Fillon "candidat quoi qu'il arrive" en 2017 : dans sa guerre contre Sarkozy et Copé, il choisit une stratégie d’occupation de terrain<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
France
François Fillon a déclaré "être candidat quoi qu’il arrive" à l’élection présidentielle de 2017.
François Fillon a déclaré "être candidat quoi qu’il arrive" à l’élection présidentielle de 2017.
©Reuters

Déterminé

Candidat en 2017 "quoi qu'il arrive": par ces mots, prononcés jeudi à Tokyo, François Fillon a marqué sa "détermination" à être candidat à l'élection présidentielle, semblant ainsi écarter un retour de Nicolas Sarkozy.

Carole  Barjon

Carole Barjon

Carole Barjon est rédactrice en chef adjointe à la rubrique politique, chargée de l’Elysée et de la droite au Nouvel Observateur.

Voir la bio »

Atlantico : Comment interpréter la décision de François Fillon qui déclare "être candidat quoi qu’il arrive" à l’élection présidentielle de 2017 alors même qu’il semblait s’être mis d’accord récemment avec Jean-François Copé sur l’organisation de primaires ?

Carole Barjon : Ce n'est pas une nouveauté. En effet, je rappelle qu’il l’avait déjà dit dans notre livre Le coup monté avec Bruno Jeudy. Il disait même d’ailleurs que, le cas échéant, il pourrait être candidat en dehors de l’UMP.Mais de toute manière rien ne semble totalement acté. Le conseil national de l’UMP n’a toujours pas officialisé une éventuelle primaire pour l’élection présidentielle. C’est vrai que, a priori, cela apparaît contre l’idée de se présenter dans le cadre d’une primaire. Mais c’est peut-être pour lui une manière de se prémunir si jamais les primaires de 2016 ne devaient pas avoir lieu. C’est donc effectivement une manière de dire qu’il sera présent "quoi qu’il arrive". Mais cela peut aussi être interpréter comme sa manière de faire pression pour que ces primaires se déroulent bel et bien. De faire en sorte que l’esquisse de l’accord qui semble se dessiner entre lui et Jean-François Copé se concrétise. Ce serait une manière de faire pression sur Copé en lui montrant qu’il ne lâchera rien.

Mais pourquoi avoir fait cette annonce à ce moment-là et pourquoi depuis l’étranger ? Est-ce que François Fillon a joué avec le timing de la diffusion hier du documentaire de Franz-Olivier Giesbert dans lequel il écorne quelque peu l’image de Nicolas Sarkozy ?

A la limite peu importe les circonstances exactes, le lieu, etc. Je pense qu’il a simplement et sincèrement répondu à une question qui lui était posée. L'important c'est que cela correspond au fond de sa pensée. Après qu’il se déclare comme cela au Japon, effectivement cela peut sembler un peu particulier. Mais je le répète : je pense qu’avant toute chose il a répondu à une question, dans le cadre d’une conversation, qu’elle soit informelle ou non. Mais là encore j’insiste, ce n’est pas nouveau. Il avait déjà exprimé une telle envie dans notre livre. Quant au timing avec le documentaire de FOG, très honnêtement je ne suis pas sûre que cela joue dans sa prise de parole. En effet, par définition quand vous êtes au Japon, vous n’êtes pas "branché" au jour près sur les programmes télévisés. Même s’ils sont décidés plusieurs semaines à l’avance.

Mais globalement ce qui me semble important c’est que nous sommes actuellement dans une période, un peu longue, qui s’étire sur plusieurs semaines voire plusieurs mois, de post-crise avec Copé. On sait parfaitement que depuis le 17 décembre dernier, lorsqu’ils ont signé cet accord de sortie de crise avec les engagements pour une direction provisoire et les nouveaux statuts et surtout l’écriture d’un article sur l’organisation de primaires en 2016, que tous les deux cherchent à apaiser le mouvement tout en essayant d’exister, chacun de leur côté, médiatiquement. Et cette déclaration doit s’insérer dans cette période post-crise. Ce qu’il a dit correspond à son état d’esprit sur cette période qui s’étire depuis six mois. Et dans toute cette période, on est effectivement dans un François Fillon qui ne cache pas qu’il veut être candidat en 2017 et qu’il en prendra les moyens. Le fond du message est là.

A la lumière des récents sondages qui donnent Nicolas Sarkozy en tête au premier tour de l’élection présidentielle de 2017 et favori chez les sympathisants UMP, quelle peut-être la stratégie de François Fillon ?

Ce qui est tout à fait clair, et que nous évoquions déjà dans notre livre avec Bruno Jeudy, c’est que la rupture avec Sarkozy a commencé. Par exemple il a déjà expliqué par le passé que Sarkozy ne reviendrait pas. Il est convaincu pour plusieurs raisons que Sarkozy ne peut pas revenir.Il dit dans un premier temps que cela ne s’est jamais fait. Ensuite, il affirme à l’encontre de Sarkozy : "on ne peut pas être et avoir été". Il n’envisage ainsi pas une seule seconde son retour. Il pense qu’il ne pourra pas revenir. Pas seulement d’ailleurs à cause des affaires, comme sa formule le montre. Il ne tient en aucun cas compte d’un empêchement à cause d’une éventuelle affaire. Pas du tout. Il est certain que lorsqu’"on a été", on ne peut pas être une deuxième fois parce que les Français tournent la page.

De toute manière si Fillon a réellement l’intention de se présenter en 2017, il se doit d’occuper la place dès à présent. En effet, il existe chez la majorité des militants et des sympathisants UMP, et les sondages le montrent, une nostalgie de Sarkozy. Par rapport à cela, il est très important que Fillon se positionne pour ne pas laisser s’accroître et s’amplifier cette nostalgie. Il faut qu’il montre qu’il est présent et qu’il peut apporter plus s’il est en mesure de le faire.

Et face à Copé ? Sa sortie assez offensive du jour est-elle symbolique du rapport de force qu’il veut imposer ?

Sa stratégie ne va pas nécessairement être d’attaque. C’est une stratégie d’occupation du terrain. En effet, récemment Jean-François Copé a expliqué penser à la primaire de 2017 ou de 2022. Cela veut donc dire que celui-ci, pour des raisons qui lui sont propres, a fait l’analyse qu’il n’était peut-être pas suffisamment prêt pour 2017. En tout cas le fait qu’il évoque 2022 n’a pas échappé à François Fillon qui insiste donc sur sa propre candidature. Pour cela rien de mieux que l’occupation du terrain. C’est parfaitement logique lorsqu’on veut être candidat. Il faut le dire suffisamment à l’avance pour que vos concurrents éventuels soient plus prudents voire empêchés du fait de votre présence médiatique. Ainsi, quelqu’un qui s’annoncerait derrière serait considéré comme le "diviseur". C’est souvent intéressant d’être le premier à occuper la place. Fillon ne fait qu’appliquer une stratégie naturelle et assez classique en politique.

De plus, quand on est candidat à l’élection suprême ce n’est pas seulement pour passer un message au milieu politique et aux éventuels concurrents. Il faut avant tout faire passer un message aux Français. De ce point de vue-là, lors de ce week-end de l’Ascension, avec cette semaine très particulière d’un double pont, qui fait que les Français sont en vacances pendant cinq jours et qui est donc une période creuse en actualités, le message passé par Fillon a plus de facilité à être relayé. On est en effet certain que sa parole va être très entendue et très reprise dans les médias. Et donc de toucher de ce fait encore plus les Français. Cela fait le buzz.

Je ne pense pas de toute manière que cette déclaration soit de nature à embellir ou abîmer son image. Je pense que ce sont plus des prises de position sur certains sujets préoccupants qui ont impact sur comment les Français vont le percevoir.

Propos recueillis par Maxime Ricard

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !