Affaire STEP : les banques françaises font-elles face à une dangereuse crise de liquidités ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Le"Short Term European Paper" est un marché européen de refinancement des banques.
Le"Short Term European Paper" est un marché européen de refinancement des banques.
©Reuters

Bulle

Et si les très bas taux auxquels la France emprunte ne seraient que le résultat d'une politique généreuse et discrète de rachat par la Banque de France d'actifs douteux des banques françaises ? Une situation qui risquerait de ne pas pouvoir durer très longtemps.

Philippe Herlin

Philippe Herlin

Philippe Herlin est chercheur en finance, chargé de cours au CNAM.

Il est l'auteur de L'or, un placement d'avenir (Eyrolles, 2012), de Repenser l'économie (Eyrolles, 2012) et de France, la faillite ? : Après la perte du AAA (Eyrolles 2012) et de La révolution du Bitcoin et des monnaies complémentaires : une solution pour échapper au système bancaire et à l'euro ? chez Atlantico Editions.

Il tient le site www.philippeherlin.com

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L'information circule aux États-Unis et commence à faire du bruit en Allemagne, mais pas encore en France. Appelons-la "l'affaire STEP", acronyme de "Short Term European Paper", un marché européen de refinancement des banques.

Faisons tout d'abord un rappel sur le fonctionnement de l'euro, et qui montre que cette monnaie est vraiment mal conçue. Le cas est unique, aberrant : l'euro est une monnaie qui dispose de plusieurs banques centrales ! Enfin, plus exactement d'un réseau de banques centrales supervisées par la Banque centrale européenne (BCE) sise à Francfort, et cet ensemble se dénomme l'Eurosystème. Les banques européennes en difficulté peuvent solliciter directement la BCE (on se rappelle les deux LTRO de 500 milliards d'euros chacun en décembre 2011 et février 2012), mais aussi en plus leur propre banque centrale. Ainsi chaque banque centrale nationale dispose d'une certaine autonomie pour aider ses banques. Les critères de refinancement pour les banques commerciales en difficulté peuvent varier d'un pays à l'autre (quels actifs accepter en échange de cash), et on se dit que la Banque nationale de Grèce ne s'avère sans doute pas aussi regardante que la très sévère "Buba", la banque centrale allemande...

Bref, là il s'agit de la France. Les STEP permettent à chaque banque centrale de refinancer ses banques, mais avec 483 milliards d’euros d’encours à fin décembre 2012, le marché français est le premier d’Europe et le deuxième au monde (derrière son équivalent américain) selon la Banque de France ! A lui tout seul il représente plus de la moitié du marché européen, et s'avère en forte augmentation (l'encours était de 300 milliards à la mi 2012).

Cela veut-il dire que les banques françaises sont en grande difficulté et récupèrent des liquidités auprès de la Banque de France en échange d'actifs de mauvaise qualité (créances douteuses, bons d'État en difficulté, etc.) dont personne ne voudrait par ailleurs ? Cette réalité inquiétante traduit clairement une situation tendue. Le Prix Nobel d'économie américain Paul Krugman écrit que "la France a retrouvé sa monnaie", et que cela explique le niveau très bas auquel elle emprunte ; en fait elle fait tourner la planche à billets dans son coin mais ne dispose pas formellement de sa propre monnaie.

La presse allemande s'inquiète comme Die Welt ou les Deutsche Wirtschafts Nachrichten (DWN - article en français ici), qui crient au loup et accusent Mario Draghi de laxisme coupable. Selon les DWN, "la BCE a donné à la France une possibilité de stabiliser ses propres banques, sans que l’Allemagne puisse entreprendre quoi que ce soit pour s’y opposer [...] il se développe en France, sous les radars, une gigantesque bulle financière"...

Il serait urgent que la Banque de France et le ministère de l'Économie communique sur cette "affaire STEP" car elle jette un voile trouble sur la situation des banques françaises.

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