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L'État, sauveur du jour, tueur du lendemain. Mr Darmanin est-ce l’image que vous voulez donner de votre mandat ?
©ludovic MARIN / POOL / AFP

Les entrepreneurs parlent aux Français

Denis Jacquet revient sur les difficultés pour les entreprises liées à l'impact économique de la crise du coronavirus et sur les paradoxes de la société française.

Denis Jacquet

Denis Jacquet

Denis Jacquet est fondateur du Day One Movement. Il a publié Covid: le début de la peur, la fin d'une démocratie aux éditions Eyrolles.  

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Une image incongrue, folle, tellement étrange qu'on la penserait tournée pour une caméra cachée. Et pourtant, tristement, elle est réelle, pitoyable et pour tout dire inquiétante. L'État qui prétend négocier de grandioses plans de sauvetage au profit des PME et artisans devant les caméras, sabote la machine sous le manteau. Pour nous en rendre plus dépendants ? Pour ceux qui aiment la théorie du complot, on pourrait vraiment se poser la question. 

J'ai assisté vendredi à une scène qui hante ma mémoire et me scandalise. Résumé des faits. Pour une fois, vous je ne serai pas celui dont l’article s'interpose entre vous et vos vacances. Il sera court et descriptif. Puis interrogatif. Pour le plaisir du débat en tous cas. En espérant de tout cœur de me tromper.

Vendredi midi, sud de la France. Le décor, une plage bien connue de ceux qui dans les années 60 lui ont donné vie, et dont chaque grain de sable porte le souvenir des fêtes épiques qui ont agité, parfois scandalisé, sa matière. Le village de pêcheur est passé du statut de ville sans prétention, à villes emplie de prétentieux et de ceux qui les regardent, envieux ou admiratifs, en déambulant devant des bateaux qui n'ont plus rien de commun avec la barque du pêcheur d'antan. On y pêche plutôt les jeunes femmes disponibles, venues de pays de l'Est de l'Europe. Seul l'hameçon a changé de nature. Les dollars et euros qui coulent à flot, font aimant pour les amants d’une nuit ! Mais la ville garde un charme fou, une ambiance de Provence idéale, des pierres chargées de mémoire, des églises si belles, qu’elles réconcilieraient l'État avec la religion. 

Vendredi midi, dans une ville bondée, grâce (à cause ?) aux États Européens, qui, pour se "refaire", nous ont condamné à rester en Europe pour les vacances, les touristes s’entassaient, nombreux, en rang serré. Nos gouvernants ont suffisamment joué de la peur, pour que nos « nouveaux frileux » considèrent qu'aller en Grèce était plus dangereux que d'aller à Cannes, Hossegor ou Dinard. Hérésie du conditionnement par la peur, pièce maîtresse de cette terrible gestion de la crise sanitaire. Cela me rappelait un peu la mesure stupide, interdisant le footing entre 10h et 19h, qui avait abouti à concentrer tous les sportifs, toussotant, crachant et postillonnant, à 30cm les uns des autres, quand la veille de cette mesure, ils ne se croisaient pas ou peu, et à plusieurs mètres de distance. 

Sans surprise, les restaurants festifs, partout, tentent de sauver leur saison. Ils ont un gros mois pour s'en sortir ou mourir. 1 petit mois, le mois d'août, pour espérer tenir jusqu'à l'année prochaine. On pourrait penser qu'à partir du moment où l'on indique qu'à partir de septembre toute manifestation, sans limitation de nombre sera possible, il soit logique de penser que réunir 300 personnes dans un restaurant de plage, extérieur, aéré, dont les tables ont été "distanciées" les unes des autres, où les serveurs portent des masques (ainsi que les clients pour leurs déplacements) puissent pouvoir exercer et faire vivre des dizaines de membres du personnel, sans que cela n'émeuve qui que ce soit ? Non ?

Et bien si. L'État envoie sa police, sa milice devrais-je dire. Pour vérifier que chaque centimètre a bien été comptabilisé, pour respecter des consignes totalement extra-terrestres, "pondues" par des gratte-papiers Parisiens qui ignorent tout du fonctionnement d'un restaurant. Les mêmes qui ont "vomi" les guides de plus de 30 pages pour l'aménagement des bureaux des entreprises pour préparer le déconfinement. Kafka, sans le talent.

A 16H, 2 policiers, dont l'un NON MASQUÉ, viennent vérifier 2 choses:

Le nombre de décibels dégagé par la table de mixage. Eh oui, à St Tropez, ville de fête, sur une plage sans voisin immédiat, il ne faut pas dépasser 70 décibels !! Le croyez-vous ? Comment vous dire ? Imaginez que l'on vous demande de mettre du coton dans vos airpods pour en adoucir le son pour ceux que vous croisez dans la rue !!!! Au moment de l'anniversaire des clients, impossible de lancer le "happy birthday", il faut le mimer. Les policiers estiment alors, à l’oreille mouillée, que les 70 décibels ont été dépassés : C’est un franchissement de ligne blanche, amende !! Le pauvre restaurateur qui tente de faire une saison de 6 mois en 2 mois, offre donc ses premières marges à l'État. Je te sauve, mais avec ton argent. Brillant ! Il fallait y penser. 

Ensuite, grâce à une fine observation de ce policier, toujours non masqué, lui permet de déterminer qu'un "individu de type lambda" (remember les Inconnus ?), n'aurait pas porté correctement le masque pour aller aux toilettes. Amende supplémentaire et menace de fermeture !! On ne badine pas avec la sécurité sanitaire des vacanciers, qui pendant ce temps passent derrière lui, non masqués et s'entassent partout, sans que cela n'émeuve notre brave représentant des forces de l'ordre. Il semble que le virus se propage uniquement dans les restaurants, donc veillons à les fermer !! Pour le reste, les gens peuvent s'entasser, ce n'est pas dangereux. Mais qu'un acteur économique essentiel au pays, ose gagner de l'argent en contrepartie de son travail, en entassant bien plus correctement ses clients, c'est insupportable. 

La récession est en train de fabriquer des pauvres. L'État se porte à leur secours, alors que va faire l'État si ces restaurateurs ne font pas faillite ? Il n'aura plus personne à sauver, ce serait ballot non ?

L'amende peut monter à 10 000€ !! Vous avez bien lu, ce n'est pas le soleil qui perturbe votre lecture. 10K€ !! et une menace de fermeture. De 15 jours !!! (Fin de la saison). En clair, une condamnation à mort pour l'opérateur de la plage. 

La veille, plusieurs plages avaient été fermées, pour des raisons aussi brillantes. Mais tenez-vous bien, la veille 3 plages ont été fermées, en plein service, avec l’appui de cars de policiers. Pas un envoyé de la Préfecture, discret, qui siffle la fin de la partie après le service suivant. Non, un car de « flics », plus nombreux que ceux qui ne nous ont jamais protégé, à Paris, des blackbox. Un restaurateur, c’est manifestement plus dangereux qu’un terroriste et cela demande une descente de CRS et de grenades lacrymogènes. Dans quel monde vivons-nous ? Le travailleur y est coupable de bonne conduite. Travailler doit être puni. Quelle honte. 

J'ai mal à la France. C'est insupportable. Ces déclarations larmoyantes sur la volonté de sauver le tourisme (presque 10% de notre PIB), des mesures de sauvetage arrachée aux forceps à l'Europe, pour accoucher, au final, d'une réalité bien terrifiante et médiocre, celle d'un État, qui lance sa police à l’assaut de l'activité économique, la réprime, la déchire, l'humilie et la terrasse. Le pouce baissé sur le terrain, alors qu'il l'arbore, levé bien haut, sur les plateaux TV. Honte à l’Intérieur qui donne de nous une image si lamentable à l’extérieur et dépossède ceux qui travaillent pour s’en sortir. 

Dans cette crise, il ne devrait pas y avoir de demi-mesures. Ou l’on confine. Ou on ouvre. On a choisi d'ouvrir, laissons ouvert. La contamination augmente. Et alors? L'hospitalisation augmente-t-elle pour autant? NON. La mortalité ? NON. Être contaminé n'est pas un problème, tant que cela n'entraîne pas une embellie des cas graves et des hospitalisations. Si nous ouvrons, ouvrons entièrement. Contamination ou non. On fermons tout. Mais halte à l’hypocrisie.

Si j'avais mauvais esprit... je dirais que le garagiste laisse la clé à molette sur le moteur pour s'assurer de récupérer le client. L'État voit dans cette crise, le moyen de reprendre la main, voire même de tester notre capacité à accepter la privation de liberté en échange d'une sécurité sanitaire. Il a donc besoin de junkies, dépendants à la subvention payée en monnaie de singe, imprimée sur planche à billets fantoche. 

Nous avons une économie du tourisme, de l'hospitalité, qui a besoin de s'en sortir, on l'enfonce. Il est scandaleux de voir ces entrepreneurs et entrepreneuses, poussés à la faillite par un État devenu policier. Tolérance zéro. J'avais compris que c'était pour les délinquants, j'avais dû laisser échapper le chapitre sur les entrepreneurs. Ils seraient des délinquants, qu'il faut punir de mort. Et pas uniquement l'entrepreneur, son salarié aussi. Sur la plage que je citais, un serveur fait en moyenne 5000€ par mois pendant cette saison. Cela lui permet de tenir jusqu'à la prochaine, ou d'épargner pour l'avenir en faisant également une saison d'hiver. Nous les retrouverons, grâce à ce terrorisme policier, pointant au chômage, au lieu d'alimenter la consommation de son salaire de "riche".

J'ai mal à la France. Vraiment. Qui fera preuve de raison dans ce pays ? Le travail sera-t-il à nouveau, un jour, d’intérêt collectif ? Mr Darmanin, répondez-nous.

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