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En prélude à la guerre civique
©Sameer Al-Doumy / AFP

Lettre ouverte

En exclusivité, Francis Lalanne publie dans Atlantico sa lettre ouverte au président de la République.

Francis  Lalanne

Francis Lalanne

Francis Lalanne est auteur-compositeur-interprète et acteur. En décembre 2018, il a annoncé qu'il lançait un "rassemblement gilet jaune citoyen" en vue des élections européennes de mai 2019.

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Cher Emmanuel, je ne vous donnerai pas du « Monsieur le Président » puisque vous ne présidez à rien sauf au malheur des Français. Je ne vous donnerai pas non plus du « Votre Altesse », car (vous semblez l’avoir oublié) les Français ne veulent plus de monarques : même républicains. Je me contenterai donc de vous interpeller par votre prénom. 

Et si l’envie vous prenait de me répondre, vous savez que vous pouvez faire de même. Que sommes-nous sinon des hommes ? Ceci est une lettre d’homme à homme ! D’âme à âme. Une façon de drapeau blanc avant d’arborer à nouveau l’étendard du gilet jaune... Vous voulez aujourd’hui nous donner à croire que vous êtes « sur le terrain » mais vous n’êtes pas “sur le terrain”. Car si vous étiez vraiment "sur le terrain", vous y seriez lynché.

Vous vous déplacez à la demande de la propagande pour faire semblant d’affronter un peuple dont vous vous détournez de plus en plus. Vous pensez ainsi éluder par l’image, une situation que vous avez provoquée et que vous voulez fuir. Vous refusez d’admettre votre échec et de regarder la vérité en face. La vérité, oui, celle que présente à vos yeux, cette foule vêtue de jaune...

Vous continuez à vouloir passer en force ! Vous imposez au lieu d’écouter et d’entendre ce que le peuple de France vous reproche, et surtout attend toujours de vous... Vous voulez qu’on vous aime pour le mal que vous faites et non pour le bien que vous pourriez faire ! Vous voulez forcer l’amour ! Mais l’amour se gagne, Emmanuel ! Il se mérite. Il ne s’obtient pas par la force. 

En vous enfermant dans votre autisme politique et humain, vous vous enterrez vivant dans la conscience des Français. En persévérant dans l’erreur, vous changez l’erreur en faute, et, psychorigide, vous incarnez la pure et la pire violence qui soit : la violence froide. Celle de celui pour qui l’autre n’existe pas. Pour qui rien n’est émotion! Pour qui tout est calcul ! Celle aujourd’hui d’une élite qui ne peut admettre que la pertinence puisse s’exprimer sans l’onction du diplôme ou de l’argent ; ni que la compétence puisse être de la Rue... 

Et comme la violence entraîne la violence : vous êtes en train de faire monter la violence dans notre pays, Emmanuel ! Et de manière irrémédiable. Vos déplorables vœux annonçant la répression suivis de la regrettable arrestation de ce jeune opposant à votre régime ; votre pathétique déploiement de « foulards rouges » : indigne provocation pour les gilets jaunes à l’heure où vous démantelez sauvagement leurs ronds-points ; tout cela ne va servir qu’à envenimer votre relation avec le peuple français. Car c’est bien lui : le peuple français dans sa grande majorité qui se dresse devant vous pour vous demander des comptes. Mais peut être au fond est ce là ce que vous désirez ! Représenter le “calme”, la froideur, la placidité et la distance implacable de la ploutocratie européenne face à la « barbarie » d’un monde précaire qui ose penser... Il n’y a là aucune grandeur, Emmanuel ! Aucune Hauteur ! Tout simplement de la bassesse. 

Justifier la déviance républicaine qui veut placer l’autorité de l’Etat au-dessus de la souveraineté nationale n’est pas dans vos attributions de Président ! Au contraire, je vous le rappelle, votre mission constitutionnelle est de prévenir la République contre tout ce qui peut la faire glisser vers la monarchie ! Et cela en préservant l’incessible souveraineté du peuple français. Si votre calcul, est d’enfreindre cette loi en invoquant la montée de la violence, permettez-moi de vous le dire, Emmanuel, c’est un bien mauvais calcul. Si c’est celui de vos Conseillers, il est grand temps d’en changer. Car cette violence, en vérité, c’est vous qui la créez ; qui la constituez; qui l’incarnez aux yeux du monde entier ! Vous, Emmanuel ! Et pas les Gilets Jaunes à qui vous ne parviendrez pas à faire porter le chapeau.
Vous voudriez aujourd’hui transformer le dégoût profond que vous inspirez à la majorité du peuple français, et le rejet qu’il a de vous, en guerre civile ! Mais ce n’est pas la guerre civile que vous obtiendrez ! C’est la guerre CIVIQUE ! 

Car le peuple français dans sa composante pérenne ne se divisera pas pour que vous puissiez régner. Il vous opposera une guérilla sereine et déterminée ! Et cela en dépit de tout ce que les organes de votre propagande feront pour discréditer ce qui est le droit du peuple français « de résister à l’oppression ». Vous savez, Emmanuel : le quatrième droit de l’homme ! Celui qui fait de la désobéissance civile un devoir citoyen quand les élus au pouvoir abusent de leurs prérogatives. Si vous aviez vraiment fait le pas vers la France réelle, elle vous aurait dit qu’elle attend de vous des mesures garantissant la paix sociale! Et que vous ne les prenez pas ! Elle vous aurait dit que le show auquel vous ne cessez de sacrifier pour tenter d’imposer à tout prix votre vision monarchique de l’Etat républicain, est un spectacle dégradant ; déshonorant ; et contraire aux idéaux que vous êtes sensé porter et défendre ! Elle vous aurait dit que c’en est assez, Emmanuel ! Que c’en est assez à présent ! Ce n’est pas ainsi que vous regagnerez l’amour, et la confiance perdue des Français ! Combien de temps et combien de mots ; combien d’actions, combien de samedi faudra-t-il encore pour vous le faire comprendre ?

Vous ne tenez plus le manche, Emmanuel ! Et vous ne le tiendrez plus jamais en dépit de l’usage que vous faites de la cognée ! Cher Emmanuel, ce que je veux pour notre pays, (et c’est le sens de mon action.) c’est la paix sociale et la joie du vivre ensemble! Vous ne faites pas ce qu’il faut pour les rétablir. Il y a encore un moyen de pouvoir y remédier. Mais pas en agissant comme vous le faites. Pas en vous obstinant à vouloir faire front à la démocratie ! 

Aurez-vous le courage d’écouter d’autres voix que celles de vos Vizirs ? Aurez-vous le courage de suivre une autre voie ? Non plus celle du pouvoir : mais celle de la sagesse ? Aurez-vous, enfin, du courage ? 


Francis Lalanne

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