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Bons baisers (piquants) de Chine : et Pékin rappela au bon souvenir de l’Occident que Jack Ma, le fondateur d’Alibaba, reste un bon  communiste
©JORGE SILVA / POOL / AFP

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Le journal du parti chinois au pouvoir rappelle que le premier des capitalistes chinois n’est pas apolitique comme on pouvait le penser.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Jack Ma est connu sur la planète pour être le chinois le plus riche du monde. En moins de 15 ans, il a créé Alibaba, le premier site de E-commerce du monde. Alibaba, c’est 3 ou 4 fois Amazon avec une particularité. Alibaba ne se contente pas d’être un hyper marché en ligne, c’est aussi un outil très efficace pour faire du « sourcing » au bénéfice des Occidentaux. Quand une entreprise étrangère cherche un fournisseur ou un sous-traitant, elle peut s’adresser à Alibaba qui devient alors son intermédiaire ou son grossiste. 

La fortune personnelle de Jack Ma serait considérable puisque sa part dans Alibaba est évaluée à plus de 35 milliards de dollars. 

Il vient d’ailleurs d'annoncer son départ à la retraite en nommant dans la foulée son successeur.

Mais ce qui est intéressant, c’est que jusqu’alors, on ne savait pas quelles étaient les idées et les positions politiques de ce personnage, dont on pensait surtout qu’il était citoyen du monde, toujours en voyage entre New-York et Pékin. D’ailleurs, si on recherche ses affinités politiques dans le Google chinois, il n’y a pas de précisions. Tout cela était très flou.

Et bien depuis peu, c’est beaucoup plus clair. Dans un article publié par le journal du parti, et qui est destiné à remercier publiquement les 100 personnalités chinoises qui ont aidé la Chine à se réformer, on apprend que « Jack Ma, 54 ans, est un membre du parti communiste chinois ». 

Détail, diront certains ! Cette information a pourtant une importance non négligeable. L’information s’adresse à Jack Ma et signifie qu’une fois à la retraite, il a un devoir de fidélité au parti. Pas question de filer à Hong Kong ou à San Francisco comme l’ont fait certaines grosses fortunes chinoises ... Mais cette publication a visiblement un autre objectif qui est de signifier aux Occidentaux que la Chine a beau être devenu un acteur majeur de l’économie de marché, la Chine reste un acteur politique qui ne renie rien de ses valeurs et des origines. La Chine viendrait faire un bras d’honneur aux Occidentaux avec qui elle entretient désormais des rapports très tendus pour cause de Trump, qu’elle ne s’y prendrait pas autrement. 

La Chine est entrée dans le capitalisme mondial en 2001. Cette année-là, les Occidentaux accueillent la Chine à l'OMC, les Etats-Unis et l’Europe déploient le tapis rouge aux Chinois.

A Pékin, on ne se fait pas trop prier. L’objectif est désormais de permettre aux Chinois qui ont du talent de s’enrichir. Et les Chinois vont vite apprendre à s’enrichir. 

En Occident, on y voit deux avantages.

Le premier est de s‘ouvrir le marché chinois. Gigantesque. Cette perspective fait baver tous les capitalistes occidentaux. 

Le deuxième avantage est de penser qu'en s‘ouvrant à l'économie de marché, les Chinois vont progressivement adopter les valeurs en Occident ; celles qui pilonnent la liberté individuelle, la concurrence loyale, les droits de l’Homme, les normes sociales, une certaine morale des affaires et le respect de l’éthique

Sur ces deux points, les Occidentaux ont quand même été naïfs. Les Chinois ont certes signé les accords de l'OMC, mais ils n'ont guère ouvert leurs marchés aux entreprises occidentales ou alors sous contrôle étroit, ils n'ont guère appliqué les règles de réciprocité du capitalisme. Il est toujours difficile de s’installer en Chine, de faire des affaires en Chine  etc... Les Chinois ont surtout ouvert des usines, des ateliers de fabrication dans lesquels les millions de Chinois sont venus gagner un bol de riz par jour pour fabriquer des produits vendus dans les hyper marchés occidentaux. La mondialisation a donné du travail aux paysans chinois qui sont venus en ville attirés par les lumières de Shanghai ou de Chen zen, la mondialisation a permis au gouvernement chinois d’envoyer ses meilleures élèves se former aux technologies occidentales pour les copier le plus souvent et les rapatrier chez eux. 

Mais les Chinois n‘ont pas pour autant adopté certaines des valeurs occidentales. Pas même les règles comptables qu’on utilise en Occident. 

Le résultat de tout cela, c’est une mondialisation qui se révèle avoir plus profité aux pays émergents comme la Chine, qu’aux Occidentaux qui sont en souffrance pour cause de délocalisation. 

De là à penser que la puissance des courants populistes et des mouvements de protestation qui se déroulent partout en Occident ne serait que le résultat de l’erreur d’origine qui a poussé la Chine à la porte de l’OMC, il n’y a qu un pas que beaucoup d’observateurs franchissent. 

Les faits sont têtus. Les prescripteurs de l’OMC nous avaient prédit une mondialisation heureuse. Elle ne l’est pas tant que cela. Non pas à cause des multinationales américaines, mais plutôt à cause des entreprises chinoises qui ne jouent pas le même jeu. 

La confirmation que Jack Ma, l'homme le plus riche de Chine qui a fait sa fortune avec un site de e-commerce, un algorithme et des technologies importés de la Silicon Valley, la confirmation que Jack Ma est bien un membre du parti communiste montre à l’évidence que la Chine, même quand elle a formidablement réussi dans le jeu capitaliste, reste fidèle à ses valeurs.  

Son projet est bien politique et pour longtemps encore. 

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