Amazon va coupler les 2. Le danger est donc majeur pour tout le monde ! Amazon va pouvoir répondre à tous les besoins de ses clients…que ce soit en ligne ou pas. Amazon a une grande expérience du service client en ligne où tout est fait pour simplifier la vie du client… Amazon va utiliser les méthodes de paiement internet pour accélérer et simplifier les passages en caisse et va pouvoir croiser ses fichiers avec les données des clients de Whole Foods…Cela lui donne un accès aux données des 30 Millions de clients avides de consommer des produits bio avec un pouvoir d’achat important. Inversement ses clients actuels aux Etats-Unis, pour commencer, accèderont à des produits bio très « tendance ». Amazon a peut-être inventé un nouveau modèle mêlant le meilleur des deux mondes ! Comme souvent Amazon avance méthodiquement et comme un rouleau compresseur : elle va utiliser Whole Foods pour apprendre le métier de la vente de produits frais avant d’accélérer ! 
Comme souvent néanmoins dans les fusions il ne faut pas négliger le choc des cultures : les rois des algorithmes et de l’optimisation de la logistique vont devoir travailler avec des équipes pour lesquelles le terroir, la qualité des produits « bio » sont essentiels. En imaginant que ces aspects soient surmontés, il est clair qu’Amazon va puissamment faire évoluer les modèles de distribution : Amazon va pouvoir profiter de sa connaissance des historiques d’achats pour vendre des produits bien sûr mais aussi pour vendre des publicités ciblées aux clients actuels d’Amazon et aux clients de Whole Foods. L’initiative d’Amazon va lui permettre d’accroitre sa part de marché dans la publicité en ligne. L’enjeu est majeur là aussi. 
L’inquiétude est compréhensible pour beaucoup de distributeurs « en dur » : en fait rien ne peut résister à la puissance d’achat d’Amazon qui peut acheter n’importe quel concurrent ou nouer des partenariats stratégiques avec les plus grandes marques. Deux illustrations : 
1-les produits pharmaceutiques : il est probable qu’Amazon se lance dans cette activité de ventes de produits pharmaceutiques d’ici quelques années avec les conséquences que l’on imagine dans les croisements d’informations possibles. 
2-Les partenariats avec des marques : cette semaine Amazon a annoncé un partenariat avec Nike. Là, l’idée est de coupler la puissance des deux marques…les autres marques de produits liés au sport ont aussi reculé nettement en bourse. 
Comme indiqué précédemment Amazon va utiliser Whole Foods non seulement pour apprendre la distribution de produits frais mais aussi pour améliorer sa logistique rapide (on comprend pourquoi) mais aussi pour innover dans les services avec son offre récente de service « entre particuliers » : moyennent un petit rabais sur votre commande prise en magasin Amazon vous confie la livraison d’une commande pour un autre particulier sur votre chemin de retour à la maison. 
Bref, Amazon n’a pas fini d’inquiéter les acteurs du secteur. Il n’y a pas de fatalité selon nous. Il est certain que les plus fragiles vont disparaître mais les plus orientés « service et valeur ajoutée » vont pouvoir continuer à se développer… en dur et/ou en ligne. 

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