"Libérer les Français" : top 5 des mesures dont la France aurait vraiment besoin pour retrouver de l'oxygène<!-- --> | Atlantico.fr
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Certains leaders socialistes mettent aussi en garde contre un "ras-le-bol fiscal".
Certains leaders socialistes mettent aussi en garde contre un "ras-le-bol fiscal".
©REUTERS/China Daily

Ma liberté

Jean-François Copé a appelé à "libérer les Français d'une fiscalité oppressante" lors de son meeting de Châteaurenard dimanche. L'occasion de se pencher sur les moyens concrets de mise en œuvre d'un tel projet.

Éric Verhaeghe,Pascal Salin et Erwan Le Noan

Éric Verhaeghe,Pascal Salin et Erwan Le Noan

Éric Verhaeghe est l'ancien Président de l'APEC (l'Association pour l'emploi des cadres) et auteur de "Faut-il quitter la France ?" (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr.

Pascal Salin est Professeur émérite à l'Université Paris - Dauphine. Il est docteur et agrégé de sciences économiques, licencié de sociologie et lauréat de l'Institut d'Etudes Politiques de Paris.

Erwan Le Noan est consultant en stratégie et président d’une association qui prépare les lycéens de ZEP aux concours des grandes écoles et à l’entrée dans l’enseignement supérieur.

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Alors que le poids de la fiscalité pèse sur les Français au point que certains leaders de gauche appellent à s'en méfier, le président de l'UMP, Jean-François Copé a dit souhaiter "libérer les Français". Tour d'horizon des principales mesures qui pourraient réellement y parvenir. 

Première mesure

Eric Verhaeghe : Face au nouveau constat qui s’impose à tous : les réformes, c’est pour plus tard, et face au grondement sourd d’un pays qui étouffe, quelles mesures proposer pour libérer la France en 6 mois ?

Le chèque scolaire, vite! La France se meurt de son conformisme courtisan. Dès le plus jeune âge, les petits Français sont enlevés à leur famille pour être formatés dans de grandes usines à penser conforme et thuriféraire, appelées «école publique». Alors qu’une augmentation constante de budget de l’Education nationale, et qu’un allongement tout aussi constant de la scolarité depuis 30 ans se traduisent par une implacable baisse de niveau, l’idéologue Vincent Peillon a même décidé d’aggraver le cyclone en lançant la scolarité dès 2 ans.

On sait tous à quoi même cette folie sectaire : à une vaste entreprise de mise des cerveaux français en coupe réglée, destinée à nous rendre plus dociles et mieux soumis à une élite décadente qui se réserve les meilleures écoles et les plus lourdes subventions pour des formations ultra-ségrégatives. Regardez le budget de l’ENA ! Regardez les budgets des classes préparatoires ! Et vous comprendrez vite que la sacro-sainte école de la République financée par le sacro-saint Etat égalitaire est un pitoyable cache-nez pour une sélection sociale organisée de façon scientifique par les mandarins du régime.

Une seule solution : que chaque famille reçoive chaque année l’équivalent des subventions attribuées à son enfant pour faire tourner l’école publique (entre 5.000 et 12.000 euros selon le niveau de scolarité), et que chacun choisisse l’établissement qui lui convient. Et qui, bien entendu, ne recevra plus un centime de l’Etat. Une mesure salvatrice pour mettre à bas l’arrogance aristocratique de nos élites.

Pascal Salin : L'interventionnisme étatique n'a pas cessé d'augmenter en France au cours des décennies passées, aussi bien sous des présidents de droite que de gauche, de telle sorte que la France se trouve maintenant dans le peloton de tête des pays où les prélèvements obligatoires, les dépenses publiques et les réglementations sont les plus importants. Il est donc évident qu'il est urgent d'adopter des politiques exactement inverses de celles qui ont été pratiquées jusqu'à présent.

Une réforme fiscale rapide et profonde : celle-ci constitue une priorité absolue car les prélèvements obligatoires détruisent les incitations à produire, à travailler, à innover, à épargner ou à investir. Il conviendrait tout d'abord de diminuer de manière considérable la progressivité de l'impôt et même d'adopter une "flat tax", c'est-à-dire un impôt à taux proportionnel et non à taux progressif, comme l'on fait avec succès un certain nombre de pays, en particulier plusieurs pays anciennement communistes d'Europe. En effet, la progressivité n'a aucune justification morale ou économique, elle punit les plus productifs, elle incite à faire peser sur une minorité active le poids de dépenses publiques croissantes. Il conviendrait par ailleurs de supprimer des impôts particulièrement nocifs et stupides tels que l'ISF et les droits de succession. Il est enfin une autre réforme – dont on ne parle malheureusement jamais, mais que je défends pour ma part depuis bien longtemps – celle qui consisterait à remplacer l'impôt sur le revenu par l'impôt sur la dépense globale. Ce dernier consiste à permettre aux contribuables de déduire de l'assiette de ce qui est actuellement l'impôt sur le revenu le montant de l'épargne qu'ils font l'effort de réaliser chaque année. Bien entendu, les revenus de cette épargne seraient taxés, mais seulement dans la mesure où ils seraient consommés et non épargnés à leur tour. Il résulterait d'un telle réforme une incitation à l'accumulation de capital qui serait favorable à la croissance économique.

Erwan Le Noan :Le poids de la fiscalité ne cesse de croître en France : les prélèvements obligatoires dépassent les 45% du PIB (les recettes publiques atteignent 51 % du PIB, bien au-delà des autres pays de l’OCDE). La main d’œuvre y est chère et particulièrement taxée. En clair, comme l’ont dit l’OCDE ou le FMI, la fiscalité nuit à la bonne santé économique de la France. Baisser la pression fiscale est un impératif économique, mais aussi politique – pour répondre à la grogne croissante – et presque philosophique : au nom de la liberté, il faut baisser l’emprise que l’Etat exerce sur les citoyens. Pour libérer les Français en matière fiscale, cinq mesures peuvent être intéressantes que je vais décrire.

Cesser la création de tout nouvel impôt : La priorité, c’est d’annoncer que l’on ne créera plus d’impôt d’ici la fin du quinquennat. Cela donnerait un grand coup de vent, une respiration pour l’économie. C’est une annonce, mais il faut la faire d’urgence. Le problème, c’est qu’en 2012, le gouvernement avait promis qu’il n’augmenterait pas les impôts après 2013. Puis en 2013, il promet qu’il n’augmentera pas les impôts après 2014. Et maintenant, on entend des ministres expliquer, dans les débats sur les retraites, qu’il faut distinguer impôt et cotisation, etc. Les Français se fichent de ces explications biscornues et technocratiques.

Deuxième mesure

Eric Verhaeghe : Supprimer la TVA inter-entreprises. Depuis 1956, les entreprises font l’avance à l’Etat du produit de la TVA payée par le consommateur final. Soit plus de 140 milliards prélevés à l’œil par les entreprises pour la plus grande satisfaction des fonctionnaires des impôts, dont tous les experts comptables vous diront qu’ils se plaignent pourtant à longueur de journées de leurs conditions de travail.

Une solution, pour libérer les entreprises : supprimer cette avance sur les recettes de l’Etat, ce qui dégagera de la trésorerie, et simplifiera radicalement la vie des entrepreneurs.

Erwan Le Noan : Réduire la dépense publique de manière drastique, avec des privatisations et plus de concurrence : La première mesure à prendre, c’est évidemment de réduire la dépense publique. Elles sont tellement mal gérées aujourd’hui et atteignent un tel niveau d’inefficacité qu’il faut arrêter de se poser de longues questions et couper les cheveux en quatre avec des « RGPP » et autres « MAPP ». Il faudrait décider de baisser arbitrairement les dépenses publiques de manière uniforme, pour tous les niveaux (Etat, collectivités). Il faudrait imposer ces mesures d’économies aux dépenses sociales qui représentent près de 43 % de la dépense publique. Pour être plus efficace, la concurrence devrait être accrue pour certaines activités (l’éducation ou la culture par exemple), le recrutement des fonctionnaires devrait baisser (ils représentent un tiers du budget de l’Etat et 13 % du PIB) et il faudrait envisager des privatisations (à quoi sert France 2 ?).

Pascal Salin : La suppression du monopole de la Sécurité Sociale. Les Français devraient avoir le droit de décider du type d'assurance qu'ils préfèrent pour leurs dépenses de santé. Comme dans tout autre domaine, la concurrence apporterait des innovations et réduirait les coûts. Cette réforme contribuerait par ailleurs à diminuer la part des prélèvements obligatoires dans les dépenses des Français.

Troisième mesure

Erwan Le Noan : Ramener les impôts dans la moyenne européenne et envisager : la fiscalité française est très élevée : notre pays taxe plus le capital et le travail que la moyenne européenne. Il n’y a qu’en matière de consommation que nous faisons comme les autres. Dans un premier temps, il faut au moins les ramener tous au niveau de la moyenne de nos partenaires de l’Union européenne. Ensuite, il faut baisser particulièrement certains impôts, comme l’impôt sur les sociétés qui a considérablement baissé dans les économies voisines.

La France pourrait engager une réflexion sur la structure de sa fiscalité, certainement mal construite. Et sur le sujet, il faut une confrontation de grandes idées, de principes, pas des calculs d’apothicaires. Par exemple, on pourrait revenir (au moins en partie) sur la progressivité, qui est une excuse pseudo-morale à la spoliation. On pourrait taxer les revenus, pour organiser une contribution liée à ce que les gens gagnent, et laisser ensuite les gens libres de faire ce qu’ils veulent de l’argent qu’ils ont gagné : ne plus taxer la transmission, ni l’épargne.

Eric Verhaeghe : Licencier les hauts fonctionnaires qui n’atteignent pas leurs objectifs financiers. On sait tous comment ça se passe aujourd’hui : un haut fonctionnaire qui réussit est un haut fonctionnaire qui cire les pompes du ministre et répète à l’envie ce que son ministre souhaite entendre. Dans cette économie du cirage de pompe, il n’y a nulle place pour l’intérêt général ni pour l’équilibre des finances publiques. Résultat : les dépenses de fonctionnement de l’Etat sont un puits sans fond que personne ne parvient à colmater.

Solution ? Assigner des objectifs financiers aux hauts fonctionnaires et les licencier s’ils échouent. Je ne parle pas ici de les affecter à une quelconque inspection générale où ils vont travailler à tiers temps pour 5.000 ou 6.000 euros nets comme c’est le cas aujourd’hui. Ni de les affecter à un poste de chargé de mission au comptage des gommes et des crayons payés 7.000 ou 8.000 euros nets. Non, je parle de les priver de la protection du statut de la fonction publique et de les mettre devant un guichet de Pôle Emploi. En un an, le problème des finances publiques sera réglé en France. Et les impôts pourront baisser.

Pascal Salin : L'adoption d'un système de retraites par capitalisation. Dans le système actuel de répartition ce sont les autorités publiques qui décident à la place des individus de la durée de la vie active, de l'âge de la retraite, du montant du financement et du montant des pensions. Il faut redonner aux Français cette liberté fondamentale qui consiste à faire eux-mêmes leurs choix de vie. En outre, la capitalisation est un instrument puissant de responsabilisation des gens (puisque le sort d'un individu à la retraite dépend de ce qu'il a accumulé au cours de sa vie de travail et pas de ce que les autres doivent lui donner) et elle restaure cette incitation à épargner qui nous paraît si importante pour garantir une croissance rapide, comme l'a d'ailleurs montré l'exemple des pays qui ont adopté la capitalisation

Quatrième mesure

Eric Verhaeghe : Imposer les plus-values de façon dégressive selon la durée de détention des actifs. Les chefs d’entreprise de ce pays le savent bien : le capital est trop cher. Quand une entreprise a besoin d’argent pour se développer, elle doit rembourser les sommes qu’elle a reçues à des taux usuraires qui la dissuadent de se lancer dans l’opération.

Pourquoi ces taux trop élevés ? Parce que l’accès à la finance est trop intermédié. Il faut rémunérer l’actionnaire de base (souvent le retraité américain ou le financier anglais qui place son argent dans un fond et en attend un rendement de 6 ou 7% annuels), puis le fond lui-même, qui perçoit une commission équivalente au rendement demandé par l’actionnaire. Résultat ? La rentabilité exigée d’un investissement est souvent supérieure à 15% alors que l’économie est en récession. La cherté du capital n’est pas soutenable à terme, et est destructrice de valeur.

Solution ? Calmer le jeu, en imposant les placements spéculatifs qui épuisent les entreprises (ne lésinons pas ! Allons jusqu’à 80% d’impôt pour les placements inférieurs à un mois ! Et diminuons ce taux pour le ramener à 10% au-delà de 5 ans de détention!) et en renouant avec la confiance sur le long terme. Enfin, nos entreprises oseront recréer de la croissance...

Pascal Salin : Une vigoureuse politique de déréglementation (ce qu'on appelle à tort en France une politique de dérégulation, alors qu'il n'y a pas de meilleure régulation que celle qui est faite par des marchés libres, c'est-à-dire déréglementés). Il y a là un chantier énorme, mais il conviendrait de faire rapidement le catalogue aussi exhaustif que possible de ces innombrables réglementations qui paralysent toutes les professions, qui freinent l'initiative et empêchent la concurrence.

L'une des plus grandes urgences dans ce domaine concerne le marché du travail. C'est ainsi que le salaire minimum constitue une barrière à l'entrée sur le marché de l'emploi, en particulier pour les plus jeunes, que les règles visant à rendre les licenciements difficiles et coûteux freinent en fait les embauches, de telle sorte qu'il faudrait avoir le courage de libérer le marché de l'emploi. C'est une des conditions majeures du retour au plein-emploi.

Erwan Le Noan : Rétablir le bouclier fiscal : le rétablissement d’un bouclier fiscal à 50 % des revenus du contribuable aurait un double avantage. Politique et philosophique : quel que soit le niveau de richesse, il n’est pas normal que l’Etat et les collectivités locales puissent priver un individu de plus de la moitié de son bien. Gagner de l’argent n’est pas un crime et l’impôt ne devrait pas avoir de vocation punitive. L’autre avantage du bouclier fiscal, c’est qu’en limitant les revenus des collectivités, il pourrait les contraindre à faire attention à la dépense (c’est la stratégie « starve the beast » d’un célèbre président américain).

Cinquième mesure

Eric Verhaeghe : Changeons de régime et purgeons le radiateur politique français. La Vème République est un régime moribond, définitivement achevé par une décentralisation foisonnante qui l’a transformée en système féodal d’avant 1789. Interdisons le cumul d’un mandat local et d’un mandat national pour éviter les conflits d’intérêt que nous connaissons maintenant. Supprimons le Sénat. Révisons les principes dépassés de la démocratie représentative. Et recourons à une constitution claire, fondée sur quelques principes simples : excédent primaire obligatoire du budget de l’Etat, plafonnement de la sécurité sociale à 30% du PIB.

Bien entendu, dans cet édifice, il faut prévoir un moratoire : aucun élu ayant voté une seule fois un budget en déficit dans sa carrière politique n’aura plus le droit de présenter sa candidature à une élection. Ce renouvellement en profondeur de la vie politique donnera, enfin, du sang neuf à un pays qui en a tant besoin !

Erwan Le Noan : Etablir un impôt volontaire : c’est le corollaire de la proposition précédente, qui valorise la liberté. Il faut entendre et comprendre l’attachement de certains Français qui estiment que l’impôt est le meilleur outil de générosité que l’humanité n’ait jamais pensé. Pour eux, payer le fisc est un accomplissement : en faisant leur chèque, ils ne sont pas que des contribuables, ils deviennent de grands et bons citoyens. Pour que ces grandes âmes, généralement suffisamment riches pour se détacher des préoccupations matérielles, puissent continuer à soulager leur conscience fiscale, il faut instaurer un impôt volontaire ouvert à tous. Chaque Français pourra désormais donner plus que ce qu’il doit. On pourra même leur remettre une médaille (cela s’est déjà fait au début du 20ème siècle). Il faut parier que les grands donneurs de leçons d’aujourd’hui seront les principaux contributeurs demain…

Pascal Salin : Enfin, il est bien clair qu'une vigoureuse politique de diminution des dépenses publiques est indispensable. Celle-ci serait d'ailleurs facilitée par l'adoption de certaines des mesures indiquées ci-dessus. Mais il conviendrait évidemment d'aller plus loin, ce qui implique de supprimer un nombre considérable de subventions, mais aussi, bien sûr, un grand nombre d'emplois publics (ce qui serait d'ailleurs rendu nécessaire par la diminution des tâches de contrôle impliquée par la simplification du système fiscal et par la dérèglementation). Le statut de la fonction publique ne facilite certes pas les choses dans ce domaine. Mais ne peut-on pas inventer des formules nouvelles consistant, par exemple, à faciliter le passage de la fonction publique au marché du travail ?

Il est important que toutes les réformes indiquées ci-dessus soient menées simultanément et rapidement. En effet, l'adoption d'une démarche graduelle serait dangereuse, d'une part parce qu'on ne verrait pas immédiatement les bons résultats du changement de cap, mais aussi parce qu'on laisserait ainsi du temps à tous les intérêts catégoriels organisés pour freiner le mouvement et pour essayer d'obtenir des privilèges particuliers. Peut-être aussi chaque réforme serait-elle mieux acceptée si ceux dont les habitudes ou les intérêts étaient ainsi momentanément bousculés se rendaient compte que la réforme constituait un mouvement généralisé et inéluctable.

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