Et la trêve des confiseurs ?
Agressions de policiers et violences du quotidien : la France s’enfonce alors que New York a vu sa criminalité chuter au niveau des années 50
Deux policiers ont été violemment agressés le soir du nouvel an à Champigny-sur-Marne. Un lynchage très médiatisé qui a fait réagir Emmanuel Macron.
Xavier Raufer
Xavier Raufer est un criminologue français, directeur des études au Département de recherches sur les menaces criminelles contemporaines à l'Université Paris II, et auteur de nombreux ouvrages sur le sujet. Dernier en date: La criminalité organisée dans le chaos mondial : mafias, triades, cartels, clans. Il est directeur d'études, pôle sécurité-défense-criminologie du Conservatoire National des Arts et Métiers.
Dans la nuit de la Saint-Sylvestre, l'agression de deux policiers à Champigny-sur-Marne, filmée et relayée sur les réseaux sociaux a fait réagir jusqu'au sommet de l'Etat, Emmanuel Macron déclarant "les coupables du lynchage lâche et criminel de policiers faisant leur devoir une nuit de 31 décembre seront retrouvés et punis". Au-delà du cas d'espèce qui reflète que 5 767 policiers ont été blessés « en mission » en 2016, selon l’Observatoire national de la délinquance, quel bilan dresser, dans la France de 2018, de l'insécurité et des violences du quotidien ?
New York est parvenue à endiguer le fléau de l'insécurité qui sévissait notamment au cours des années 90 (2245 homicides contre 286 en 2017) alors que les chiffres de Chicago sont fortement repartis à la hausse au cours de ces dernières années. Quelles sont les leçons à tirer de ces exemples étrangers ?
Le triomphe new yorkais du réalisme criminologique est tel qu'aujourd'hui, le nombre des homicides dans cette ville (286 en 2017) est de 13% ce ce qu'il fut à son apogée de 1992. En 25 ans, 88% d'homicides en moins. Le réalisme new yorkais repose sur un simple théorème, foudroyant d'efficacité : les criminels ne s'arrêtent que quand on les arrête. "Arrêter" a bien sûr un sens préventif et répressif, il y a le contexte social et local - mais au fond tout tient à ce fondamental : la paix civique s'obtient en empêchant les criminels d'agir, par tous moyens légaux.
Chicago, c'est autre chose. La ville subit de plein fouet les effets d'un politiquement correct néo-puritain. On y refuse de voir que le problème n'est pas le racisme (qui bien sûr existe dans le pays) mais une guerre des gangs qui extermine les jeunes Noirs de la région. A Chicago, 30% de la population est noire et 80% des assassinés par armes à feu, aussi. Sur 10 de ces victimes noires, plus de 9 sont des adolescents ou jeunes hommes, tués lors d'affrontements criminels.
Or face à ces guerres féroces, le traitement social, les mesures bienséantes (nommer un Noir chef de la police urbaine, etc.) sont des cataplasmes sur des jambes de bois. Il faut d'abord casser les gangs, les contraindre au cesser-le-feu. Après quoi, tout ce qu'on veut, le social, la bienséance. Mais avant tout, terrasser les gangs qui, au 20 décembre 2017, ont provoqué l'essentiel des 662 morts et 3 492 blessés par arme à feu. Mais comment y arriver quand le sheriff du comté de Cook, qui englobe l'essentiel de Chicago (5,2 millions d'habitants) n'a que 450 hommes dans les rues ?
La population le comprend d'autant moins que d'usage, les médias ne réagissent qu'aux (rares) cas où un Noir est tué par un policier (2% environ de tous les homicides). D'évidence c'est condamnable - mais comment traiter un cas social en s'obnubilant sur 2% de son tout ? Idem en France, les médias "d'information" pavolviens ne s'éveillent que si la victime est Noire et le policier, Blanc. A Chicago, c'en est au point où un ancien chef de police a été à New York supplier l'ONU d'intervenir dans ce "génocide des Noirs à Chicago", tant, sur place, le problème semble intraitable.
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