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Deuxième vague en Allemagne, Portugal, France ? La peur du virus peut faire plus de dégâts que le virus lui-même
©ANNEGRET HILSE / POOL / AFP

Atlantico Business

Alors que les signes d’un déconfinement réussi se multiplient, le retour du virus n’est pas exclu, compte tenu du relâchement des comportements en Allemagne, au Portugal et même en France. Moralité, le seul moyen d’éviter un nouveau confinement va être de se protéger.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Le directeur général de l’OMC, l’organisation mondiale du commerce, qu’on n’avait pas beaucoup entendu pendant la Pandémie, estime que la chute du commerce mondial devrait être moins forte que prévue au deuxième trimestre. Il apporte donc sa petite contribution à la perspective d’une sortie de crise au moment où, en Europe, les signes se multiplient montrant une reprise possible de la circulation du virus. En Allemagne, en Suisse, au Portugal et même en France qui ne paraît pas épargnée par ce risque.

Roberto Azevedo, le directeur général de l’OMC, était resté très absent au début de l’épidémie, lui qui bien étrangement, s’est abstenu de mettre en cause la responsabilité de la Chine, oubliant les fondements de sa fonction.  L’Organisation mondiale du commerce a quand même été créée pour favoriser le développement du commerce mondial et surtout, en être le gendarme chargé de veiller à son bon fonctionnement. Notamment après l’arrivée de la Chine sur le marché mondial au début des années 2000.

Aujourd’hui, il sort du silence pour adresser un satisfecit aux gouvernements qui, selon lui, ont dans l’ensemble bien réagi à l’épidémie. D’où « la reprise du commerce mondial ».

Le directeur général de l’OMC n’a pas tort mais se console avec peu.  Parce que la chute du commerce international a été terrible entre le premier et le deuxième trimestre, avec un effondrement de 18 ,5 %. Effondrement historique.

Compte tenu de ce qui s’est passé au deuxième trimestre, ce n’est pas étonnant puisque le monde entier s’est arrêté. La Chine s’est fermée en février, plus d’avions, plus de bateaux, puis les pays d’Asie, la Corée; puis le Moyen-Orient, l'Europe et l’Amérique du Nord et du Sud. Sans refaire le film, c’est la première fois dans l’histoire de l’humanité que tous les gouvernements (ou presque) ont décidé de se confiner pour empêcher la circulation du virus. Tout s’est passé comme si on avait arrêté la circulation du sang. On a mis la planète dans une sorte de coma administratif pour sauver des vies humaines.

Mais pour sauver des vies humaines, on a aussi pris le risque de ruiner toutes les économies. Donc pas d’activité, pas de commerce mondial, pas de croissance et pas d’emplois.

Alors le directeur général de l'OMC pense que la situation se redresse un peu. Heureusement ! Puisqu’après deux mois de purge, les ports se rouvrent, les avions commencent à redécoller et les économies se déconfinent.

La situation peut se redresser plus vite que ce qu’on pensait. Beaucoup d’économistes travaillent sur une courbe en V. Une chute très rapide et très profonde, ce qui s’est passé, suivie d’un redressement tout aussi rapide. Avec des vraies raisons.

La première, c’est que la crise n'a pas détruit les systèmes de production. Les usines, les avions, les machines se sont arrêtées donc on peut les faire repartir.

La deuxième raison, c’est que dans beaucoup de cas, les contrats de travail n’ont pas été cassés. On a organisé le chômage partiel et découvert le télétravail à grande échelle.

Et puis troisième raison, les gouvernements ont assez bien réagi. Dans les pays qui s’étaient préparés, avec des masques et des tests, on a pu limiter les dégâts, la chute d’activité a été moins grave, comme en Allemagne. Dans les pays qui n’étaient absolument pas préparés comme la France, on a tout bloqué mais on a aussi mis beaucoup d’argent pour amortir le choc. Avec le chômage partiel, les aides aux entreprises et les prêts garantis, l’Etat français a mobilisé plus de 500 milliards d’euros.

Les premiers chiffres du déconfinement qui tombent de l’Insee actuellement montrent que les effets sur l’économie sont positifs. Les commerces repartent, les transports, les administrations, les restaurants, et demain les salles de spectacle. Tout repart plus vite que ce qu’on craignait. En amont, l’industrie repart également avec la reprise du travail. Pendant le confinement, l’appareil industriel était tombé à moins de 50% de sa capacité. Aujourd’hui il tourne à 80 %. Dans l’agroalimentaire, dans le digital, dans la chimie, dans le transport aérien. L'automobile a du mal à écouler rapidement ses stocks, les constructeurs ont du mal à inventer l’avenir mais le secteur n’est pas en panne.

La France obéit à une logique de courbe en V. On a très fortement chuté mais on peut rebondir assez vite. Les risques sont très bien connus maintenant.

L’avenir proche va dépendre de trois facteurs  :

D’abord, le facteur social risque d’être très lourd.  Beaucoup d’entreprises ne vont pas se relever parce qu’elles étaient malades avant le Covid. Renault et Air France par exemple, qui sont beaucoup aidées par l’Etat, étaient malades avant. Mais au-delà de ces très gros risques, il y a beaucoup de petites entreprises qu’on ne connaît pas et qui n’ont pas pu bénéficier des prêts garantis parce qu’elles étaient trop mal en point. Cette situation porte en germe une vague de licenciements pour la rentrée. Le principal risque est donc social, compte tenu des restructurations nécessaires dans les secteurs qui étaient malades avant le Covid 19 et dont le virus a révélé la gravité des maladies dans les secteurs industriels.

Ensuite,  le problème peut être financier.  La France a accumulé une montagne de dettes qui représente 120 % du PIB. Une situation avec laquelle on se fait peur parce que normalement à ce rythme, on devrait courir tout droit à la faillite.

Sauf que le poids de la dette se mesure par rapport à l’activité. Or, l’activité s’est écroulée donc le poids relatif est très élevé. Mais si l’activité redémarre, ce qui est le cas, la courbe en V, le % de dette va s’alléger. On peut terminer l’année avec un taux d’endettement ramené à 100% . Par ailleurs, si la France a fait un énorme effort, il faut savoir qu‘elle a minimisé les risques. Sur les 500 milliards d’aides dont tout le monde parle, il y a 400 milliards de prêts (garantis certes) mais qui seront remboursés par les entreprises puisque les banques ne délivrent ces prêts qu’à des entreprises qui vont bien. Enfin, pour couvrir et réassurer la solvabilité des Etats et des banques, la Banque centrale européenne assure la liquidité, les taux d’intérêt sont très bas et pour la première fois l’Europe s’est réveillée pour assurer la solidarité. A court terme, il n’y a donc pas de risque sur la dette.

Enfin, le problème reste sanitaire dans le cas où une deuxième vague d’épidémie se formerait à l’automne. Mais hormis l’inquiétude et même l’angoisse que le virus entretient dans l’opinion dès qu’il bouge, les risques sont désormais gérables compte tenu de l’expérience. Espérons que l’administration du système de santé a tiré les leçons de la première vague, sachant que le pays est désormais mieux équipé en masques, en tests et en salles de réanimation. Espérons aussi que la population va se comporter avec responsabilité. La pratiques des gestes barrières pour casser les chaines de contamination paraît nécessaire, mais pas forcément à tout le monde...

On s’aperçoit, depuis le début de cette affaire, que la peur du virus a imposé le confinement et du coup, a provoqué plus de dégâts que le virus lui-même.  Le seul moyen est de conjurer cette peur et donc de se protéger individuellement. Chose étonnante : on s’aperçoit aujourd’hui que la majorité des Français qui réclamait à juste titre des masques de protection au début de l’épidémie en mars, a tendance aujourd’hui à oublier de les porter, et pas seulement les soirs de fête de la musique...

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