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Abeilles, et si agriculteurs et apiculteurs s'écoutaient ?
©YURI KADOBNOV / AFP

WikiAgri

Ce 20 mai 2018, c’est la journée mondiale des abeilles. A cette occasion, WikiAgri donne la parole à Dominique Garnier, agriculteur qui vient d’installer des ruches et donc sensibilisé au problème de la disparition des abeilles. Voici sa contribution.

Antoine Jeandey

Antoine Jeandey

Antoine Jeandey est journaliste et auteur de « Tu m’as laissée en vie, suicide paysan veuve à 24 ans ».

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WikiAgri est un pôle multimédia agricole composé d’un magazine trimestriel et d’un site internet avec sa newsletter d’information. Il a pour philosophie de partager, avec les agriculteurs, les informations et les réflexions sur l’agriculture. Les articles partagés sur Atlantico sont accessibles au grand public, d'autres informations plus spécialisées figurent sur wikiagri.fr

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Je suis céréalier dans la plaine d’Aunis, à coté de La Rochelle en Charente-Maritime et je constate qu’il y a de moins en moins d’abeilles, notamment dans les parcelles de colza à l’époque de la floraison : c’est une triste réalité ! Si je voulais être comique, je dirais que ça me donne le bourdon.

Tous les jours, les médias enchainent des publications sur la mortalité des abeilles, et ce sont toujours les produits phytosanitaires qui sont mis en cause.

J’ai donc décidé de m’acheter quelques ruches et de devenir apiculteur ; il faut faire quelque chose pour sauver les abeilles ; je possède désormais deux ruches peuplées, afin de me familiariser à ma nouvelle passion. Le fait d’utiliser des produits phytos en tant qu’agriculteur, et d’être aussi apiculteur est un sacré challenge pour moi.

L’utilisation de nos produits phytosanitaires est probablement une des causes de mortalité des abeilles, mais il y a aussi beaucoup d’autres raisons, qu’elles soient sous formes de pollution, de maladies ou de parasitoses.

Dans mon métier d’agriculteur, j’utilise des produits phytosanitaires ; ce n’est pas pour mon plaisir, mais parce que c’est une nécessité. Ceux qui s’imaginent que l’on pourrait se passer de toute l’agriculture conventionnelle en France font fausse route : l’agriculture biologique, ça peut fonctionner, mais pas sur tout notre territoire ; premièrement, car cela entrainerait la chute des cours et deuxièmement, car notre production nationale ne permettrait pas de couvrir nos besoins, et notre pays serait dépendant d’autres nations ; ce serait un comble !

Certains traitements agricoles, notamment ceux réalisés au printemps, peuvent se réaliser aux heures où les abeilles sont rentrées à la ruche ; moi-même, il m’arrive de plus en plus de traiter de nuit, ou bien très tôt le matin.

Certains produits méritent peut-être encore d’être interdits, ou bien certaines applications s’il y a vraiment danger ; je n’en sais rien, pas mieux que ceux qui accusent sans preuves.

L’ambiance entre les agriculteurs et les apiculteurs, c’est devenu un peu n’importe quoi ; sur les réseaux sociaux, de part et d’autre, on peut lire des choses stupides, les uns accusant les autres de tueurs et les autres accusant les uns de bons à rien ; ce débat est inadmissible : stop !

Il est peut-être temps d’ouvrir un dialogue entre nos deux professions plutôt que de continuer à faire et dire n’importe quoi ! Céréalier depuis 40 ans, je n’ai jamais reçu la visite d’un apiculteur pour venir discuter avec moi ! Ce n’est pourtant pas bien compliqué d’aller voir le gars qui cultive une parcelle et de lui dire, par exemple, « j’ai vu que tu avais semé des colzas, tu feras gaffe, mes ruches ne sont pas loin. Préviens-moi quand tu réalises un traitement, je fermerai mes ruches quelques heures le matin, le temps que la rosée tombe. »    Je suis conscient que cela peut stresser un peu la colonie d’abeilles, mais ça pourrait éviter certains problèmes.

Certains ont compris ce genre de démarches, et cela se passe plutôt bien ! On ne résoudra certainement pas tous les problèmes des apiculteurs ainsi, mais on ira vers le bon sens, puis un dialogue sera ouvert pour une meilleure compréhension les uns des autres.

Pour résumer, je voudrais lancer un message aux apiculteurs en les incitant à aller voir les agriculteurs voisins de leur rucher et à parler de leurs craintes ; mes collègues et moi sommes  aussi des amoureux de la nature, comprendre les angoisses de chacun en dialoguant ne pourra qu’être bénéfique pour tout le monde !

Un article à retrouver sur le site WikiAgri.fr

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