Pourquoi Martine Aubry a raison de citer Kool Shen<!-- --> | Atlantico.fr
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Pour comprendre Kool Shen, encore faut-il connaitre son œuvre
Pour comprendre Kool Shen, encore faut-il connaitre son œuvre
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Cher Philippe David...

Philippe David déplorait dans son dernier article pour Atlantico la baisse de niveau du discours politique, suite à l'évocation du rappeur Kool Shen par Martine Aubry. L'écrivain Tristane Banon n'est pas d'accord, selon elle, Kool Shen en dit plus sur notre époque que Jaurès, Blum ou Maurras.

Tristane Banon

Tristane Banon

Tristane Banon est écrivain et journaliste.

Elle écrit pour Atlantico essentiellement sur les jeunes dans le cadre de la rubrique "Jeunesse se passe".

Photo © Fanny Falourd

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Cher Monsieur David, j’ai bien lu votre article Ni Jaurès, ni Blum…Kool Shen publié sur Atlantico la semaine dernière. J’ai bien compris aussi, avec mes quelques neurones nivelés vers le bas par des politiques qui ne citent plus ni Blum ni Jaurès, que vous regrettiez le temps béni des discours et des joutes où l’on citait « Barrès dans les meetings face à un auditoire qui ne comprenait généralement pas tout ».

Pour comprendre Kool Shen, encore faut-il connaitre son œuvre

J’ai bien compris cette nostalgie qui vous est chère car, vous, vous compreniez alors ce que d’autres ne décryptaient pas quand, aujourd’hui, face à Kool Shen vous vous sentez ignorant. Car je ne peux croire que le fond de votre insurrection ne soit pas là et seulement là, votre intelligence me paraît trop grande pour qu’il en soit autrement : vous ne connaissez pas Kool Shen, sinon de nom, pire, vous ne comprenez pas un traître mot de ce qu’il raconte !

Sans cela, je ne peux croire que vous n’admettiez pas que les temps aient changé et que s’il est  risible de faire référence à la « positive attitude » de Lorie (Raffarin il y a quelques années), il ne l’est pas tant que cela de citer Kool Shen à la manière de Martine Aubry. On peut ne pas aimer l’artiste, c’est autre chose, mais gageons qu’il est la voix d’une certaine France qui n’a pas à être dénigrée.

Dans son morceau la « La France Hallucine », Kool Shen dit " Donc l’atmosphère est glauque, le système bloqué ; le peuple au bord de suffoquer ; rempli de rage de n’avoir pu croquer ; ouais ; J'ai des histoires à te raconter ; des femmes humiliées ; des hommes sur le bas-côté et nous … Ils nous disent qu’on n’est pas opé, ou pire, qu'on est coupables de leurs échecs même ;  Mais qui sont les chefs? Merde ! Mais qui a les clés? Toi ou moi? Dis-moi qui fait les décrets? Toi ou moi, hein? Dis-moi qui crée les défaites? Qui brise les rêves très tôt? Qui coule nos ambitions dans le béton? Qui ressert l'étau? ”.

Kool Shen : porte-voix de la France de 2011

Cher Monsieur David, je ne vous ferais pas l’affront de vous traduire ces paroles, il me semble qu’elles parlent d’elles-mêmes. Néanmoins, si vous le souhaitez, je tiens à votre disposition un petit lexique que l’on appellera, pour l’occasion, « le Petit Nivelé vers le bas illustré ». S’agissant des images, le Journal de 20h fera l’affaire !

En son temps, Blum disait “Toute société qui prétend assurer aux hommes la liberté, doit commencer par leur garantir l'existence”, Jaurès que “La République c'est le droit de tout homme, quelle que soit sa croyance religieuse, à avoir sa part de la souveraineté” et Barrès que “En politique il faut toujours se composer, au mieux des circonstances, l'attitude d'un homme qui n'envisage rien que l'avantage général”…

Alors bien sûr, Blum, Jaurès et Barrès nous servent de beaux idéaux, auxquels j’adhère et dont j’aimerais qu’ils collent à notre temps… Mais entre eux et Kool Shen, qui parle la France de 2011 ? Voyez l’actualité et relisez Blum, vous verrez que les paroles de Kool Shen ne sont pas qu’inepties, et celles de Barrès quelques peu…révolues ! C’est moche mais c’est ainsi, les choses changent. Monsieur David vous avez raison, dans un monde parfait Blum et Jaurès dépeindraient notre quotidien, mais je préfère des responsables politiques citant la France d’aujourd’hui, un rappeur en porte-drapeau, qu’un élu nostalgique d’une France qui n’existe plus. Et comme conclurait Kool Shen: “C'est vrai qu'c'est mal barré ; Qu'à l'avenir on risque de pas se marrer”… À bon entendeur.

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