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Faut-il croire au mouvement de relocalisation dont se félicite Montebourg ?
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Communication politique

Arnaud Montebourg se félicite des relocalisations de grandes marques françaises. Cependant, ces cas de relocalisations sont anecdotiques et ne représentent pas un levier de création d'emplois important pour l'instant.

Olivier Bouba-Olga

Olivier Bouba-Olga

Olivier Bouba-Olga est professeur des Universités en Aménagement de l'Espace et Urbanisme à la Faculté de Sciences économiques de Poitiers et chargé d'enseignement à Sciences-Po Paris (premier cycle ibéro-américain). 

Il a notamment développé la thématique du « Made in Monde » qu’il oppose régulièrement à celle du Made in France.  

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Atlantico : Le ministre du redressement productif, Arnaud Montebourg, a déclaré sur Europe 1, que de "grandes marques familières des Français : Atol, Smoby, L'Oréal, Mecano, Kindy, Eminence " relocalisent en France. Ces relocalisations sont-elles significatives ou s'agit-il d'un épiphénomène qui ne concerne qu'une minorité d'entreprises et que certaines filières de ces dernières ? 

Olivier Bouba-Olga : Le peu de statistiques dont on dispose montre que la relocalisation au sens stricte c’est-à-dire une entreprise française qui a investi à l’étranger et qui revient en France ne pèse quasiment rien. Sur les années 2009 -2012, en nombre d’opération d’investissement en France, les relocalisations représentaient 0,3% des opérations, et 0,1% en termes d’emplois. En France chaque année il y a 10 ou 20 processus de relocalisation, donc même si ces dernières créer 10 ou 30 emplois cela reste marginal.

Quelle est la nature des relocalisations des entreprises : est-ce que cela créer vraiment des emplois en France ?

Les relocalisations sont tellement faibles, que sur l’ensemble des emplois qui sont créées en France elles n’ont aucun poids. Si on pense que pour accélérer la création d’emplois en France, l’axe stratégique essentiel est la relocalisation d’entreprises c’est une erreur, économiquement ce n’est pas juste.

Les quelques entreprises qui relocalisent créer un peu d’emplois, mais c’est une goutte d’eau dans l’océan. Pour celles qui reviennent dans l'Hexagone, il ne s’agit pas de refaire la même chose que ce qu’elle faisait avant en France. Il faut raisonner au cas par cas, mais en général elles souhaitent être plus près de la demande, monter en gamme ou gagner en qualité. Elles peuvent également faire le choix du retour et automatiser un peu plus le processus productif, travailler sur la polyvalence des salariés…

Le ministre a justifié ces retours dans l'Hexagone en expliquant " qu’en recalculant leurs coûts de production, les salaires en Chine augmentent de 20%, les prix de l'énergie et du transport explosent, ils s'aperçoivent que la France est attractive." Cette justification est-elle juste ? La France est-elle vraiment plus intéressante ?

Le jugement ne peut pas être général pour toutes les activités économiques. Le choix des localisations ne se limite pas au coût du travail, lorsqu’une entreprise délocalise elle regarde un ensemble d’éléments : délais de transport, coût de transport... et leur évolution.

L’attractivité d’un pays plutôt qu’un autre va dépendre du secteur d’activité. Pour les secteurs d’activité qui sont très intensifs en mains d’œuvre, la Chine peut avoir un avantage. Dans des secteurs où les délais de livraison sont stratégiques, une implantation européenne ou française sera plus intéressante.

Quelles sont les entreprises qui ne reviendront pas en France ? Et pour quelles raisons ?

Toutes les entreprises qui sont implantées à l’étranger pour être plus près de la demande n’ont pas d’intérêt à revenir dans l’Hexagone. Dans les entreprises française implantées en Chine, certaines fournissent la clientèle chinoise ou indienne. Après il faut raisonner au cas par cas selon les secteurs d’activité.

Les relocalisations en France sont-elles la clé pour faire repartir l'économie française ? Pourront-elles suffire ? Si oui, comment en inciter davantage à le faire ?

Penser que l’avenir de l’industrie française est  dans la relocalisation est une erreur. En termes de communication politique cela peut être intéressant, mais en termes de rationalité économique le problème est ailleurs.

La population française a peur de la délocalisation, ce qui explique en partie le discours politique.

L’enjeu se porte sur les entreprises qui sont en France.Il y a une double problématique à savoir : comment faire évoluer leur capacité d’innovation (technologiques, organisation, marketing…) et qualifier/former les personnes pour qu’ils retrouvent de l’emploi rapidement. Les vrais chantiers sont là.

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