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Post-Brexit : plus d’Europe, moins d’Europe ou mieux d’Europe ?
©JOHN THYS / AFP

Transformation de l'Union européenne

Décidément, les élites europhiles peinent à entendre les messages envoyés par les peuples européens, notamment à l'occasion du Brexit.

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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Ce n'est pas seulement le discours d'Emmanuel Macron qui imprime cette aspiration. C'est une série de réactions, dont celle du "libéral" flamand Guy Verhofstadt, qui donnent le sentiment que la solution pour beaucoup passe par un renforcement de la technostructure européenne.

De façon assez étrange, le Brexit, qui constitue pourtant un désaveu fondamental, cinglant, sans appel, de la construction européenne telle qu’elle est conçue depuis au moins vingt ans, ne paraît pas ébranler les certitudes des élites europhiles qui ont conduit à cette rupture. Entre le discours d’Emmanuel Macron et la réaction d’un europhile convaincu comme Guy Verhofstadt, on ne donne pas cher des libertés publiques telles qu’elles ont vu le jour sur notre continent. 

Les élites europhiles ont-elles compris l’appel à l’identité et à la liberté ?

Parfois, on se pince en se demandant si l’on rêve ou si l’on est éveillé. Et, à l’immédiate issue de ce Brexit, on se pince encore et encore. 

Car les raisons qui ont poussé les Britanniques à exprimer le souhait de rompre avec l’Union Européenne en 2016 – raisons confirmées dans tous les autres scrutins qui ont suivi, avec constance, depuis cette date, ne laissent planer aucun doute sur les problèmes que la construction européenne pose aujourd’hui aux peuples de l’Union.

D’une part, la politique migratoire imposée par Angela Merkel de façon unilatérale a montré que les peuples du continent étaient désormais pieds et poings liés aux volontés prussiennes. Ce qui ne serait jamais arrivé à l’époque où la capitale allemande était Bonn, est devenu possible depuis que Berlin a repris sa place.

D’autre part, la dérive technocratique de l’Union, qui conduit à une multiplication, une prolifération de normes sur toutes choses et dans tous domaines, est massivement rejetée par les Européens. L’Europe fut conçue pour préserver les libertés. Elle en est aujourd’hui devenue la principale pourfendeuse. 

Ces appels clairs à plus de liberté et plus de souveraineté identitaire ne peuvent être plus explicites. En même temps, qu’ils sont significativement rejetés par les décideurs qui sont la principale cause de cette situation. 

Le « en même temps » macronien continue

On relira avec attention le discours d’Emmanuel Macron prononcé le soir du Brexit. Comme d’habitude, le Président français dresse des constats qui peuvent se tenir, mais ne propose aucune solution concrète en rapport avec ce diagnostic. 

Plus que jamais nous avons besoin d’Europe, soyons lucides. (…) Et donc je vous mentirais ce soir à vous dire que l’avenir de notre pays pourrait se bâtir dans moins d’Europe ou un retrait. Mais je suis conscient que l’Europe ne pourra continuer d’avancer que si nous la réformons en profondeur, pour la rendre plus souveraine, plus démocratique, plus proche de nos concitoyens et donc plus simple aussi dans son quotidien et que nous réussissions à rebâtir un projet européen plus clair pour vous toutes et tous. 

Tout est dans tout, et inversement. Nous avons besoin de plus d’Europe, mais il faut rebâtir un projet. Lequel?  On connaît les réponses macroniennes par avance. Elles sont toutes productrices de plus de réglementations, de plus de normes. 

Là où les peuples demandent une stratégie migratoire claire, une affirmation sans ambiguïté de nos valeurs collectives face aux revendications islamistes ou ultra-atlantistes, les élites continuent à parler technocratie et à chercher des réponses dans des normes libre-échangistes sans contrepartie. 

Le « libéral » Verhofstadt veut transformer l’Union Européenne en secte

Il faut peut-être aller chercher dans le discours de Guy Verhofstadt, qui se proclama libéral à une époque, les intentions cachées du discours d’Emmanuel Macron. L’ancien Premier Ministre belge propose de supprimer toute forme d’opt-in ou d’opt-out dans l’Union Européenne. Autrement dit, l’Union Européenne supprimerait de son fonctionnement toute possibilité d’aménagement de ses règles pour tel ou tel pays. 

Mais c’est précisément l’excès de rigidité qui a fait fuir les Britanniques. Si la seule chose que les « libéraux » européens retirent de ce départ à l’anglaise tient à l’excès de liberté laissé par l’Union, on n’est pas prêt de sauver l’Europe. Il est assez curieux de voir que certains cerveaux refusent de tirer avec autant d’obstination, d’arrogance, de certitude, les leçons les plus évidentes de l’histoire. 

Vers une implosion de l’Union européenne ?

En réalité, les élites au pouvoir ne veulent ni en démordre ni en tirer les leçons : à leurs yeux, le départ britannique relève de l’erreur, voire de la bêtise. En aucun cas, le dogme du « plus d’Europe » ne sera remis en cause. Au rythme de leur déni, l’Union européenne ne devrait pas tarder à imploser. 

On notera d’ailleurs que l’Union devrait réformer les règles d’adhésion pour contourner le veto français à l’entrée des pays balkaniques. Et voilà ! la France, qui s’imagine encore peser dans l’Union, devra bientôt constater que l’Allemagne continue à tour de bras à intégrer dans la construction communautaire de futurs partenaires commerciaux qui font tous le jeu des États-Unis et n’ont aucune envie de participer à un projet au-delà de leurs intérêts immédiats. 

C’est cette Europe-là que les Britanniques ont voulu quitter. C’est cette Europe-là qui constitue désormais notre horizon indépassable. 

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