Et la crise n’est pas perdue pour tout le monde... Nouveaux groupes et recrutement en hausse, les sectes en pleine croissance<!-- --> | Atlantico.fr
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La mission interministérielle de lutte contre les sectes alerte sur la montée de pseudo organismes de formation professionnelle.
La mission interministérielle de lutte contre les sectes alerte sur la montée de pseudo organismes de formation professionnelle.
©Reuters

Don't be evil

Profitant de la crise et de son lot de chômeurs, les organes à tendances sectaires recrutent, notamment sous couvert de formations professionnelles.

Georges Fenech

Georges Fenech

Georges Fenech, ancien juge d'instruction, a présidé la commission d'enquête parlementaire consacrée aux attentats du 13 novembre 2015 et la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES). Son dernier livre est intitulé "L'ensauvagement de la France : la responsabilité des juges et des politiques" (2023) aux éditions du Rocher.

Il a déjà publié de nombreux ouvrages, parmi lesquels Gare aux gourous (2020), mais aussi "Face aux sectes : Politique, Justice, Etat" (1999) et "Criminels récidivistes : Peut-on les laisser sortir ?" (2007).

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Atlantico : Dans son rapport annuel, la mission interministérielle de lutte contre les sectes alerte sur la montée de pseudo organismes de formation professionnelle sous l’emprise de mouvements sectaires. Ces organismes profitent-ils de la crise pour prospérer ?

Georges Fenech : Le développement de formations professionnelles infiltrées par des mouvements sectaires n’est pas lié à la crise économique. C’est  un phénomène que l’on observe depuis plusieurs années. Les recherches approfondies que nous avons mené à la Miviludes (Mission interministérielle de lutte contre les sectes) du temps où j’en étais le président (de 2008 à 2012) avait révélé que sur 60 000 organismes de formation professionnelle présent en France, au moins 1 500 organisations étaient en réalité des organes à dérives sectaires, ce qui représente un volume considérable.

Ce constat nous avait amené à signer un partenariat avec Pôle Emploi pour lutter contre la prolifération de ce phénomène. Nous avons formé le personnel de Pôle emploi ainsi que les inspecteurs du travail à être vigilants et les avons sensibilisés au problème sectaire. On peut penser, compte tenu du nombre de chômeurs qui s’accroît  et des plans de reconversion qui nécessitent des formations, qu’il y a de fait plus de probabilité de rencontrer un organisme sectaire.

Quelles sont les cibles de ces mouvements ? Ont-ils adapté leurs méthodes ?

Les organes sectaires se développent sous couvert de formations professionnelles proposant des séances de coaching, des séminaires et des stages visant à accroître ses capacités. Il n’y a pas de profils visés en particulier. Par exemple, les entreprises qui envoient leur salariés pour améliorer leur performances professionnelles peuvent se retrouver confrontées à des organismes sectaires. Dans ce cas, les sectes ciblent d’avantage les profils de cadres ou de personnes qui jouissent d’un pouvoir d’achat élevé.

En effet, les profils de cadre sont régulièrement intéressés par des séminaires ayant des thématiques qui tournent autour du développement de soi et de l'amélioration de ses performances. C’est un marché très lucratif et incontournable pour les sectes ; sans oublier que c’est un moyen de recrutement privilégié pour acquérir de nouveaux adeptes.

Les méthodes utilisées se manifestent de différentes manières. Par exemple, à l’issue des stages de perfectionnement, les organisateurs proposent des offres alternatives qui comprennent des soins, des manuels concernant des modes de vies plus en rapport avec la nature, tout ce qui en apparence n’est pas dangereux mais qui peut le devenir, en particulier à travers l’emprise mentale et financière. Ces formations s’accompagnent également de ventes de toutes sortes de produits comme des DVD ou des brochures, qui constituent dans de nombreux cas le premier contact de l’individu avec la secte. Les sectes proposent également des formations avec l’obtention de diplômes qui n’ont en réalité aucune valeur officielle. Nous avons par exemple rencontré des organismes de formation en « biomagnétisme » à Paris, qui ont été aussitôt suspendus sous notre initiative par la mairie. Ces formations étaient en réalité de type crapuleuses et charlatanesques.

La lutte contre ces organismes s'est-elle complexifiée ?

C’est au moment de la déclaration de l’organisme à la chambre de Commerce, à la Mairie, ou à la région, que les services administratifs opèrent les contrôles approfondis, en particulier en ce qui concerne les formations professionnelles. Il faut vérifier le contenu de cette formation mais aussi le profil des intervenants sans oublier leur diplôme. Enfin, le ministère du Travail répertorie depuis 2009 sur son portail Internet l’ensemble des organismes qui ont obtenu de la préfecture l’autorisation d’exercer une activité. Ces activités sont donc désormais soumises à un contrôle strict de la part des pouvoirs publics.

La lutte contre ces organismes sectaires est un travail quotidien et difficile car les sectes sont des structures mobiles, mouvantes et qui renaissent  sous de nouvelles appellations. La vigilance doit-être permanente et très ciblées. Il appartient à toutes les structures administratives décentralisées d’effectuer des contrôles.

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