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Le gouvernement ne parvient pas à parler la même langue que les Gilets Jaunes
©LUCAS BARIOULET / AFP

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Quand les Gilets Jaunes parlent pouvoir d'achat, Edouard Philippe leur répond transition énergétique. Il y a comme un problème de traduction, d'interprétation en tous cas entre les manifestants et l'exécutif....

Anita Hausser

Anita Hausser

Anita Hausser, journaliste, est éditorialiste à Atlantico, et offre à ses lecteurs un décryptage des coulisses de la politique française et internationale. Elle a notamment publié Sarkozy, itinéraire d'une ambition (Editions l'Archipel, 2003). Elle a également réalisé les documentaires Femme députée, un homme comme les autres ? (2014) et Bruno Le Maire, l'Affranchi (2015). 

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"Ce n'est pas quand ça souffle qu'il faut changer de cap" a déclaré Edouard Philippe hier soir sur France 2, excluant toute possibilité de renoncement à l'augmentation des taxes sur les produits pétroliers au 1er janvier.

Le Premier Ministre dit avoir suivi les évènements du week-end dans son bureau à Matignon, et il a eu beau "entendre la colère "qui s'est exprimée sur les routes de France , ce ne sont pas 300.000 Gilets Jaunes en colère qui manifestent à travers le pays pour réclamer une baisse des taxes sur le carburant (-mais pas seulement!), et une amélioration du pouvoir d'achat qui vont faire dévier l'exécutif de sa trajectoire vers la "transition énergétique". L'argument ne change pas : la pollution doit être davantage taxée que le travail. Difficile à traduire pour ceux qui doivent prendre leur voiture pour aller travailler.

Le mouvement des Gilets Jaunes ne seraient donc qu'un mauvais moment à passer, et Edouard Philippe voudrait pouvoir faire le dos rond en attendant la fin de la tempête, car, assure-t-il ça ira mieux ...à la fin du quinquennat . Il compte sur les effets des mesures d'accompagnement (chèque énergie pour les plus modestes, prime pour l'achat de voitures" propres") mises en place à la hâte il y a quelques jours, ce plan de 500 millions dont on n'aurait pas encore mesuré toute la portée. Dans son esprit, pourquoi, dans ce cas, répondre tout de suite favorablement aux appels au dialogue lancés par le leader de la CFDT Laurent Berger, ou par l'écologiste Daniel Cohn-Bendit (-généralement bienveillant à l'égard du pouvoir ), avec l' organisation d' une  conférence (-un Grenelle ?) afin de réussir la fameuse  transition énergétique? Y donner suite serait une forme de recul, ce serait mettre le doigt dans un engrenage qui le mènerait bien au delà du prix du gasoil .

Et pour  le Premier Ministre, 300.000 manifestants répartis dans  tout le pays ne sont pas comparables au million de protestataires contre la loi El Khomri  sur laquelle le gouvernement de Manuel Valls n'avait pas cédé. Arithmétiquement ce n'est pas incontestable. Politiquement cela reste à démontrer. Car, si le prix du carburant est "la goutte d'eau" qui a engendré  le mouvement, les motifs de protestation des Gilets Jaunes vont bien au delà, et ce ne sont pas uniquement " les gros rouleurs" qui ont formé les bataillons hétéroclites qui ont manifesté dans le désordre le week end dernier.

Edouard Philippe le sait bien, c'est pourquoi il a aussi évoqué la "souffrance" des Français, mais pour l'heure il fait mine de se concentrer sur le seul motif du carburant en promettant de " libérer de la contrainte du pétrole dans leur vie quotidienne ceux qui vivent à 50/60 kilomètres de leur lieu de travail". En s'exprimant sur France 2 hier soir, Edouard Philippe ne pouvait npas croire que son intervention mettrait pas fin au mouvement. Les manifestations du week end n'étaient qu'une première salve. Elles ont d'ailleurs repris ce matin sous forme de blocages divers. Les manifestants sont moins nombreux mais les entraves à la circulation sont importantes.

L'ampleur future du mouvement est imprévisible : il peut s'essouffler faute de leaders mais peut aussi grossir et connaitre d'autres dérapages tragiques, à l'image de la personne décédée ce week end. Le danger est d'autant plus grand qu'il n'y a pas de leaders, donc pas de mots d'ordre. Au delà ce ces manifestations, l'exécutif pourra prendre la mesure du mécontentement de ces classes moyennes périurbaines tout au long de la semaine puisque le Congrès des Maires de France  se réunit Porte de Versailles à Paris. Emmanuel Macron a décidé de ne pas s'y rendre mais de recevoir les édiles à l'Elysée. Edouard Philippe ira affronter la colère des élus qui se plaignent de la difficulté d'exercer leur mandat avec la baisse des dotations financières et  les "délires normatifs". Pas sûr qu'ils se contentent de paroles de compréhension ...

Mais peut-être n'ira-t-il pas les mains vides ..

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