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Bras de fer entre Donald Trump et le président de la Fed : et le plus raisonnable des deux est…
©NICHOLAS KAMM / AFP

Tension sur les taux

La politique de relèvement des taux de la Fed crée des tensions entre Trump et Jerome Powell. Si ces relèvements ne trompent pas les marchés, ils ont des effets déjà palpables sur l'économie.

Mathieu  Mucherie

Mathieu Mucherie

Mathieu Mucherie est économiste de marché à Paris, et s'exprime ici à titre personnel.

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Atlantico : Qui de Jerome Powell ou Donald Trump a raison sur la politique de relèvement des taux ?

Mathieu Mucherie: L'anticipation de l'inflation est le juge de paix. Est-on dans une situation de surchauffe où il y aurait suffisamment de pression inflationniste pour qu'on puisse penser qu'il faut retirer le bol de punch à la fin de la partie ? Il y a d'un côté des arguments sociétaux – le chômage est à 3,7%, on commence à avoir des augmentations de salaires, des tensions sur le marché du travail. L'autre école, et c'est ma position, dit : il n'y a pas de désencrage des anticipations d'inflation, la Fed a plutôt raté son objectif d'inflation de 2% de puis dix ans. L'inflation actuelle est très liée à l'augmentation du prix du baril – ce n'est pas de la vraie inflation, c'est un effet sur les prix relatif et temporaire et non lié à l'économie inertielle. I n'y a pas de raison de s'exciter. D'autant que dès que les taux sont relevés, on s'aperçoit que l'immobilier rechute. Les ventes automobiles stagnent depuis quatre ans. L'économie n'est pas en accélération. En ce moment ça ne va pas mal car il y a eu une tax cut. En envoyant 800 milliards dans l'économie, forcément, il y a une amélioration des comptes, mais c'est temporaire et pas lié au fond de l'économie. Ces hausses de taux sont précipitées et liées à des mauvaises raisons. La Fed – soit ne veut pas subir un procès en cristallisation ultérieur, soit considère que la structure de ses incitations la pousse à augmenter ses taux plutôt qu'à rester neutre, ou peut être parce que la Fed estime qu'il faut discipliner Trump, qui a une parole anti-fed, il faut faire exprès de faire l'inverse de ce qui est demandé par Washington.

Cela éclaire finalement sur les intentions de la Fed ?

Mathieu Mucherie : Le marché ne croit pas au scénario de la Fed. On le voit depuis trois ans. Les taux longs ne montent pas en proportion des taux courts. C'est ce qu'on appelle la dépentification des taux et prochainement l'inversion de la courbe des taux, ce qui est très mauvais pour l'économie, les banques…D'autre part le marché n'y croit pas sur les actions. A chaque fois que la Fed relève ses taux, les marchés ont tendance à penser que ce n'est pas annonciateur d'une accélération de l'économie,  mais plutôt quelque chose de négatif qui signale une fin de cycle. Il commence à y avoir des troubles sur le marché des actions. Il est déjà assez cher. A chaque fois qu'on fait des hausses de taux sans de bonnes raisons, c'est négatif pour l'économie. Pour les marchés, l'économie. Les deux vont de pair. On le voit actuellement sur les marchés européens et américains.

Les effets se font-ils déjà sentir ?

Mathieu Mucherie : Les constructions immobilières ne sont pas au niveau où elles devraient être. Il a 200 000 créations d'emplois nettes chaque mois aux Etats-Unis et il n'y a pas les constructions qui vont avec. Cela fait plusieurs années que les mises en chantier sont décevantes. Les ventes des logements anciens sont aussi décevantes. Les taux se transmettent très directement au marché hypothécaire. Pour financer leurs maisons, les Américains s'endettent à taux fixe sur 30 ans et pour des maisons de 3000 00 dollars, il y a encore deux ans ils trouvaient un financement à 3,8% et maintenant on est plus proches de 5%. Du coup, ce n'est pas trop respecté par les agents qui voient qu'à partir de 5%, il y a un blocage. Dans ce contexte, il commence à y avoir une guerre entre le marché et la Fed. Il y a une guerre à l'intérieur même de la Fed sur la ligne à adopter. Et il y a une guerre entre le budgétaire et le monétaire, la Fed et la Maison Blanche. Et il y aura bientôt une guerre entre la Maison Blanche et le Congrès. Il faut rajouter à ça que les actions ont augmenté pendant 8 ans. Cela vous donne l'humeur de l'hiver prochain…Tout le monde va se regarder en chien de faïence et l'optimisme ne sera pas de mise sur les marchés. 

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