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Epargnants, consommateurs : comment les politiques monétaires de la Fed et la BCE vont plomber votre pouvoir d'achat
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Coup de rabot !

Entre Mario Draghi qui a lancé un programme de rachat de dettes souveraines ou Ben Bernanke, le président de la Banque centrale américaine, qui annonce un nouveau plan de soutien à l'économie, jamais autant de liquidités n'auront été en circulation. Des mesures qui augmentent l'inflation et touchent de plein fouet les consommateurs.

Fabrice Drouin Ristori

Fabrice Drouin Ristori

Fabrice Drouin Ristori est un spécialiste des marchés de l'or et de l'argent qu'il analyse depuis 4 ans.

Il est le fondateur de Goldbroker.com et gère le fond d'investissement privé FDR Capital.

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Quelques jours seulement après l’annonce d’un nouveau plan d’assouplissement monétaire (QE3) par Ben Bernanke, président de la Banque centrale américaine (la Fed), et précédé de peu par celui annoncé par Mario Draghi de la Banque centrale européenne (BCE), les investisseurs et épargnants, se posent fort logiquement la question de savoir comment protéger leurs actifs dans ce contexte inflationniste ?

Ceux qui ont des actifs ont des décisions à prendre concernant l’allocation de leur portefeuille d’actifs, le reste des populations ne disposant pas d’actifs subissent sans comprendre réellement pourquoi elles s’appauvrissent.

La réponse à la question “comment se protéger” nécessite de dépasser les analyses financières traditionnelles et de s’intéresser à ce qui influence le comportement (à la hausse ou à la baisse) de tous les actifs financiers : le système monétaire international.

Comment fonctionne le système monétaire international ?


Depuis le 15 aout 1971, date à laquelle le président Nixon a supprimé toute convertibilité du dollar en or, le système monétaire est basé sur la confiance qu’on lui accorde, c’est un système de monnaie fiduciaire dans lequel les monnaies sont créées à partir de rien.

Les banques centrales créent ce qu’on appelle la monnaie de base (base money) et les banques commerciales créent à leur tour via les crédits accordés la totalité du reste des monnaies en circulation (via un coefficient multiplicateur situé “en théorie” aux alentours de 10).

La monnaie créée par les banques centrales est de l’ordre de 10% de la totalité des monnaies en circulation. Les banques commerciales “créent” les 90% restants et prêtent avec intérêts.

Il faut bien comprendre ce que ce système implique :

La totalité de l’argent en circulation est inférieure à la somme totale due aux banques (capital + intérêts), car les banques ne créent que le capital.

On peut donc comparer notre système monétaire à un immense jeu de chaises musicales qui oblige les banques à accorder sans cesse des crédits afin de permettre aux différents agents économiques de rembourser les intérêts.

Les agents économiques étant eux, tous en concurrence pour obtenir suffisamment de monnaie (une chaise) pour rembourser leurs crédits (capital+intérêts).

Autrement dit, un système basé sur l’exponentialité qui oblige à toujours plus de croissance dans un monde qui a lui des ressources limitées.

Quand la musique s’arrête (assèchement du crédit) les défauts de remboursement de crédits, les faillites d’entreprises puis de banques sont automatiques puisque mathématiquement il n’y a pas assez d’argent dans le système pour permettre le remboursement de la totalité des dettes dues. La création monétaire doit être permanente pour maintenir le système.

Peu de gens comprennent notre système monétaire actuel et sa nature inflationniste, il est vrai qu’il est difficile de s’imaginer que notre système monétaire repose depuis 1971 sur… la confiance. On peut également s’étonner de l’absence de tout enseignement relatif au fonctionnement de ce système même dans les universités et écoles spécialisées (économie, finance).

Toutes les expériences de monnaies fiduciaires se sont soldées par leur dévaluation progressive et leur disparition à une échelle moyenne de 50 ans.

Mais c’est la première fois dans l’Histoire, que toutes les monnaies en circulation sont basées sur ce système fiduciaire qui ne peut mathématiquement pas durer sans impression permanente et dans sur une planète aux ressources limitées.

Notre expérience monétaire actuelle date donc de 41 ans, depuis le 15 août 1971.

La convertibilité des monnaies en actif tangible (l’or) était la seule chose empêchant la dévaluation par les banques et gouvernements car l’or ne peut tout simplement pas être imprimé.

Il impose de fait une discipline qui n’a jamais plu aux gouvernements.

L’or empêche une fuite en avant permanente où toujours plus de dettes financent les obligations et engagements des Etats.

La situation économique actuelle


Le problème aujourd’hui c’est que nous sommes arrivés au pic de la dette. Les agents économiques privés sont arrivés à un niveau de saturation de dette maximum (les Etats n’en sont plus très loin) donc la création monétaire ne peut plus être assurée par le secteur privé puisqu’il n’a plus la capacité de s’endetter.

La création monétaire diminue, puisque la monnaie est créée via les credits accordés, entraînant la raréfaction de la monnaie, donc mécaniquement les défauts de remboursement de crédits, les faillites d’entreprises ne pouvant plus rembourser leurs dettes, et donc la faillite des banques qui dépendent de la capacité des agents économiques à payer les intérêts pour gagner de l’argent.

La seule façon de réinjecter des liquidités est le recours à l’impression monétaire par les banques centrales via la monnaie de base.

Cette impression monétaire est en réalité un endettement mais au niveau étatique cette fois-ci, dont les intérêts seront remboursés par l’augmentation des taxes.

Les options de sortie de crise

Aujourd’hui il existe deux options : continuer dans une logique de création monétaire ou appliquer une politique d’austérité conduisant à un effondrement de type crise déflationniste des années 30.

Dans les deux cas les solutions sont douloureuses et conduiront à une forme d’effondrement : hyperinflation (impression monétaire) ou effondrement déflationniste de type années 30.

Le choix entre l’une de ces deux options est déterminé par la classe politique. Or qui vote ?

Le choix entre politique inflationniste ou mesure d’austérité est… politique


Ceux qui votent sont majoritairement les agents économiques privés qui ont besoin de l’accès au crédit pour rembourser les intérêts de leur dette. Ce sont les masses qui peuvent se révolter.

Ce sont aussi les grandes entreprises qui ont majoritairement recours au crédit pour se financer.

Cette double pression sur les politiques a toutes les chances de conduire au choix de l’inflation et de la “relance”, d’autant plus que la déflation augmente le poids de la dette, ce qui n’est pas du tout dans l’intérêt des gouvernements.

Ben Bernanke, le président de la Banque centrale américaine (la Fed), a été un étudiant de la crise des années 30. Elle a eu lieu selon lui, suite à une chute de la création monétaire et il a affirmé très clairement qu’il ne laisserait pas une crise déflationniste comme celle des années 1930 se reproduire.

La décision de Ben Bernanke, de lancer un nouveau plan de renflouement (QE3) est celui de l’inflation. Même décision monétaire du côté de la Banque centrale européenne, Mario Draghi, president de la BCE, ayant decidé, quelques jour savant, de recourrir à la monétisation des dettes gouvernementales.

Ce choix commun permettra d’éviter un effondrement déflationniste et trop de mouvements sociaux mais se traduira par une destruction du pouvoir d’achat des monnaies et des risques de crise hyper-inflationniste.

Alors qui sera victime de ce nouveau chapitre inflationniste de la crise et comment se protéger ?

Les investisseurs perdants

L’inflation se traduit par une destruction du pouvoir d’achat des monnaies. Les milliards fraîchement imprimés se répandant dans le système, la valeur de la monnaie est diluée, il faut donc plus de monnaie pour acheter une même quantité de biens ou d’actifs tangibles.

Tous les épargnants, quelle que soit leur taille, laissant leur argent dormir sur un compte bancaire sont en réalité exposés à une perte sournoise de pouvoir d’achat correspondant au niveau du taux d’inflation réel.

(Posséder 100 000 euros sur un compte bancaire pendant un an quand le taux d’inflation reel est de 8% revient à une perte de pouvoir d’achat de 8 000 euros / an.)

Placer son argent sur des produits financiers pour obtenir des rendements de 2 ou 3% ne permet pas non plus de protéger ses actifs, puisque le taux d’inflation reel étant supérieur au taux du rendement, la différence entre les deux donne un résultat négatif.

(Si le taux d’inflation reel est à 6% et que le rendement d’un placement est de 3%, en valeur reel l’investisseur perd 3% de pouvoir d’achat par an.)

Le taux d’inflation réel est bien plus élevé que le taux officiel, ce qui est facilement verifiable en allant faire ses courses tous les jours.

La grande difficulté aujourd’hui, vu la vitesse à laquelle sont imprimés les milliards d’euros et de dollars, est d’obtenir un rendement superieur au taux d’inflation réel.

Les épargants, investisseurs peuvent donc être fortement exposés à ces politiques inflationnistes.

Les grands perdants

Malheureusement, dans ce contexte inflationiste la majeure partie des populations sont impactées de plein fouet puisque le prix des produits alimentaires augmente plus vite que le niveau des salariés. Salaires qui ne suivent pas le taux d’inflation reel.

Pour rappel, l’augmentation du prix des matières premières est due principalement à la destruction du pouvoir d’achat des monnaies, elle est le symptôme de la croissance exponentielle de la masse monétaire.

Une perspective chiffrée

Un taux d’inflation (réel) de l’ordre de 7% par an pendant 7 ans détruit de moitié le pouvoir d’achat des populations si le niveau de salaire reste le même. Cette perspective fait froid dans le dos et risque d’être en dessous de la réalité étant donné les programmes “d’assouplissement quantitatifs” permanents que notre classe politique a choisi d’appliquer.

A la vitesse ou les milliards sont imprimés (entrainant de nouvelles bulles notamment sur les matières premières) et la quasi certitude que les salaires n’augmenteront pas dans les années à venir, l’appauvrissement des “masses” est garanti.

Près de la moitié de la population mondiale vit aujourd’hui avec moins de 2,5 dollars par jour. Nous sommes plus de 7 milliards sur terre. Environ 3,5 milliards de personnes vont être impactées par la destruction du pouvoir d’achat des monnaies…le sauvetage du système monétaire actuel se fait à ce prix.

Les retraités sont exposés également car le niveau des retraites est indexé sur le taux d’inflation officiel, taux qui ne reflète en rien le taux d’inflation réel.

L’appauvrissement se généralisera, la classe moyenne sera détruite car pris en étau entre une augmentation du coup de la vie (symptome d’une destruction du pouvoir d’achat des monnaies) et des taxes qui augmentent afin de financer l’endettement exponentiel des gouvernements.

Comment se protéger ?

Pour se protéger des ces politiques monétaires inflationnistes (voire hyperinflationniste selon mon scénario) il faut soit obtenir des rendements supérieurs au taux d’inflation réel (presque impossible) ou investir dans des actifs tangibles (métaux précieux, terres agricoles) qui n’ont pas bénéficié d’une bulle du crédit qui dure depuis 1971, soit la date de fin de convertibilité du dollar en or.

Les investisseurs et épargnants qui traverseront le mieux la crise sont ceux qui auront pris le temps de comprendre le fonctionnement du système monétaire et ses conséquences sur la destruction du pouvoir d’achat des monnaies. 

Conclusion

Tant que la question de la réforme du système monétaire ne sera pas abordée par la classe politique, la fuite en avant monétaire continuera à un rythme exponentiel de part la nature même du système monétaire international.

Malheureusement, la majorité des populations mondiales n’a aucun moyen de se protéger du déluge inflationniste qui, contrairement à ce que pense la majorité des gens, ne trouve pas son origine dans les décisions récentes de nos banquiers centraux, mais date de 1971 et la fin de la convertibilité de la monnaie de réserve internationale en actif tangible, l’or.

La crise de 2008 n’est que l’aboutissement d’un système monétaire qui doit être changé.

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