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BellamyBashing : les convictions chrétiennes sont-elles devenues les seules à ne plus avoir droit de cité en France ?
©Reuters

Liberté d’opinion en danger

Suite à la désignation de François-Xavier Bellamy en tête de liste LR des prochaines élections européennes, les réseaux sociaux ont exhumé certains de ses propos tenus lors d'un colloque "catholiques en action" qui se tenait en 2014 à Paris, afin de le discréditer.

Bertrand Vergely

Bertrand Vergely

Bertrand Vergely est philosophe et théologien.

Il est l'auteur de plusieurs livres dont La Mort interdite (J.-C. Lattès, 2001) ou Une vie pour se mettre au monde (Carnet Nord, 2010), La tentation de l'Homme-Dieu (Le Passeur Editeur, 2015).

 

 

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Atlantico: Dans ces propos, tenus en 2014 lors d'une conférence d'un institut catholique traditionnaliste, François-Xavier Bellamy déclarait :"Il n’y a qu’une seule bonne raison de croire au Christ, et cette seule raison c’est la certitude que le christianisme dit la vérité. Comment expliquer que le catholicisme, le christianisme soient devenus pratiquement "inacceptables" dans le débat public ?

Bertrand Vergely. Dans l’attaque dont François-Xavier Bellamy est l’objet, il importe de distinguer sa position personnelle, l’attitude des réseaux sociaux et l’attitude à l’égard  du christianisme et du catholicisme dans le monde d’aujourd’hui.

 S’agissant de la position de François-Xavier Bellamy, celle-ci est tout à fait cohérente. Amené à expliquer les raisons pour lesquelles il croit au Christ, celui-ci indique qu’il y croit parce que le Christ dit la vérité. Quand on adhère à une sagesse, une religion, une philosophie, un idéal politique, on y adhère parce qu’on les croit vrais. En énonçant que les raisons de sa foi sont basées sur la vérité, François-Xavier Bellamy ne fait que dire ce que dit tout esprit doté de bon sens quand il s’agit d’expliquer les raisons d’un engagement.

De ce point de vue, l’attaque dont il est l’objet est délirante. François-Xavier Bellamy aurait dit qu’il croit au Christ parce que le christianisme est la seule religion vraie et toutes les autres sont dans l’erreur, il aurait été normal que ces propos suscitent un tollé. Mais, écoutons bien ses propos : ce n’est pas ce qu’il dit. Quand il parle de la vérité du christianisme, il s’agit pour lui d’éclairer les raisons de sa foi, nullement de juger les autres religions.  

Or, c’est ainsi qu’il est entendu et compris. Parce qu’il a dit que, selon lui, le christianisme dit la vérité, on fait de ce propos une attaque en règle contre les autres religions et les autres façons de voir le monde. Et, derrière cette confusion mensongère et pleine de mauvaise foi, on veut faire de François-Xavier Bellamy un fanatique.

 Il aurait dit que le christianisme est une religion fausse, pleine de mensonges et néfaste, ses propos auraient été jugés remarquables et il aurait eu la faveur des medias comme des réseaux sociaux. Le fait de dire que le christianisme n’est pas un mensonge apparaît comme inadmissible.

 Michel Onfray n’arrête pas e dire à longueurs d’émissions combien le christianisme est néfaste et combien il est un mensonge. Il ne suscite aucun tollé. Au contraire. Les medias lui ouvrent largement les portes. Une voix s’élève et  ose parler du christianisme en bien. Elle représente un danger pour la laïcité, la liberté de conscience, la bonne marche de l’esprit et on les lui ferme.

 Ce procès qui lui est intenté n’est pas un hasard. Il s’avère qu’il est contre le mariage pour tous et contre l’avortement. Il y a des raisons d’être contre. Comme les réseaux sociaux ne veulent pas en entendre parler, comme ils ne veulent pas discuter parce qu’ils manquent d’arguments, pour éviter toute discussion, toute confrontation d’idées ainsi que d’arguments, ils ont recours  au procédé consistant à dire : vous êtes catholique. Sous entendu : vous n’êtes pas contre le mariage pour tous et contre l’avortement parce que vous avez des arguments ainsi qu’une pensée. Vous êtes contre parce que vous êtes catholique. Vous êtes influencés par le catholicisme qui a toujours été conservateur et réactionnaire.

Quand on lit Gobineau, le théoricien de l’inégalité des races, on découvre que, pour lui, la vertu est une question de naissance. Si on est moral, c’est que l’on est bien né. Constatons le : ce même procédé est utilisé à l’égard des catholiques et des chrétiens. Si l’on pense mal, (mal penser consistant à être contre le mariage pour tous et contre l’avortement), c’est que l’on est catholique. On est mal né. Et, étant mal né, on est un sous-esprit. On est quelqu’un qui n’est pas digne qu’on lui adresse la parole et que l’on discute avec lui. François-Xavier Bellamy est victime de ce qu’il convient d’appeler un racisme idéologique anticatholique et antichrétien. Être catholique, être chrétien, c’est de l’ordre du nauséabond, de l’infâme.

 Cela remonte à la Révolution Française. Lors de cette dernière, des milliers de nobles et de prêtres ont été guillotinés. Il s’agissait alors  de mettre à bas le tyran et le catholicisme était considéré comme le suppôt de la tyrannie. Cette haine anticatholique, antichrétienne et anticléricale n’a pas quitté la société française. Elle fait partie de sa mémoire. Elle est constitutive de son ADN, de sa programmation. René Girard a fort bien expliqué que les sociétés ont tendance à se structurer contre un bouc émissaire. La société française a tendance à se structurer contre la religion, le christianisme et le catholicisme, accusés d’être responsables de tous les maux. Il est fâcheux pour la démocratie qu’il en soit ainsi.  

Le christianisme dit la vérité et c’est la raison pour laquelle cela vaut la peine d’y croire, explique François-Xavier Bellamy. Il a raison. Le christianisme dit effectivement la vérité parce que la vérité qu’il énonce n’est pas chrétienne. C’est la vérité de la vie. La vie est reliée à une source ineffable et toute l’humanité est appelée à communier avec cette source. Il s’agit là de la nouvelle la plus extraordinaire, la plus révolutionnaire, la plus progressiste, la plus démocratique, la plus humaine qui ait jamais été dite. Alain Badiou, penseur communiste, donc athée, le reconnaît lui-même. L’universalité naît avec la Pentecôte et saint Paul. Elle naît quand il est dit que dans la résurrection il n’y a plus ni maîtres ni esclaves, ni juifs ni grecs. Elle naît quand il est dit que l’humanité est amenée à vivre cet avenir.

Le christianisme dérange, le Christ dérange, parce que l’on ne supporte pas l’idée que la véritable démocratie et la véritable humanité a des racines célestes et pas simplement terrestres et humaines. La véritable démocratie, la véritable universalité demande que l’on se débarrasse de toute haine. Il s’avère que l’on ne veut pas s’en débarrasser. On veut pouvoir haïr, être contre, faire couler le sang. Les violences qui ont lieu maintenant depuis près de trois mois tous les Samedis le montrent. Ce que l’on ne pardonne pas au christianisme c’est d’être la contestation la plus radicale qui soit de la violence et notamment de la violence qui sévit tragiquement dans l’avortement et sournoisement dans le mariage pour tous. D’où le côté inacceptable du christianisme dans un monde séduit voire hanté par la violence.

Lors de la campagne pour les primaires LR, Alain Juppé avait mis en cause son rival François Fillon sur la question de l'avortement. Une sortie  provoquant la colère de ce dernier, qui avait répondu : "Si j'avais été député, j'aurais voté le texte sur l'interruption de grossesse de Simone Veil. (...) Je sais faire la différence entre mes convictions personnelles, ma foi, et le bien public". Dans la société actuelle; comment expliquer cette incapacité du débat public à faire cette différence, ou cette incapacité à voir que ces convictions personnellesne sont pas imposées politiquement

François Fillon explique qu’il sait faire la différence entre convictions personnelles et sens du bien public. Quand François-Xavier Bellamy s’exprime, il va dans le même sens. Il  n’a nullement l’intention d’être intrusif et tyrannique avec sa foi, le sens de l’intérêt commun passant pour lui d’abord. Or, dans le procès qui lui est fait, ses adversaires supposent que, puisqu’il est catholique, il ne sera pas capable de faire la différence entre ses convictions et le sens de l’intérêt commun. Il sera partial, manipulateur, menteur, corrompu. Ainsi, quand on est chrétien et catholique, non seulement on n’est pas capable de penser et d’avoir du jugement, mais, en plus, on n’est pas capable de vérité, d’authenticité, de morale.

La société médiatique et culturelle accepte que l’on ait des convictions. À condition qu’elles ne sont pas chrétiennes.  On peut parfaitement dire que l’on est bouddhiste et que l’on a le sens de l’intérêt commun. Cela passe. Et même, c’est bien vu. On peut se dire musulman. Cela passe aussi. On sera accepté au nom de l’antiracisme. Vous dites que vous êtes chrétien ? Les visages se ferment. On commence à tousser. Vous fâchez. En ce sens, oui, il n’est pas possible d’avoir des convictions et le sens de l’intérêt commun. Cela vaut avant tout pour les chrétiens. Ce sont eux qui sons suspects, avoir la foi rendant incapable non seulement de réflexion critique mais d’impartialité.

Il y a du racisme, à l’égard des chrétiens, a-t-il été dit. Il y a aussi des réflexes totalitaires contre le christianisme. Dans 1984 de George Orwell, il est interdit aux citoyens de la société idéale qui est mise en scène d’avoir une pensée propre.  Dans l’attitude antichrétienne il en va de même. Comme la société décrite par Orwell, celle-ci interdit d’avoir une pensée propre, une foi propre, une conviction propre.

Ce qui est beau dans cette affaire, c’est qu’il y ait des esprits courageux pour ne pas se laisser impressionner en osant dire qu’ils ont la foi, que le christianisme est porteur de grande vérité et d’avoir le sens de l’intérêt commun. Tant il est vrai que tous ces crachats projetés sur de tels esprits ne sont que des enfantillages qui déshonorent avant tout ceux qui les lancent.



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