Quand les femmes se mettent à embrasser largement l’infidélité : les évolutions du sens donné à l’adultère<!-- --> | Atlantico.fr
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Même s'il reste toujours un écart, il s'atténue et les femmes trompent de plus en plus, comme les hommes
Même s'il reste toujours un écart, il s'atténue et les femmes trompent de plus en plus, comme les hommes
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Série séxualité féminine

Suite de notre série sur la "Sexualité féminine". Avec la libération sexuelle, l’infidélité féminine est de plus en plus courante. Mais malgré cette banalisation, elle reste une peur et un tabou pour la gente masculine.

Michelle  Boiron

Michelle Boiron

Michelle Boiron est psychologue clinicienne, thérapeute de couples , sexologue diplomée du DU Sexologie de l’hôpital Necker à Paris, et membre de l’AIUS (Association interuniversitaire de sexologie). Elle est l'auteur de différents articles notamment sur le vaginisme, le rapport entre gourmandise et  sexualité, le XXIème sexe, l’addiction sexuelle, la fragilité masculine, etc. Michelle Boiron est aussi rédactrice invitée du magazine Sexualités Humaines

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Atlantico : Les sites de rencontres adultères se multiplient : EdenFlirt, Gleeden, et autres. Contrairement aux idées reçues, les femmes sont tout aussi nombreuses que les hommes à consulter ce genre de site. Quelle relation les femmes ont-elles à l'adultère ? Comment cette relation a-t-elle évolué ?

Michelle Boiron : Les femmes ont toujours une relation très compliquée avec l’adultère, car la fidélité est encore perçue comme un idéal. Pour la femme, l’infidélité reste un acte grave. Avec la libération sexuelle et notamment grâce à la contraception, les femmes ont gagné le droit d’être infidèles. Cependant, elles restent dans l’affect, les sentiments et l’émotion, et le passage à l’acte demeure un acte important. Les raisons les plus fréquentes de l’infidélité féminine sont  la vengeance, l’ennui, la peur de vieillir et le besoin du regard de l’autre.

L’adultère féminin a été de tout temps réprimé et puni, même si aujourd’hui cela est légal, le regard porté sur l’infidélité féminine reste ancré. Cependant, il y a une différence entre les fantasmes, les pensées et le passage à l’acte ; aujourd’hui elles osent passer à l’acte. La question est de savoir où est la ligne de l’infidélité actuellement.

L'assument-elle plus facilement qu'auparavant ? Avec quelles conséquences ?

Quand elles décident de tromper ce n’est pas sur coup de tête. La femme qui va voir ailleurs a souvent atteint un seuil de pénibilité et d’absence de regard de la part de l’homme.Elle est prête si elle a décidé d’ouvrir son intimité, à elle d’en assumer les différentes conséquences. La différence d’anatomie entre le sexe de la femme, intérieur, et le sexe de l’homme extérieur n’est pas anodine. Quand la femme accepte d’être pénétrée ce n’est pas banal, contrairement à l’homme dont la sexualité est toujours d’une certaine façon extérieure.

Les femmes l’assument d’autant plus qu’elles sont indépendantes financièrement. Les conséquences principales sont la fragilisation de l’homme, car l’infidélité féminine est toujours très traumatisante pour l’homme. Car cela donne à la femme des points de comparaison qui vient raviver chez l’homme la crainte d’une comparaison en terme de performance et de plaisir procuré.

Quand la femme est comblée sexuellement elle va rarement voir ailleurs, alors que l’homme conserve cette idée que la femme qu’il n’a pas possédée est celle qui le comblera.

Est-il pertinent de croire que les hommes trompent plus que les femmes que l'inverse ?

Aujourd’hui les femmes peuvent tromper comme les hommes. Néanmoins, il reste toujours un écart, même s’il s’atténue de plus en plus. L’égalité trouvée dans tous les domaines atteint la sexualité et l’infidélité. Cependant, les hommes et les femmes n’ont pas le même système hormonal. Ce qui tend à prouver que l’homme réagit plus avec ses pulsions que la gent féminine.

Dans nos sociétés modernes le concept de santé sexuelle est grand, on est obligé de créer du désir, de la jouissance par n’importe quel moyen. Si l’adultère est autorisé, cela rend l’infidélité moins excitante.

Ashley Madisson, un site de rencontres extra-conjugales aux USA, a vu son nombre d'adeptes féminines augmenter grâce à son application mobile. Est-ce le signe que malgré tout l'adultère féminin reste un tabou ?

Même si on parle de confidentialité, maintenant les grands jaloux n’hésitent plus à fouiller dans les portables et autres boites mails ! L’adultère féminin est un tabou, car elle fait peur aux hommes. S’ils perdent le contrôle de la sexualité de la femme, de la jouissance des femmes, ils se sentent fragilisés. La peur est ancestrale, car elle ramène à celle de ne pas être le père de l’enfant. Une femme qui trompe et qui trouve sa jouissance ailleurs va tout quitter, alors qu’un homme conjugue aisément plusieurs maitresses. On observe également que la curiosité des femmes augmente : vis-à-vis des sites de rencontres mais aussi de la pornographie.

Quelle perception la société a-t-elle des femmes qui ont des amants ? Observe-t-on un changement de comportement vis à vis de cela, si oui depuis quand ? 

Ce sont des femmes qui sont libres, qui s’assument financièrement, qui réclament leur plaisir et leur jouissance. L'adultère n’est plus considéré comme un délit depuis 1975, elles usent de leur droit. La femme maitrise sa sexualité, mais ce qui reste insupportable pour les hommes c’est qu’elle puisse avoir une sexualité sans amour et être son égal dans une sexualité pure et dure.

Dans la société patriarcale, la femme était pécheresse et l’homme victime. Si l’homme trompait sa femme c’était forcément par la faute de la femme. On avait toujours l’idée que  la femme tentait l’homme. Aujourd’hui, la société , si elle ne porte pas encore le même regard, parfois bienveillant, sur la femme qui a des amants que celui qu’elle porte sur l’homme, admet que la femme, libérée des tabous anciens, revendique le droit, à l’égal de l’homme, à disposer librement de sa sexualité, de son "droit au plaisir". Ce mouvement qui s’inscrit dans la suite du mouvement féministe, s’est manifestement accéléré ces dernières années. 

Propos recueillis par Manon Hombourger

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