Blague de François Hollande sur l'Algérie : de la nécessité d'encourager la liberté d'expression plutôt que la langue de bois<!-- --> | Atlantico.fr
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La blague de François Hollande a provoqué un incident diplomatique avec l'Algérie.
La blague de François Hollande a provoqué un incident diplomatique avec l'Algérie.
©Reuters

Blague à part

François Hollande a déclaré devant le Crif que le ministre de l'Intérieur Manuel Valls était rentré d'Algérie "sain et sauf", ajoutant que "c'était déjà beaucoup". Cette déclaration, faite sur le ton de la plaisanterie, a choqué en France et en Algérie.

André Bercoff

André Bercoff est journaliste et écrivain. Il est notamment connu pour ses ouvrages publiés sous les pseudonymes Philippe de Commines et Caton.

Il est l'auteur de La chasse au Sarko (Rocher, 2011), Qui choisir (First editions, 2012), de Moi, Président (First editions, 2013) et dernièrement Bernard Tapie, Marine Le Pen, la France et moi : Chronique d'une implosion (First editions, 2014).

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Je ne sais pas s’il faut le sauver, mais il faut comprendre le général en chef Hollande. Depuis plus de dix-huit mois qu’on lui a laissé les rênes d’un Etat aux 60 millions de sujets, sans compter les sujets de mécontentement, ce fut dur. Très dur. De l’extension du champ de la dette à Leonarda en passant par les bisbilles gouvernementales, les manifestations de bonnets rouges et de veilleurs, la courbe du chômage qu’il faut inverser et les impôts qu’il faut recueillir, Hollande n’a pas eu une minute de répit. Bien que dix ans de navigation à vue dans le marigot de Solferino lui ait épaissi le cuir et l’ait persuadé de sa bonne étoile, il est des moments où le plus aguerri des hommes a envie de souffler. Certes, il y a eu le Mali, il y a aujourd’hui la Centrafrique, mais cela ne suffit pas à redresser la courbe en capilotade des sondages.

François Hollande, depuis son arrivée en politique il y a une trentaine d’années, a toujours été connu pour un homme disert, brillant, spirituel et ne résistant jamais à une bonne blague. C’est peu dire qu’il aime le trait d’esprit : il en raffole, il fait partie de son ADN d’énarque rond et malicieux, habile et manœuvrier, ayant observé, pendant des années, Mitterrand à la loupe et s’évertuant depuis à mettre ses pas dans les pas de son maître.

Mais ça, hélas, c’était avant. Avant que la France ne soit occupée par la police de la pensée, le principe de précaution mentale, la censure tous azimuts : désormais, tous doivent faire attention à ne pas dépasser les bornes prescrites, à ne pas risquer le début du commencement d’une plaisanterie qui pourrait heurter plus d’une personne à la fois. Sinon, dès que l’on sort de la « correctitude » érigée en Premier commandement des Tables de la Loi, cinquante associations se précipitent pour vous déchiqueter, dans les médias, devant les tribunaux, dans la rue... Les hommes politiques, encore plus que les autres, sont surveillés 24h/24 par la vigie du Web. Evidemment, le premier d’entre eux est le mieux servi.

Mais le plus révélateur est que cette brève de comptoir hollandaise a suscité un incident diplomatique, un tsunami d’insultes sur Twitter et Facebook et l’obligation pour le pauvre Hollande de présenter ses regrets. Tout se passe comme si, en ces temps de médiocrité ambiante, la langue de bois redevient non seulement un luxe mais une nécessité. Décidément, il urge d’introduire dans la Constitution un premier amendement à l’américaine, qui garantisse enfin la liberté d’expression y compris celle de déconner au sommet.       

A lire de l'auteur de cet article : "Je suis venu te dire que je m’en vais",  André Bercoff et Deborah Kulbach, (Michalon Editions), 2013. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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