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Eric Zemmour : “Napoléon sauva la Révolution, lui donna une forme, une organisation, un prestige militaire inouï."
©JOEL SAGET / AFP

Bonnes feuilles

On ne comprend plus Napoléon. On ne peut plus le comprendre. On comprend Bonaparte en revanche. On le comprend de mieux en mieux : l’ambitieux, le self-made man, le parvenu, est devenu notre lot quotidien. On compare à Bonaparte n’importe lequel de nos chefs de l’État, pourvu qu’ils soient volontaires ou impérieux. Les Bonaparte sont légion, dans tous les pays, tous les domaines. Nous sommes tous des Bonaparte au moins dans nos rêves. Extrait de "Destin français" écrit par Eric Zemmour, publié aux éditions Albin Michel. 1/2

Éric Zemmour

Éric Zemmour

Eric Zemmour est journaliste et essayiste. Il a déjà publié une quinzaine de livres dont "Le Suicide français" (Albin Michel), "Destin français" (Albin Michel), "Le coup d'Etat des juges" (Grasset) ou bien encore "Le livre noir de la droite" (Grasset). Eric Zemmour vient de publier en septembre 2021 "La France n'a pas dit son dernier mot" aux éditions Rubempré.  
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On ne comprend plus Napoléon. On ne peut plus le comprendre. On comprend Bonaparte en revanche. On le comprend de mieux en mieux : l’ambitieux, le self-made man, le parvenu, est devenu notre lot quotidien. On compare à Bonaparte n’importe lequel de nos chefs de l’État, pourvu qu’ils soient volontaires ou impérieux. Les Bonaparte sont légion, dans tous les pays, tous les domaines. Nous sommes tous des Bonaparte au moins dans nos rêves.

Napoléon n’est pas Bonaparte. « Napoléon est une synthèse du surhumain et de l’inhumain », dira Nietzsche. « Il est hors ligne, hors cadre, ni un Français, ni un homme du XVIII siècle», ajoutera Taine. Bonaparte est un homme des Lumières ; Napoléon est la figure romantique par excellence. Bonaparte est un grand lecteur de Rousseau ; Napoléon s’est « dégoûté de Rousseau depuis [qu’il] a vu l’Orient ; l’homme sauvage est un chien ». Bonaparte est un jeune homme plein de passions ; Napoléon est un homme gouverné par sa raison. Bonaparte est obsédé par son destin, Napoléon par l’Histoire. Bonaparte est le fils de sa mère ; Napoléon est l’héritier de Charlemagne. Bonaparte est corse, Napoléon, romain. Bonaparte a une famille encombrante et arrogante ; Napoléon « n’a point de famille si elle n’est française ». Bonaparte est un condottiere italien du XVe siècle, un contemporain de Dante, de Michel-Ange, de César Borgia. Napoléon est le Dioclétien d’Ajaccio, le Constantin du Concordat, le Justinien du Code civil. « Napoléon appartient à l’humanité antique », dira Nietzsche. Bonaparte a la fureur de l’ambitieux ; Napoléon, les ridicules du parvenu. C’est Bonaparte en lui qui s’exclame : « Quel roman que ma vie ! » ; c’est Napoléon qui ne cessait de regretter : « Ah, si j’étais mon petit-fils ! »

Le sauveur de la Révolution

La gauche ne lui pardonne pas d’avoir liquidé la Révolution. Il l’a pourtant sauvée. Cette gauche devrait relire Ernest Renan : « Si la réaction royaliste l’eût emporté en 1796 et 1797, la Restauration se fût faite alors avec de bien plus franches allures, et la République n’eût été dans l’Histoire de France ce qu’elle est dans l’Histoire d’Angleterre, un incident sans conséquence. Napoléon sauva la Révolution, lui donna une forme, une organisation, un prestige militaire inouï. » La droite ne lui pardonne pas « d’avoir rendu la France plus petite qu’il ne l’avait prise », selon le mot célèbre de Bainville, repris par de Gaulle, en oubliant que c’est lui qui a sauvé le Directoire d’une déconfiture militaire qui aurait entraîné le partage de la France entre les vainqueurs. C’est précisément à la reconnaissance des Français que Napoléon devra sa couronne, comme l’avait analysé Stendhal : « Le général Bonaparte pouvait dire à chaque Français : “Par moi tu es encore français ; par moi, tu n’es pas soumis à un juge prussien, ou à un gouverneur piémontais ; par moi tu n’es pas esclave de quelque maître irrité et qui a peur de se venger. Souffre donc que je sois ton Empereur.” »

Extrait de "Destin français" écrit par Eric Zemmour, publié aux éditions Albin Michel.

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