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Retraites : les enseignants parviennent à obtenir une loi de programmation immédiate à 10 milliards d’euros
©JEAN-CHRISTOPHE VERHAEGEN / AFP

Négociations

Jean-Michel Blanquer, a promis "des augmentations de rémunération très significatives pour les professeurs". Dans le cadre de la réforme des retraites, il a également tenté de rassurer les enseignants en affirmant que "les pensions ne baisseront pas".

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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Les enseignants sont décidément très bien organisés collectivement. Alors que la performance globale de leur profession, à en juger par le classement PISA ou Shangai, reste très médiocre, ils obtiennent augmentations de salaires sur augmentations de salaires. Après les mesures Jospin du début des années 90, qui avaient augmenté les salaires (notamment dans l’enseignement primaire) sans aucune contrepartie en termes de productivité ou d’efficacité, une loi Blanquer devrait, là aussi sans la moindre contrepartie, revaloriser largement les salaires pour compenser la réforme des retraites. Cette mesure d’environ 10 milliards d’euros sera bien évidemment financée par les salariés du secteur privé, qui verront pour leur part leur retraite calculée sur la base de toute leur carrière au lieu des vingt-cinq meilleures années. Une fois de plus, réformer les retraites coûtera beaucoup plus cher que les non-retraites, et les inégalités de traitement s’accroîtront.

Avec son million de salariés et sa co-gestion syndicale, le corps enseignant fait peur aux gouvernements qui se succèdent. Alors que le niveau scolaire en France, comparé aux autres pays industrialisés, reste très médiocre, l’armée des professeurs, aussi nombreuse en son temps que l’Armée Rouge, obtient sans cesse de nouveaux avantages grâce à un argumentaire bien huilé, et fabriqué de toutes pièces, sur son prétendu faible niveau de rémunération, qui  ne prend jamais en compte ni les primes, ni le temps de service hebdomadaire, ni le temps de service annuel. La réforme des retraites, qui prend l’eau de toutes parts, en donne un nouvel exemple.

Une concertation dans l’urgence ouverte le 13 décembre

Après le désastreux discours d’Edouard Philippe mercredi, qui  a jeté de l’huile sur le feu avec une maestria rarement connue sous la Cinquième République, Jean-Michel Blanquer s’est empressé d’ouvrir une concertation ce vendredi avec les syndicats enseignants pour désamorcer la grenade prête à exploser. Alors que le même exercice à la RATP et à la SNCF s’est terminé par un claquement de portes, le ministre de l’Education peut se targuer d’avoir ferré les poissons qu’il avait à ferrer.

En effet, les syndicats qui ont participé à cette concertation ont majoritairement marqué un attentisme fort, mais plutôt bienveillant et satisfait. Il faut dire que la promesse faite par le Premier Ministre de garantir coûte-que-coûte leur niveau de pensions n’est pas tombée dans l’oreille de sourds et devrait germer dans beaucoup d’esprits. Ces grands donneurs de leçons en matière de solidarité que sont les enseignants devraient assez facilement se laisser convaincre de lâcher le combat collectif pour empocher des dividendes aussi facilement récoltés.

L’enjeu est de taille : les enseignants sont ceux qui ont, dans la fonction publique, le plus à perdre à la réforme, puisqu’ils sont ceux qui ont le moins de primes, au moins parmi les catégories d’encadrement. Le passage à un calcul sur la totalité de la carrière au lieu des six derniers mois de salaires devrait donc faire fortement baisser leurs retraites là où d’autres profiteront de l’intégration des primes dans le calcul du revenu du remplacement pour doper le montant final perçu.

Une loi de programmation en même temps que la réforme

L’UNSA était hier soir le seul syndicat à avoir dressé un compte-rendu de la réunion avec le ministre. On en retiendra les passages les plus éclairants :

"Nous avons obtenu que l’effort budgétaire important soit traduit dans une loi de programmation. Nous avons également obtenu le resserrement du calendrier de négociation. Elle aura lieu en même temps que la discussion au Parlement de la loi sur la réforme des retraites.

Les mesures concerneront davantage les enseignants, personnels d’éducation, psychologues de l’Éducation impactés, de la génération 75 aux nouveaux entrants, mais concerneront aussi les autres. Les premières mesures de revalorisation entreront en vigueur dès 2021.

La fédération a rappelé que tous les personnels de l’Education nationale sont concernés par la réforme des retraites et doivent obtenir des garanties.

Nous avons posé nos exigences pour le cadre et la méthode de travail. Si les discussions sont prévues jusqu’à l’été 2020, nous voulons des étapes intermédiaires avec de premières prises de décisions. Nous avons réaffirmé que les discussions métiers ne peuvent pas se faire dans le cadre de ces négociations."

Autrement dit, tous les personnels, y compris les administratifs, devraient bénéficier de la mesure, alors même que ces administratifs sont largement dotés en primes. A quelque chose, malheur est bon ! Dès l’été 2020, on y verra plus clair sur des mesures salariales qui commenceront à faire effet en 2021, soit quatre ans avant l’entrée en vigueur de la réforme des retraites.

Le coût exorbitant de la réforme des retraites

Autrement dit, la réforme Macron, dite réforme systémique, aura un premier effet : la dérive des comptes publics et d’importantes revalorisations salariales pour les fonctionnaires sans aucune contrepartie en termes de productivité ou d’efficacité. Gageons que, dans trois ans, dans six ans, les résultats des élèves français aux tests Pisa seront toujours aussi navrants.

Mais les enseignants auraient bien tort de s’impliquer plus dans l’éducation des enfants que les parents leur confient : ils bénéficient d’augmentations de salaire quasi-automatiques, sans que leur employeur ne leur demande aucun compte. Pourquoi se priver d’une telle joie ?

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