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Afrique - France, une histoire à conjuguer au passé ou un avenir à réécrire d’urgence ?
©ludovic MARIN / AFP / POOL

Les entrepreneurs parlent aux Français

La ville de Bordeaux va accueillir le sommet Afrique - France 2020 du 4 au 6 juin, l'an prochain. La manifestation sera notamment consacrée aux villes et aux territoires durables.

Denis Jacquet

Denis Jacquet

Denis Jacquet est fondateur du Day One Movement. Il a publié Covid: le début de la peur, la fin d'une démocratie aux éditions Eyrolles.  

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Dans un peu moins de 8 mois, le sommet de Bordeaux voulu par le président de la république aura lieu à Bordeaux. L’ivresse du sommet ?!! Les adeptes de mauvais jeux de mots diront, « je chais, je chais »… 

Ce sommet sera marqué par une volonté affichée de mettre les entreprises sur le devant de la scène. Assez rare, pour être remarqué, mais un peu tôt pour savoir si cela sera remarquable. Sur le papier, il y a un changement de ton et de méthode. De personne aussi. C’est totalement positif de ce point de vue. 

Changement de ton et de méthode ? L’État ne peut pas tout, il est incapable de développer des projets seuls, et même parfois accompagné. L’État n’est pas et ne sera jamais, une entreprise, dont la démarche est dictée par l’efficacité. Et le profit. Qui n’aime pas l’argent gaspillé. Il est rare d’entendre cela. Enfin également, on cesse de conjuguer économie et grande entreprise à l’obligatoire du subjonctif, pour mettre les PME et les start-up, les innovateurs, au centre du même sommet (cherchez la formule mathématique correspondante, vous avez 2 heures). Les grandes ? Oui, toujours, mais elles perdent pied. Mais plus seules, donc, car seule l’innovation nous permettra de damer le pion aux Chinois. Or l’innovation vient des « bébés start-up », pas des grandes machine à éliminer le risque. Mais leur impact massif n’est possible qu’avec les grandes, qui sont en place et connaissent les rouages.

Changement de personne ? Stéphanie Rivoual est à la manœuvre. Une force de la nature, non engluée dans la boueuse France-Afrique, qui a contrairement à ce que nous pensons, avait ses avantages, et nous assurait une place que nous avons perdu, faute de savoir lui donner un coup de jeune. Qui avait donc besoin de sang neuf. Stéphanie est une femme courageuse, visionnaire, empathique, qui assume sa tâche et fera en 2 ans ce que jamais Ségolène Royale, pourtant bien mieux (trop) payée ne fera jamais, sur l’antarctique, dont elle n’a toujours pas foulé le sol. Elle avale les kms et les décalages horaires avec le même sourire, traquant les femmes d’Afrique, leur talent et leur détermination, et les innovations, celles dont je rêve personnellement, car elles sont le terreau de cette formule magique, qui pourrait transformer notre relation moribonde en un élan de croissance pour les 2 partenaires. Ce que l’Afrique n’a jamais obtenu avant et que la France (l’Europe) ne trouvera, nulle part ailleurs. La femme et l’Afrique sont les clés de notre avenir, et notre avenir dépend de notre capacité à le réaliser et en financer et accompagner la réalisation.

Si je m’arrêtais là, je serais un béat bien niais, à défaut d’être bien né. Malheureusement, le match va être complexe. Car d’autres, plus gourmands, réalistes et puissants, avancent, et pas seulement en Afrique francophone. La Russie, vient de faire une opération charme et finance, projets à la clés, financements bien calés, dans les canons de la beauté économique. Ils sont tous venus, ils étaient tous là, non pour la Mama, mais pour le Papa Poutine, qui pouvait être fier d’avoir damé le pion à bien des prétendants, qui se retrouvent aujourd’hui sans fiancée. Cela pourrait être notre cas. Poutine va s’occuper du Sahel, alors que nous avons stoppé notre action après avoir écrasé une malheureuse poignée de djihadistes. Cet acte sympathique, qui semblait uniquement destiné à donner de François Hollande l’image d’un homme finalement capable de faire preuve de poigne et de capacité de décision, mais qui, épuisé par cet effort contre-nature, retomba aussi vite, le lendemain de ce fait unique dans sa Présidence. Depuis le Burkina, le sud Mali, s’enfoncent un peu plus chaque jour. Un attentat a encore eu lieu à moins de 40kms de Ouaga, la semaine passée. Pitoyable. Poutine risque de laver plus propre, plus vite et gagner les marchés du Burkina et du Mali, plus vite que nous. Il va falloir nous réveiller. Le Sahel, c’est bien d’en parler, c’est mieux de le reconquérir, au profit des Africains. Tout cela masque assez mal l’islamisation de l’Afrique. Prenons-nous conscience qu’il y a encore 30 ans, le Sénégal ou la Côte d’Ivoire étaient majoritairement Chrétien ? C’est l’inverse aujourd’hui… Là aussi, comme en France, nous avons cédé le terrain. Si c’était simplement la perte d’une religion pour une autre, ce ne serait pas si grave. Le problème, c’est que c’est une version dure de l’islam qui l’emporte de plus en plus fortement. Et nous le paierons. Nous ne pourrons rebondir ensemble, si nos valeurs sont « crevées », à plat. Les Africains avaient une tradition animiste qui les sauve encore, mais pour combien de temps ?

Et puis il y a la Chine. Fidèle à sa méthode, on déploie le rouleau compresseur, on paie qui on doit payer, et on enrichit la Chine et personne d’autre. Les marchés sont financés, contre concession de long terme. Les infrastructures sont construites par des prisonniers Chinois, qui retrouvent leur liberté contre leur sueur. Les matériaux et matériels et machines viennent de Chine. La Chine gagne tout. L’Afrique hérite de routes et édifices prêts à craquer à la première pluie violente ou premier coup de vent venu. Triste. Mais cela marche ainsi. Nous payons nous aussi des bakchichs, malgré la politique du « tout propre » affichée. L’affaire de Suez au Sénégal le prouve encore récemment. Mais nous n’avons pas les moyens. Nous avons délaissé les métaux rares, les mines, qui meurent de solitude, alors qu’elles s’exhibent à ciel ouvert. La Chine et la Russie désormais, vont s’en emparer. La crise arrivant, l’or sera plus que jamais une valeur refuge, et nous, nous n’aurons que nos tamis vides, pour pleurer notre aveuglement. Le moyen orient investit via le Maroc, qui lui sert de couverture. France, Europe, sont présents dans les conférences, mais les conférences ne paient pas les factures, ni ne réparent les fractures. Alors que nous pourrions être les seuls à pouvoir offrir une croissance économique, qui répartisse mieux les richesses d’une Afrique qui meurt de l’enrichissement des politiques, qui crachent sur leur peuple et n’y investissent même pas.

Alors en Juin à Bordeaux, il y aura du boulot. Mais je veux faire confiance. Car la volonté est là, et si on lâche les vannes de l’investissement et que l’on fait plus confiance aux entreprises, on part déjà d’un bon pied. Si l’État est prêt à huiler le terrain comme le corps du culturiste avant l’effort, nous pouvons peut-être briller à nouveau. Il nous faudrait une attitude moins intellectuelle et plus pragmatique, au service de valeurs. Pas facile, mais jouable, car assis sur la volonté et l’attente des peuples d’Afrique. Nous sommes prêts, nous, entrepreneurs à donner sa chance au produit. C’est un beau produit, garant d’un bel avenir pour tous. Si peu de choses en si peu de temps, mais nous savons rattraper quand nous le décidons. En avant toute !

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