Rentrée budgétaire : que compte faire le gouvernement pour tenir les 3% de déficit avec le coup de mou de la croissance ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Le ministre de l'Economie Pierre Moscovici a confirmé son cap à 1,2% de croissance en 2013.
Le ministre de l'Economie Pierre Moscovici a confirmé son cap à 1,2% de croissance en 2013.
©Reuters

Douche froide

A un mois de la clôture du budget 2013 par le gouvernement, Pierre Moscovici a confirmé son cap à 1,2% de croissance en 2013 alors que la Cour des comptes et d'autres instituts publics et privés misent sur des niveaux encore plus faibles.

Jean Peyrelevade

Jean Peyrelevade

Jean Peyrelevade fait partie de l'équipe de campagne de François Bayrou pour l'élection présidentielle.

Ancien conseiller économique du Premier ministre Pierre Mauroy, il fut également directeur adjoint de son cabinet.

Économiste et administrateur de plusieurs sociétés françaises et européennes de premier plan, il est l'auteur de plusieurs ouvrages sur l’évolution du capitalisme contemporain.

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Atlantico : A un mois de la clôture du budget 2013 par le gouvernement, Pierre Moscovici a confirmé son cap à 1,2% de croissance en 2013 alors que la Cour des comptes mise sur 1% et que d'autres instituts publics et privés prévoient un niveau encore plus faible. Le gouvernement pourra t-il maintenir son objectif de 3% de déficit en 2013 ?

Jean Peyrelevade : Les prévisions de croissance seront sans aucun doute plus faibles que ce que le gouvernement avait espéré car nous sommes en panne de croissance de manière générale en Europe et, plus spécifiquement, en France.

En dépit de notre difficulté à générer de l'activité économique, le gouvernement sera obligé de maintenir son objectif de déficit à 3% pour l'année prochaine pour des raisons de crédibilités financières et politiques. Inéluctablement, des efforts supplémentaires sont à prévoir.

Les différents instituts de statistiques contrarient les prévisions de Pierre Moscovici qui maintient un objectif de 1,2% de croissance pour 2013. Le gouvernement devra alors affronter avec courage deux nécessités objectives si nous souhaitons retrouver le chemin de la croissance : redonner de l'oxygène aux entreprises sans attendre en transférant une partie des charges sociales sur la CSG - la Contribution sociale généralisée - afin de relancer immédiatement la compétitivité des industries françaises à l'exportation, l'innovation et l'investissement et, enfin, commencer à diminuer la dépense publique. Une mesure indispensable aujourd'hui.

Bercy a prévenu qu'il faudrait encore 15 milliards d'euros de hausses d'impôts supplémentaires pour atteindre les 3% de déficit en 2013. Où le gouvernement peut-il trouver de nouvelles recettes ?

Il ne s'agit pas de la bonne méthode. Il ne faut surtout pas continuer d'augmenter les impôts comme ce fut le cas jusqu'à présent car cela ne favorisera en rien une quelconque relance de l'appareil productif. La seule solution viable étant la diminution de la dépense publique.

Cependant, si telle est la voie poursuivie par le gouvernement, il sera difficile pour celui-ci de trouver 15 milliards d'euros sans toucher les entreprises - ce qui serait alors contraire aux objectifs de compétitivité officiellement poursuivis. Dès lors, le gouvernement devra tabler sur les impôts à large assiette (montant à partir duquel est calculé un impôt, ndlr) c'est à dire la TVA ou l'impôt sur le revenu sur l'ensemble de la population.

Une hausse de la CSG est probable. Il faut alors espérer qu'elle soit utilisée à bon escient afin d'alléger les charges sociales des entreprises, ce qui ne créerait pas, dans ce cas, de nouvelles recettes pour le budget de l'Etat.

Quelles sont les sources d'économies encore à disposition du gouvernement ?

Il existe trois sources d'économies possibles pour le gouvernement qui renvoient à des problèmes structurels et politiquement difficiles :

  • Il faut que les régimes de retraites soient équilibrés et fixer l'âge de la retraite au même niveau que celui des Italiens ou des Allemands, soit 65 ans, voire 67 ans.

  • Supprimer une couche d'administration locale quelle qu'elle soit afin de réaliser des économies de fonctionnement, un des facteurs d'amélioration de l'ensemble de notre compétitivité. Toutes les entreprises ont appris à supprimer une couche dans les structures de hiérarchie verticales. Sur ce point, je rejoins Bruno Le Maire que je trouve très courageux.

    • Réformer l'Assurance maladie en revisitant de fond en comble le régime d'assurance que se soit avec la carte des hôpitaux, la prévention, la distribution des médicaments ou les génériques.

Malheureusement, je ne pense pas que le gouvernement réalisera les économies nécessaires.

Quelle doit être la priorité pour la France : l'équilibre budgétaire pour relancer la croissance, ou relancer cette dernière en premier pour réduire les déficits par la suite ?

Il faut avant tout définir ce qu'est une bonne relance de la croissance. Cette dernière ne se caractérise pas par une relance de la consommation des ménages car notre appareil productif n'est pas capable de suivre. Dans ce scénario, nous accroissons notre déséquilibre du commerce extérieur de même qu'une augmentation des salaires n'aurait d'autres conséquences que d’accroître notre coût du travail qui est déjà supérieur à ceux de nos concurrents.

La vrai relance est une relance par la capacité d'offre des entreprises françaises. Pour cela, il faut un choc de compétitivité et un allègement des charges sociales sur les entreprises. Si nous agissons de manière significative sur ce levier, nous serions alors beaucoup mieux armés pour obtenir des prêteurs et des marchés financiers, éventuellement, une année supplémentaire dans le calendrier de retour à l'équilibre.

Cour des comptes, instituts publics et privés... nombre d'acteurs économiques semblent contrarier les ambitions de Pierre Moscovici ? Le gouvernement est-il isolé dans ses prévisions ? Que cache cette dichotomie ?

C'est le défaut de tous les gouvernements successifs sans exceptions car, en s'appuyant sur des chiffres de croissance irréalistes, ils n'enclenchent pas les politiques rigoureuses nécessaires.

Une réforme structurelle très importante consisterait d'ailleurs à inclure des prévisions de croissance fournies non pas par le gouvernement, mais par une moyenne - validée par la Cour des comptes - issue des prévisions de différents instituts indépendants.

Propos recueillis par Olivier Harmant

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