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OTAN : une bombe à fragmentation et à retardement
©BERTRAND GUAY / AFP

"Etat de mort cérébrale"

Emmanuel Macron, après ses propos sur l'Otan dans The Economsit, va s'entretenir avec les présidents turc et américain en compagnie d'Angela Merkel et de Boris Johnson mardi à Londres, avant le sommet majeur. Frédéric Lefebvre évoque le sujet de l'OTAN.

Au travers de l’OTAN, Donald Trump applique la stratégie de Steve Bannon : semer le désordre en Europe !

Le président des Etats-Unis n'a pas commis une «erreur» ou une « folie de plus » comme je l’entend si souvent en décidant de retirer ses troupes du nord-est de la Syrie. Il agit de manière délibérée, en ayant soupesé les avantages en termes de calendrier politique et en termes de stratégie géopolitique, d’une décision qui est dans la droite ligne de sa stratégie isolationniste et de son esprit belliqueux avec l’Europe à qui il a déclaré la guerre économique.
Cessons d’être naïfs...

Depuis des mois il a démontré son intention de mettre à exécution sa volonté initiale de se désengager de la région. Certains pensent qu’il ne mesure pas les conséquences de son acte. Bien au contraire. Il agit par calcul.

Le 6 octobre restera comme le déclenchement de son plan machiavélique au travers du feu vert donné au président turc Recep Tayyip Erdoğan, de franchir la frontière syrienne et d’éradiquer les Kurdes : « La Turquie va bientôt mettre en œuvre son opération prévue de longue date dans le nord de la Syrie. Les forces armées des États-Unis ne soutiendront pas cette opération et n'interviendront donc pas, et les forces américaines, après avoir vaincu le “Califat” territorial de l'EI, ne se tiendront plus dans les environs immédiats.»

En lâchant la bride à son partenaire historique dans l’OTAN, au détriment de ses alliés européens dans l‘alliance Atlantique, il met cyniquement fin à l'ordre planétaire post-Seconde Guerre mondiale, pour assouvir sa soif d’isoler les Etats-Unis d'Amérique du reste du monde.

Chacun de ses conseillers qui a osé se dresser face à cette stratégie, a été mis à l’écart; ce fut le cas de Jim Mattis, de Herbert Raymond McMaster, de John Bolton ou encore du général Joseph Dunford. La chambre des représentants qui condamne son attitude par un vote qui fera date, 129 républicains lâchant Trump et votant avec les démocrates, le fera entrer en rogne sans pour autant le détourner de ce chemin délétère. Tout au plus fera-t-il un crochet pour calmer les esprits.

Que le calcul de Trump soit irresponsable est un fait. Qu’il soit le fruit de je ne sais quel coup de sang est une bien crédule pensée.

Pour se disculper de toute responsabilité au plan international dans ce qui s’annonçait comme un génocide passible d’une procédure devant la CPI, il brandit ensuite la menace de sanctions économiques contre la Turquie. Le mal était fait. Et il le savait. Comme il savait qu’Erdogan avec qui il est dans la duplicité n’en avait que faire.

Les terroristes de Daesh se sont retrouvés dans la nature. Ceux capturés par Erdogan sont distillés dans les démocraties européennes à coup de retours annoncés bruyamment, sur le ton de la menace, par un membre éminent de l’OTAN, sur lequel le président Trump ne tarit pas d’éloges.

Peu lui en importe, pire tant mieux pour nourrir ses noires arrières pensées. Ils iront semer la haine et la discorde en Europe comme il le verbalise d’ailleurs publiquement en répondant à un journaliste qui lui pose la question :
«Ils vont s'échapper en Europe, c'est là qu'ils veulent aller, ils veulent rentrer chez eux.»

Donald Trump qui sait parfaitement qu’ Erdogan use de la menace permanente d’islamiser l’Europe, entend par son geste irresponsable et inhumain, participer à la déstabilisation de notre continent. Il n’a cure de l’anéantissement de l’effort de son armée depuis 5 ans dans la région menaçant les combattants Kurdes , gardiens de plusieurs camps de détention avec des milliers de djihadistes de Daesh. Impossible pour eux d’assumer cette mission au service de la coalition comme ils le font depuis des années, tout en combattant les forces turques qui les agressent aujourd’hui.

On parle de plusieurs centaines de prisonniers dispersés dans la nature par la faute de ce lâchage américain.

Le plan sournois se déroule au mieux. D’autant que le timing est parfait pour permettre au président américain. de faire passer au second plan l’enquête des démocrates qui solidifient chaque jour un peu plus la procédure de destitution qu’ils ont engagée contre lui. Il sait que la procédure n’ira pas au bout, ayant l’assurance du Sénat et que c’est une bataille d’opinion. Détourner l’attention suffira.

Feindre un désaccord avec la Russie ne peut d’ailleurs que servir cet objectif conjoncturel, sa relation avec Poutine étant l’un des marqueurs de ce que lui reprochent ses opposants. Il n’a donc vu aucun inconvénient à voir les Russes se déployer à la frontière Syro-turque.

5 jours à peine après avoir livré nos alliés kurdes à la Turquie et par voie de conséquence céder la Syrie à l’alliance entre Bachar el-Assad et les Russes, Donald Trump envoyait 2000 soldats de plus en Arabie Saoudite, en pleine tension avec l’Iran. Il niait toute contradiction et soulignait bravache que l’Arabie Saoudite payait ainsi son tribut.

Une incohérence de plus ? Bien au contraire. Il trace son chemin.

L’OTAN, n’en déplaise à son secrétaire général Jean Stotenberg, ressemble à un canard sans tête, qui navigue de contradictions en contradictions, obéissant aux injonctions américaines en s’asseyant sur la solidarité entre alliés, célébrées dans un article 5 qui se retrouve vidé de son sens.

L’armée américaine est devenue un corps de mercenaire au service des plus offrants, au gré de ses intérêts à court terme, en lieu et place d’une armée au côtés de ses alliés de toujours.

Georges Washington doit se retourner dans sa tombe...

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