Chronique d'une mort annoncée
Pourquoi l’échec des emplois d'avenir est d’ores et déjà définitif
Le ministre délégué à la Ville, François Lamy, a reconnu que moins de 5 000 emplois d'avenir auraient été signés depuis la mise en place du dispositif. Le gouvernement souhaitait pourtant atteindre la barre des 100 000 contrats d'ici fin 2013.
Atlantico : Seuls 5 000 emplois d'avenir sur les 100 000 espérés par le gouvernement d'ici à fin 2013 auraient été signés depuis la mise en place du dispositif selon François Lamy. Comment expliquer que les emplois d'avenir peinent à séduire ceux à qui ils s'adressent, c'est à dire les jeunes sans diplômes âgés de 16 à 25 ans ?
Gilles Saint-Paul : Les emplois d'avenir s'adressent en priorité à des entités non marchandes comme l'administration et le milieu associatif (le taux de subvention est nettement plus faible dans le secteur marchand). Par définition, ces entités ne sont pas vendeuses d'un bien ou service mais ont un budget global (résultat de décisions politiques et de la générosité des donateurs) qu'elles dépensent sur différents postes. Même si l'embauche d'un jeune sous contrat d'avenir est peu coûteuse, elles ne rentreront pas dans leurs frais si elles ne peuvent utiliser la personne ainsi embauchée pour générer des revenus supplémentaires, ce qu'une entreprise purement privée ferait naturellement. L'idéologie anti-marché du pouvoir en place se trouve ici en contradiction avec l'objectif de subventionner l'emploi.
Il aurait été plus cohérent de recruter directement ces jeunes sous CDD dans l'administration. A ces considérations s'ajoutent le fait que les emplois d'avenir s'adressent à des populations au niveau de formation très faible et donc peu productives. Même à un tarif discount une administration ou une association hésite à les employer.
Que faudrait-il améliorer dans les contrats d'avenir pour qu'ils touchent leur cible ?
Ces mesures seraient plus efficaces si elles s'adressaient avant tout au secteur marchand, dont la demande pour des travailleurs peu qualifiés est plus élevée que le secteur non marchand, et qui peut facilement rentabiliser l'embauche d'un jeune à faible coût en accroissant le volume de ses activités. Même ainsi, cet argent aurait été sans doute mieux dépensé dans la formation et l'aide à la recherche d'emploi.
Contrats d'avenir, contrats aidés, contrats de génération : pourquoi faut-il inventer des dispositifs particuliers pour aider certains actifs à trouver du travail et éviter aux jeunes d'être exclus des CDI et des CDD ?
Le problème de fond est la formation des salaires et le coût du travail excessif dû au fardeau de l'Etat-providence. S'attaquer à ces rigidités implique une remise en question des mécanismes de négociation collective et donc du pouvoir des syndicats dits "représentatifs", un coup d'arrêt aux hausses continues du SMIC et une réduction du niveau de protection sociale des Français (qui est désormais particulièrement élevé comparé aux autres pays européens).
Aucun gouvernement n'est prêt à se lancer dans de telles réformes. On a donc affaire à des mesures ponctuelles destinées à montrer au public que l'on se mobilise. Mais si ces mesures constituent de facto une subvention au coût du travail, elles ne peuvent rester que très limitées car sinon leur coût pour les finances publiques deviendrait intolérable. Il est donc totalement inenvisageable dans le cadre actuel de réduire le chômage de façon durable. De surcroît, le fait de constamment introduire de nouvelles aides tout en supprimant celles qui existent les rend toutes globalement inopérantes car les entreprises ne peuvent pas tabler sur elles à long terme. Ce qui subsiste ce sont essentiellement des effets d'aubaine, c'est à dire qu'on utilise les aides pour des emplois qu'on aurait créés de toutes façons.
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