Statut étudiant-entrepreneur : le chemin qu'il reste à parcourir pour les Zuckerberg en herbe<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
"La possibilité de conserver ses avantages étudiants tout en ayant créé sa boîte est une avancée."
"La possibilité de conserver ses avantages étudiants tout en ayant créé sa boîte est une avancée."
©Reuters

Sur la route

La ministre de l'Enseignement supérieur a annoncé mardi une série de mesures pour permettre aux jeunes diplômés qui souhaitent créer leur entreprise de conserver leurs droits sociaux étudiants. Reste à savoir si cela permettra de relancer l'entrepreneuriat français.

Benjamin Suchar

Benjamin Suchar

Benjamin Suchar est diplômé de Paris Dauphine et de l’EM Lyon. Il a lancé l’application mobile CheckMyMetro et co-fondé Yoopies.fr , la première plateforme sociale de baby-sitting. Il est membre fondateur des Moineaux.

Voir la bio »

Atlantico : Avec le statut d’auto-entrepreneur, n’était-il pas déjà possible d’être à la fois étudiant et entrepreneur ?

Benjamin Suchar : D’abord, il faut bien comprendre que malgré les annonces faites par madame Fioraso sur la création d’un statut d’étudiant-entrepreneur, aucun statut juridique n’a vraiment été mis en place. Il s’agit juste d’une série de mesures. Pouvait-on être auparavant à la fois étudiant et entrepreneur ? Oui mais c’était compliqué et je ne suis pas sûr qu’aujourd’hui cela soit devenu beaucoup plus simple !

Nous saluons néanmoins la prise de conscience par le gouvernement de cette problématique et la mise en avant de certains engagements, même s’ils manquent de véritables mesures concrètes. Proposer par exemple l’allocation de crédits ECTS aux créateurs d’une entreprise et pas uniquement lors d’un stage ou en cours est une mesure symbolique. Cette possibilité existait déjà en école de commerce mais elle sera désormais étendue à l’ensemble des étudiants. De même, la possibilité de conserver ses avantages étudiants tout en ayant créé sa boîte est une avancée. Cela permet d’officialiser une situation déjà possible auparavant en s’inscrivant à l’université sans s’y rendre. On n’aura donc plus besoin de se « cacher » !

Quels sont les obstacles à la création d’une entreprise propres au fait d'être étudiant ?

Le premier obstacle provient de la difficulté à trouver des financements car les banques ne prolongent pas les prêts étudiants à l’issue de la scolarité. Seuls les étudiants aisés, soutenus par leur famille, peuvent aujourd’hui se permettre de créer leur entreprise car ce processus signifie que l’on ne va pas toucher de salaire pendant plusieurs mois voire quelques années. Il y a donc une nécessité que les banques reconduisent les prêts étudiants aux mêmes conditions, le temps que l’étudiant puisse se lancer dans sa création d’entreprise et trouver des "business angels". Quitte, si ça ne marche pas, à trouver ensuite un travail salarié pour rembourser ce prêt. Face à la frilosité des banques, l’État doit intervenir.

Le deuxième problème pour les étudiants créateurs d’entreprise est de subir une double peine car ils doivent à la fois cotiser à l’Urssaf et à la sécurité sociale étudiante ! Lorsqu’on sait par exemple que le forfait social en tant que gérant de SARL est de plus de 2 000 euros sans même faire 1 euro de chiffre d’affaire, cela représente un frein très important ! A titre de comparaison, 2 000 euros, c’est le prix pour avoir un premier site internet ou un prototype. Enfin, beaucoup d’étudiants qui souhaitent lancer leur activité souffrent d’un manque de "mentorat" et d’accompagnement professionnel, avec le soutien de professeurs par exemple et la mise à disposition de locaux par leur Université.

Le nouveau statut proposé par le gouvernement répond-il à ces contraintes ? Notamment sur le plan de la couverture sociale ?

Non pas du tout. Le gouvernement propose à l’entrepreneur d’être couvert et de pouvoir cotiser à la sécurité sociale étudiante encore un an après ses études. Mais cela ne résout pas le problème des doubles cotisations sociales à payer. Sans véritable statut, cette double peine persistera.

Les vraies problématiques n’ont pas reçu de réponses concrètes. C’est une déception par rapport aux annonces faites lors des Assises de l’entrepreneuriat par François Hollande et Fleur Pellerin. La création d’un pôle étudiant-entreprise ou l’instauration d’un diplôme universitaire spécifique restent des mesures symboliques. Enfin une troisième promesse reste insatisfaite, c’est la création d’un visa entrepreneur pour les étudiants étrangers qui souhaitent créer leur entreprise en France. Aux USA, il existe un nombre important d’entreprises créées par des immigrés de 1ère ou 2ème génération mais en France on ne parvient pas à les attirer.

Quelles sont les limites de ces mesures ? Que faudrait-il faire de plus pour favoriser l’innovation chez les jeunes diplômés ?

Ces propositions se limitent à des effets d’annonce sans réelles applications concrètes. Le fait que seule la ministre de l'Enseignement supérieur et de la recherche, Geneviève Fioraso, soit impliquée dans ce plan montre les limites de l’engagement du gouvernement. Nous aurions bien voulu qu’elle soit accompagnée de Fleur Pellerin par exemple. Surtout, il manque toujours la création d’un véritable statut juridique qui permette aux jeunes entrepreneurs de conserver une couverture sociale à un coût moindre et un refinancement des prêts étudiants promis par le chef de l’État.

Propos recueillis par Pierre Havez

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !