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Qu'ont les Chinois en tête en essayant de sauver l’euro ?
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Arrières pensées

La Chine achète massivement des obligations souveraines en euro (même si elle a un peu réduit son exposition aux risques sur la zone euro très récemment) et les investissements chinois en Europe ont triplé en 2011 pour atteindre 10 milliards d'euros.

Antoine Brunet

Antoine Brunet

Antoine Brunet est économiste et président d’AB Marchés.

Il est l'auteur de La visée hégémonique de la Chine (avec Jean-Paul Guichard, L’Harmattan, 2011).

 

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Sur les plans strictement économique et financier, il n'est jamais avantageux pour un pays de financer la progression de ses exportations par des dons à ses partenaires importateurs. C'est trop évidemment un jeu de dupes. Plutôt que de financer des exportations à fonds perdus, pourquoi ne pas utiliser cette capacité financière à des dépenses domestiques : infrastructures, investissements dans la recherche et la formation, ou bien encore dépenses militaires et spatiales...

L'histoire montre qu'en réalité les seuls cas où les pays disposant d'une forte capacité financière se sont montrés généreux à l'égard de partenaires en difficulté, c'était en réalité en réponse à des enjeux géostratégiques.

Si les Etats-Unis développèrent après 1945 le Plan Marshall pour l'Europe et le Plan Mac Arthur pour le Japon, c'était pour éviter que ces pays - exsangues économiquement et financièrement à la fin de la Seconde Guerre mondiale - n'aillent se précipiter dans les bras trop accueillants de l'URSS.

De même, si les Etats-Unis et leurs alliés consentirent à un refinancement très généreux de la dette extérieure de pays d'Amérique latine, c'est parce qu'ils craignaient une déstabilisation politique de leurs gouvernements, suivie d'un basculement possible de ces pays dans le camp de Cuba et de l'URSS.

De ce point de vue aujourd'hui, les Etats-Unis auraient en réalité intérêt à aider financièrement l'Europe pour éviter que la Grèce, Chypre, et même le Portugal, l'Espagne et l'Italie ne tombent dans les bras d'une Chine qui n'a cessé d'agir pour atteindre un tel résultat.

Mais précisément, les Etats-Unis ont perdu la capacité financière nécessaire à une pareille entreprise. Ils sont eux-mêmes très endettés à l’égard de l’extérieur et leur dollar risque même d'être remplacé par le yuan comme monnaie mondiale dominante. Par ailleurs, les dollars qu'ils émettraient pour prêter à l'Europe iraient encore se dépenser en produits « made in China » et iraient gonfler davantage les réserves de change totales de la Chine qui atteignent déjà 5.100 milliards de dollars à mars 2012.

Le Chine en réalité entend poursuivre jusqu'au bout sa stratégie visant à déstabiliser parallèlement les Etats-Unis et l'Europe. Stratégie qu'elle a activée depuis qu'elle a obtenu en 2001 son accès à l'OMC (Organisation Mondiale du Commerce) en dépit d'un yuan monstrueusement sous-évalué et d'une main-d'œuvre monstrueusement surexploitée.

Le moment se présente enfin pour elle d'achever la déstabilisation, qu’elle a amorcée, des pays européens (Royaume-Uni inclus) par une asphyxie économique et financière. Pas question pour elle d'apporter les bombonnes d'oxygène. Il s'agit au contraire de capitaliser enfin sa stratégie.

Il s'agit de s'emparer des maillons les plus faibles de l'UE : la Grèce, Chypre, le Portugal, mais aussi un pays comme la Hongrie. Il s'agit en parallèle de se subordonner les maillons forts désormais désemparés. Il suffirait que la Chine et sa grande alliée la Russie interrompent leurs achats aux entreprises allemandes au moment où leurs exportations vers la France et l'Europe de sud se dérobent, pour que l'Allemagne connaisse à son tour une crise très grave.

Dans la crise qu'elle traverse, l'Europe n'a donc rien à espérer et tout à redouter la part de la Chine.

Parmi les cadeaux empoisonnés que sait fort bien inoculer la Chine à ses adversaires, il en est un qu’on ne peut s’abstenir de mentionner : par des achats répétés depuis 2001 d’euros contre yuans et contre dollars, la Banque centrale de Chine (PBoC) a fortement contribué à ce que l’euro s’envole  entre fin 2001 et mi-2011 pour atteindre des sommets mortifères et à ce qu’il ne connaisse ensuite qu’un recul beaucoup trop limité en dépit de l’adversité extrême qui frappe la zone euro.

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