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Taïwan la démocrate plus efficace que Pékin l’autoritaire pour contenir la propagation du Coronavirus (n’en déplaise à Jean-Pierre Raffarin)
©CHEN CHI-CHUAN / AFP

Endiguer l'épidémie

L'exemple de Taïwan et des efforts de transparence menés par les autorités de ce pays sur le dossier du coronavirus ont permis de mieux gérer cette crise sanitaire de grande ampleur en comparaison avec la gestion de la Chine.

Emmanuel Lincot

Emmanuel Lincot

Professeur à l'Institut Catholique de Paris, sinologue, Emmanuel Lincot est Chercheur-associé à l'Iris. Son dernier ouvrage « Le Très Grand Jeu : l’Asie centrale face à Pékin » est publié aux éditions du Cerf.

 

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Atlantico.fr : La Chine adopte depuis des semaines une posture de contrôle de la situation face à l'épidémie de Coronavirus. En plus de faire face à la complexité de l'épidémie, la Chine persiste à encadrer sa communication et à filtrer les informations émanant de sa société civile au prix de son efficacité sur le terrain.

Les difficultés que traverse la Chine dans la maîtrise de l'épidémie ne sont-elles pas une démonstration des limites de son modèle politique autoritaire face à une épidémie ? A-t-elle à contrario contribué indirectement à la propagation du Covid-19 ?

Emmanuel Lincot : Il y a deux poids deux mesures. Il est vrai que ce régime autoritaire a tardé à réagir. Il a même condamné les neuf médecins de Wuhan lanceurs d’alerte qui, sur les réseaux sociaux, avaient alerté l’opinion sur la gravité de la situation pour ensuite les réhabiliter. A l’inverse, le gouvernement central, avant même la mi-janvier, a réagi d’une manière spectaculaire en ordonnant de construire des hôpitaux à la hâte pour pallier au manque d’infrastructures hospitalières. Aucun pays au monde n’a réussi à quadriller l’ensemble du territoire, contrôler les flux de population comme l’a fait la Chine depuis ces dernières semaines. Elle le doit à la convergence de deux pratiques. L’une héritière du système maoïste consistant à surveiller la population par quartier l’autre par les relais qu’offre l’intelligence artificielle. La propagation du virus est en partie liée à l’impéritie gouvernementale des pays tels que l’Italie ou l’Iran. La France n’est pas en reste. Le fait d’accepter jusqu’à très récemment des rencontres sportives internationales sur son territoire me paraît totalement irresponsable.

Un pays comme Taïwan semble au contraire avoir pris des mesures officielles immédiates tout en encourageant la diffusion des informations dans sa population afin de faire face avec efficacité : peut-on considérer que la transparence démocratique permet de mieux gérer une crise de type épidémique ?

Ne jamais oublier que Taïwan a 26 millions d’habitants contre 1 milliard 400 millions de l’autre côté du détroit. Taïwan est par ailleurs une île. Vous contrôlez a priori beaucoup mieux les flux des entrants et des sortants dès lors où votre pays correspond à cette configuration. Je ne pense pas qu’il faille systématiquement idéologiser le débat. Taïwan est une démocratie certes mais sa population - dans sa majorité - est avant tout de culture chinoise ou pour dire les choses encore autrement, elle est de culture confucéenne. Autodiscipline, souci de l’autre et responsabilité collective constituent les piliers de cette culture que Taiwan et la Chine ont en partage.

Face à la complexité de l'épidémie et la posture de la Chine, les récentes déclarations de l'ex-ministre Jean-Pierre Raffarin, visant à défendre Pékin, peuvent-elles être considérées comme irresponsables ?

Non, au contraire. Raffarin met le doigt sur une performance très réelle du régime chinois à juguler la crise. Même s’il est vrai que cette crise est révélatrice de carences que vous avez vous-même souligné. Et parmi ces carences, il est indéniable que la Chine reste par bien des aspects encore un pays du tiers monde. L’absence de sécurité sociale, le problème d’hygiène comme le montrent ces marchés d’animaux soulignent la grande divergence qui caractérise la Chine entre sa capacité à se projeter à l’extérieur, à réaliser des prouesses technologiques et dans le même temps à ne pas répondre aux besoins les plus élémentaires d’une grande partie encore de sa population. Cela sera certainement reproché au gouvernement central et à son président Xi Jinping. Par ailleurs, il est capital que les pays occidentaux prennent la mesure de leur état de dépendance par rapport à la Chine sur le plan économique. Cette crise nous le rappelle avec force et nous invite comme le disait avec raison Bruno Le Maire à réajuster notre stratégie par rapport à ce pays.

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