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Cette police communautaire qui tente de faire taire les Musulmans français critiques
©MOHAMMED ABED / AFP

Francophobie

Eclairage sur cette "police communautaire" qui insulte sans cesse les Françaises et Français musulmans qui assument leur francité ou posent un regard critique sur l'islam. Derrière, se cache un sentiment profond : la francophobie.

Malik Bezouh

Malik Bezouh

Malik Bezouh est président de l'association Mémoire et Renaissance, qui travaille à une meilleure connaissance de l'histoire de France à des fins intégrationnistes. Il est l'auteur des livres Crise de la conscience arabo-musulmane, pour la Fondation pour l'innovation politique (Fondapol),  France-Islam le choc des préjugés (éditions Plon) et Je vais dire à tout le monde que tu es juif (Jourdan éditions, 2021). Physicien de formation, Malik Bezouh est un spécialiste de la question de l'islam de France, de ses représentations sociales dans la société française et des processus historiques à l’origine de l’émergence de l’islamisme.

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« Traitre », « vendu », « pute des français », « chienne », « sale harki »… Ce n'est là qu'une infime partie du chapelet d'injures que des individus égrènent à longueur de temps dans les réseaux sociaux. Leurs victimes : tout citoyen français de culture ou de confession musulmane dont la pensée est jugée non conforme à la bien-pensance islamo-communautaire. Confortablement installés derrière leur écran d'ordinateur ou de téléphone, ils s'évertuent à assassiner symboliquement ces penseurs, hommes et femmes, qui osent poser un regard critique sur la religion musulmane. De fait, ils se sont constitués en une terrifiante "police communautaire" dont la violence verbale reflète une sinistre réalité : la haine sourde, invétérée, implacable, de la France…

Il est vrai que certains propos émis par telles ou telles personnalités de culture ou de confession musulmane peuvent être de nature à susciter des controverses tant, parfois, lesdites personnalités, incapables de cerner la complexité du réel, pèchent, trop souvent hélas, par un manque cruel de réflexion et d'analyse contextualisée. Ainsi, la thèse de la militante Zineb el Rhazoui, développée sur la chaîne d'information CNEWS, il y a peu, et selon laquelle les menaces de mort relèvent d'« une stratégie islamiste » dont l'objectif est de « faire taire toutes les voix critiques pour pouvoir islamiser la société en toute quiétude », est de toute évidence une vue excessive et simpliste du monde réel. Insistons cependant sur le fait, et c'est fondamental, que cette femme a été maintes fois menacée de mort par la "police communautaire". Il nous faut donc la soutenir, sans ambages, au-delà des désaccords que l'on peut légitimement avoir avec quelques-unes de ses positions.

Cela étant dit, et c'est tout le sens de cet écrit, il est important de comprendre, que la "police communautaire" ne puise pas sa détestation de la France uniquement dans une lecture salafisante des sources canoniques de l'islam. Tant s'en faut ! Et pour cause ! Cette police, usant allègrement de la terreur intellectuelle comme d'un outil pervers de dissuasion, n'est autre que l'hydre de la francophobie. Un sentiment qui peut être sans lien aucun avec l'islam, Dieu et les Textes sacrés. Les dérives indigénistes, victimaires, mais aussi l'essentialisation de l'histoire de France dont on ne retient que les aspects les plus sombres, etc., sont autant d'éléments contribuant à développer la francophobie dans les cœurs de certains français originaires des anciennes colonies. Fragilisés par une fracture identitaire interne qui peine à se réduire sous le poids des discours peu constructifs, voire stigmatisants, des jeunes gens basculent alors dans l'identitarisme "musulman". Dès lors, la France devient cet exutoire dans lequel s'épanchent leurs frustrations, leur mal-être, leurs ressentiments. Avec d'autres, ceux-là même qui sont portés par des motivations à caractère religieux, ils forment cette inquiétante « police communautaire » qui commande le « Bien » et poursuit le « Mal », à l'instar de l'horrifique police religieuse sévissant en Arabie saoudite. Par suite, ces françaises et français de culture ou de confession musulmane qui font preuve, par leurs déclarations, leurs écrits, tantôt d'un amour charnel pour la France, tantôt d'un esprit critique vis-à-vis de l'islam, se voient aussitôt fustigés, calomniés, invectivés, outragés de la pire des façons, etc.  

La fréquence et la violence des vociférations poussées par les petits agents auto-assermentés de la "police communautaire", via les réseaux sociaux, sont de bons indicateurs permettant d'attester, en effet, de la prégnance du communautarisme ethno-musulman. Insistons, au risque de nous répéter, que cette haine charriée par la "police communautaire" a au moins deux composantes. L'une religieuse, évidente ; l'autre ethno-identitaire, dépourvue de réels fondements islamiques. Les insultes, pléthoriques, du type « Arabe de service », « sale bledarde », « chien des français », etc., témoignent de cette haine "laïque", si je puis dire, de la France. Une haine d'autant plus tenace qu'elle est, en partie, irrationnelle car basée sur des préjugés aggravés par une profonde méconnaissance de l'histoire, complexe et nuancée, de notre pays.

Ce constat établi, il est bon de rappeler que la "police communautaire", pathologie lourde de l'intégration, est cette funeste force qui, vaille que vaille, tente d'empêcher les français musulmans de s'émanciper et, partant, de sortir de la citadelle ethno-communautaire qu'elle s'acharne à renforcer chaque jour que Dieu fait. Pour ce faire, elle essaie, au-delà du terrorisme intellectuel et de la peur, ses armes de prédilection, de distiller des sentiments de culpabilité chez les individus en les assimilant à des « traitres » ; un qualificatif récurrent lorsque l'on scrute le vocable des inquisiteurs ethno-communautaires.

Aujourd'hui, quatre sources apportent, indirectement, leur écot, par leurs éléments de langage, à la consolidation de cette "police communautaire". En premier lieu, les apôtres de la théologie indigéniste racialisant dangereusement la parole publique. Ensuite, les tenants de la posture abusivement victimaires, vitupérant, avec emphase, un État français conduisant une politique prétendument « néocoloniale » et « raciste », et ce de temps immémorial. Troisième groupe : la mouvance islamo-contestataire fulminant sans relâche, et avec un manque criant de recul, contre l'islamophobie. Non pas que celle-ci soit une vue de l'esprit, évidement. Mais ne serait-il pas plus intéressant et surtout plus constructif de débattre sereinement des causes historiques sous-tendant, en France, en effet, cette suspicion vis-à-vis de la religion musulmane ? Enfin, le wahhâbo-salafisme produisant de l'islamopathie virulente, une névrose intégriste, fruit du rapport éminemment conflictuel entre les fortes exigences religieuses wahhâbo-salafistes et le mode de vie occidental libéral et permissif.

Ainsi donc, derrière cette "police" du communautairement-correct se cachent des françaises et des français, minoritaires mais actifs, trouvant dans ses quatre sources différentes sèves permettant d'abreuver leur cœur de cette passion anti-française. Dieu merci, il n'existe aucune fatalité. Il ne tient qu'à nous d'assécher ces sources-là. Non par des envolées faciles, caricaturant les quartiers populaires, et qui de surcroit renforcent ce sentiment d'hostilité à l'égard de la France, mais par l'intelligence et le débat serein. Car la démagogie, d'où qu'elle vienne d'ailleurs, ne résiste que très rarement à une analyse sérieuse des faits. Si en plus, l'on n'y met quelques éléments de grandeur française, alors, oui tout est possible ! Car la France est ce pays, dont la richesse historique autant que culturelle, dépasse l'entendement. Le drame c'est que beaucoup l'ignorent. Y compris nombre de nos responsables politiques. Difficile dans ces conditions d'enchanter les discours publics. Est-ce à dire que la "police communautaire" a de beaux jours devant elle ? Non ; puisque de plus en plus de français musulmans, brisant la loi du silence, ont pris le parti de dénoncer cette réalité sous-estimée : la francophobie et son bras armé, la "police communautaire.

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