Ces affaires ont eu une influence limitée sur la popularité de Nicolas Sarkozy au moment de leurs révélations, mais l'effet d'accumulation a conduit à plus long terme à un renforcement de l'anti-sarkozysme qui s'est exprimé au moment de la primaire.
Un mois après l'affaire Bygmalion, en mars 2014, Nicolas Sarkozy perd 6 points de bonnes opinions dans notre tableau de bord des personnalités réalisé avec Paris Match, mais revient dès le mois suivant à 50% d'adhésion. Surtout, la base des sympathisants UMP lui reste totalement fidèle : 90% d'entre eux ont une bonne opinion de l'ancien président en mars 2014 et il reste leur candidat favori pour la présidentielle de 2017 loin devant Alain Juppé. Comment expliquer cette résistance ? Concernant le grand public, il faut rappeler que, lorsque cette affaire éclate, Nicolas Sarkozy n'est plus au pouvoir et est donc légèrement moins au centre de l'attention. Surtout, il n'y a, a priori, pas eu d'enrichissement personnel. Ça change tout. François Fillon a beaucoup souffert des suspicions de détournement de fonds publics pour son propre bénéfice. On a retenu l'idée selon laquelle le présumé emploi fictif de sa femme lui avait permis de s'enrichir d'un million d'euros en quelques années avec l'argent des Français. Il y a un lien entre argent public et enrichissement personnel qui est insupportable aux yeux de l'opinion. C'est la même chose pour Jérôme Cahuzac, c'est de l'évasion fiscale pour pouvoir s'enrichir personnellement. Avec Nicolas Sarkozy, c'est différent. C'est, d'une certaine manière, « au service » d'une cause politique collective qui dépasse sa personne. Cet argument marche particulièrement bien auprès des sympathisants UMP fidèles à l'ancien président. Une part d'entre eux adhère aux discours à tonalité complotiste, selon laquelle des juges politisés harcèlent Nicolas Sarkozy. Une autre partie se dit : au fond il a fait ça pour gagner, pour appliquer notre programme. Il s'est passé la même chose pour François Fillon pendant la campagne. Une partie des électeurs LR a adhéré à l'idée d'un complot des juges, une autre s'est dit : « il y a une affaire, mais au final, je veux que ce soit son programme qui soit appliqué ». Ils y sont peut-être allés en se pinçant le nez mais ils ont hiérarchisé leurs priorités. Et pour Nicolas Sarkozy, il s'est passé la même chose. Une bonne illustration de cette logique c'est le Sarkothon lancé pour renflouer le parti après les dépassements de plafonds de la campagne en 2012. Ce dépassement, c'est quelque chose d'illégal et pourtant il y a eu un engouement phénoménal et la dette a été remboursée en quelques semaines.
Bien entendu, la primaire de 2016 a prouvé que ces affaires n'ont pas été sans conséquences. Si un noyau de sympathisants LR est resté ultra fidèle à l’ancien président, un halo plus large, comprenant même des sympathisants de gauche, s’est mobilisé pour faire front face à Nicolas Sarkozy au moment de la primaire. Les affaires n’y sont certainement pas pour rien. Nicolas Sarkozy a payé cette accumulation de démêlés judiciaires qui incarnait un ancien monde et des pratiques rejetées par les Français
Le comportement de Jean-Luc Mélenchon lors de sa perquisition a des conséquences spectaculaires sur l’opinion. Selon les chiffres de l'Ifop, alors que 77% des Français le trouvaient honnête en avril 2017, ils ne sont plus que 22% à partager cette opinion aujourd’hui,
soit une chute de 45 points. Le travail judiciaire vient juste de débuter, mais le mal est fait. On aurait pu penser que les Français allaient retenir uniquement que c'était le retour de « Mélenchon le bruit et la fureur » de la campagne de 2012 et que ça allait permettre de mettre sous couvercle le fond de l'affaire. Mais on voit justement que concernant l'item « honnête » nous avons bel et bien une chute très importante. Est-ce qu'il a dérapé de façon incontrôlée ou était-ce une volonté de surjouer la résistance face à un pouvoir supposément intrusif pour étouffer le fond de l'affaire ? Toujours est-il que le capital accumulé pendant la campagne de 2017, pendant laquelle le leader de la France Insoumise avait réussi une vraie révolution en incarnant une forme de sagesse républicaine, s'est complètement effondré après cette séquence. Celui qui avait dénoncé pendant la campagne les "pudeurs de gazelle" pour inciter à dénoncer les affaires liées à François Fillon ou Marine Le Pen, se retrouve désormais pointé du doigt.
Cela prouve que la réaction face à une affaire importe probablement autant que le fond de l'affaire pour l'opinion. Quand Jean-Luc Mélenchon déclare "ma personne est sacrée", il parle bien sûr de sa fonction de député qui bénéficie de garanties constitutionnelles face au pouvoir judiciaire, mais il n'y a pas cette lecture au sein de l'opinion. La lecture est « Jean-Luc Mélenchon pense qu'il est au-dessus des lois ». Même si à ce stade il n'est coupable de rien, le prix à payer auprès de l'opinion est élevé.
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