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Municipales à Paris : ces leçons de la campagne victorieuse de Boris Johnson face à Ken Livingstone dont devrait s’inspirer Rachida Dati
©CARL DE SOUZA / AFP

Bons baisers de Londres

Jonathan Isaby et Giles Edwards avaient analysé le succès de Boris Johnson à Londres dans le livre "Boris V. Ken: How Boris Johnson Won London". Jonathan Isaby revient pour Atlantico sur les enjeux des municipales à Paris et indique la stratégie que pourrait adopter Rachida Dati.

Jonathan Isaby

Jonathan Isaby

Jonathan Isaby a été rédacteur en chef du BrexitCentral depuis sa fondation en septembre 2016 jusqu'en janvier 2020. Il a travaillé dans  de nombreux médias lors de sa carrière journalistique. Il a notamment travaillé à la BBC en tant qu'analyste politique ainsi qu'au Daily Telegraph. En 2008, il est devenu co-rédacteur en chef de ConservativeHome.com, faisant de lui le premier journaliste d'un journal national britannique à quitter les médias grand public pour devenir un blogueur professionnel à plein temps. Jonathan Isaby est diplômé de l'Université de York. 

Il a co-écrit et publé en juin 2008, "Boris v Ken: How Boris Johnson Won London", avec Giles Edwards.

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Atlantico.fr : Vous avez expliqué dans votre livre "Boris vs Ken" que le Parti conservateur de Boris Johnson ne pensait pas gagner les élections municipales de 2008. Comment cela se fait-il ? Qu'est-ce qui l'explique ? Pourquoi un tel défaitisme ?

Jonathan Isaby : Ce que je disais dans mon livre - coécrit avec Giles Edwards -, c'est que Londres a effectivement été, au cours des deux, voire trois dernières décennies, une sorte de ville de gauche, certainement en raison de l'évolution démographique, de la composition socio-économique et du vote des minorités ethniques. Tout cela fait de Londres une ville qui s'oriente davantage vers les travaillistes que vers les conservateurs et il a toujours fallu un candidat conservateur assez spécial pour pouvoir remporter cette élection en 2008. Mais comme nous l'avons vu, Boris Johnson a la capacité d'entrer en contact avec des électeurs qui, traditionnellement, ne soutiennent pas le parti conservateur. Nous l'avons même constaté lors des élections générales de décembre dernier en Angleterre et au Pays de Galles. Ce fut un changement radical et positif pour le Parti conservateur. Boris Johnson a réussi à persuader des gens de voter pour le Parti conservateur et qui n'auraient jamais voté pour ce parti autrement, en particulier les jeunes. Et c'est ce qui s'est passé à Londres en 2008, poussé par le fait que vous aviez un travailliste en place depuis huit ans (Ken Livingstone), qui avait d'abord dit qu'il ne se représenterait pas, mais qui l'a fait, et qui, chaque année, augmentait les impôts à Londres. On avait le sentiment qu'il était temps de changer et Boris Johnson a proposé quelque chose de très différent.

Est-ce sa personnalité excentrique qui a réellement changé toute la dynamique des élections ? Pensez-vous que son discours anti-establishment l'a fait gagner ? Rachida Dati - la candidate conservatrice pour Paris - devrait-elle le prendre en exemple ? 

Bien sûr ! Sa personnalité a certainement été un facteur important. Je pense que les électorats au Royaume-Uni et en Europe sont devenus beaucoup plus volatiles ces dernières années. L'élection de 2008 est manifestement intervenue dans un contexte économique incertain et on a eu le sentiment que l'establishment politique en place avait laissé tomber les gens et, pire, n'avait pas répondu à leurs attentes. Boris Johnson est un politicien très intelligent, dans le sens où il se présente comme un personnage très anti-establishment, même s'il a un CV élitiste et établi. Il est passé par Eton, Oxford, il a été journaliste dans des journaux et magazines nationaux et, dans un sens, c'est un personnage "très establishment". Mais d'un autre côté, il a pu se présenter à la fois à Londres et sur la scène nationale comme quelqu'un de prêt à tordre le cou à l'establishment, à le secouer si nécessaire.

Concernant Rachida Dati, nous avons vu que la méthode de Boris Johnson à Londres en 2008 et en décembre 2019 a été un franc succès et elle peut et doit le prendre en exemple bien sûr. D'autres hommes politiques de premier plan dans le monde, comme Donald Trump par exemple, se sont présentés ainsi, quels que soient leurs propres références et leurs antécédents personnels qui peuvent les faire passer pour des figures de l'establishment. S'ils peuvent se présenter comme des personnes désireuses de s'attaquer à un establishment, qui est considéré comme ayant laissé tomber les électeurs, il est clair que c'est une stratégie qui peut être mise en œuvre avec succès. Macron a essayé pendant l'élection présidentielle, mais n'a pas réussi à conserver cette stratégie. Le candidat conservateur à Paris devrait rester sur la ligne que Boris Johnson a ouverte et s'y tenir. Les électeurs, une fois de plus, ont besoin de chercher ailleurs, de trouver un nouveau personnage qui pourra s'occuper et prendre en charge leurs préoccupations. Et j'espère bien que ce sera quelqu'un du courant politique dominant plutôt que quelqu'un des extrêmes. S'il doit s'agir d'une figure anti-establishment, il faudra qu'elle soit issue d'un courant dominant.

Une autre stratégie de Boris Johnson consistait à parler à ceux qui ne votaient plus, à ramener dans son sillon des gens complètement perdus dans le spectre politique. Rachida Dati devrait-elle aussi utiliser cette méthode pour gagner des voix à Paris ?

Cela peut être une stratégie très intéressante. L'autre grande campagne à laquelle Boris Johnson a participé était le référendum de 2016 pour sortir ou non de l'Union européenne et dans laquelle il a évidemment été la figure de proue de la campagne "Leave". Lors de ce référendum de 2016, des millions de personnes ont voté, alors qu'elles n'avaient pas voté depuis des années ou des décennies, peut-être même jamais, parce qu'elles avaient le sentiment que le fait de voter auparavant ne changerait rien. Ce que ce référendum de 2016 nous a montré, c'est que si les gens qui pensent que le vote n'a pas d'importance viennent voter, ils peuvent en fait avoir un impact incroyable. Et vous savez que le Royaume-Uni a quitté l'Union européenne surtout sur ce cela, sur le fait que les votes des gens qui ont vu pour la première fois que leur vote pouvait réellement compter. Pour un candidat qui veut relever un tel défi, qui veut s'y consacrer, c'est un chemin long et sinueux mais c'est une stratégie qui finit par payer. Et cela peut être une stratégie solide à Paris pour la candidate conservatrice.

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