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Foi et Pratique, fer de lance de "l'islamisation par le bas" en Seine-Saint-Denis
©Zakaria ABDELKAFI / AFP

Bonnes Feuilles

Foi et Pratique, association apolitique pour la prédication émanant du Tablighi Jamaat s'installe en France dès 1966. Son but : reprendre en main les musulmans assimilés et sécularisés qui séjournent dans les banlieues et les ramener à un Islam authentique. Extrait du livre "L’Islamisme et les Femmes" de Lina Murr Nehmé, publié chez Salvator.

Lina Murr Nehmé

Lina Murr Nehmé

Historienne et islamologue, Lina Murr Nehmé est professeur à l’Université libanaise.

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En 1972, les tablighis étaient devenus largement maghrébins par le biais des conversions. Ils fondèrent leur Association Foi et Pratique et s’établirent au nord de Paris, à Saint-Denis, près de l’actuel Stade de France, dans un vieux pavillon sans plaque ni pancarte signalant leur mosquée. 

Ils savaient soutirer les dons, qui affluaient. Foi et Pratique put ainsi acquérir à Paris, boulevard de Belleville, un bâtiment vétuste de cinq étages, dont trois furent consacrés à une mosquée qu’elle plaça sous le patronage du calife Abou Bakr. 

En 1979, Foi et Pratique fonda une seconde mosquée quelques centaines de mètres plus loin, à l’angle des rues Jean-Pierre Timbaud et Paul Morand. Son recteur, le Tunisien Hammami, un ouvrier dans le bâtiment, avait convaincu les commerçants tunisiens du quartier de donner de quoi fonder cette mosquée dans une ancienne usine. Cette mosquée, dédiée au calife Omar Ben Al-Khattab, devait bientôt devenir le centre le plus actif de l’organisation en France, financé en grande partie par l’Arabie Saoudite et le Pakistan(1). 

On voyait les tablighis sortir deux à deux de la mosquée Omar, et accoster les musulmans dans les commerces de Belleville, dans les cafés, dans les usines, dans les hôpitaux, dans les prisons, dans la rue. Ils poussaient ceux qui le pouvaient à faire une sortie de quelques jours avec eux, allant à la mosquée, mémorisant le Coran, priant, récitant le dhikr ou zikr (répétitions de formules contenant le nom d’Allah, et versets coraniques comme une incantation) —, à jeûner durant le ramadan, et à leur donner l’aumône obligatoire ou zakat pour construire des mosquées et des écoles coraniques au voisinage des mosquées, ou même, dans des châteaux. Ils endoctrinaient les drogués et les délinquants, et souvent, les tiraient de leur malheur pour les plonger dans les prières de la mosquée. Ils intimidaient les commerçants, les restaurateurs et les employés de supermarchés musulmans qui vendaient du jambon et d’autres aliments non halal. Pour se déculpabiliser, ceux-ci donnaient des quantités appréciables d’argent pour les œuvres des tablighis. 

Les tablighis exigeaient que les femmes se voilent et portent de longs vêtements amples, et que les hommes se mettent en qamis blancs, se coupent les moustaches ras, et gardent une barbe de taille moyenne. Ils voulaient qu’ils parlent l’arabe entre eux, et ils leur en enseignaient les rudiments. Ils les appelaient à interrompre le travail aux heures des prières, car, leur disaient-ils, celui qui ne faisait pas les cinq prières quotidiennes aux heures précises était un mécréant d’après le Hadith. (Et le mécréant était passible de mort.) L’Apôtre d’Allah, en effet, disait : 

« Ce qui sépare l’homme du polythéisme ainsi que de la mécréance, c’est la prière [régulière et exacte]. » 

Pour cette raison, à l’heure de la prière, il fallait que les musulmans du quartier ferment boutique et aillent à la mosquée, ou au moins, prient dans leur boutique. Si l’un d’eux traînait dans la rue, deux tablighis se chargeaient de lui en faire la remarque. Le lendemain, la remarque se faisait plus désagréable. Plus tard, d’autres moyens pouvaient être utilisés. Car Iliyas, le fondateur du mouvement, écrit que Mahomet, « qui fut le plus aimable et le plus miséricordieux envers l’humanité, eut l’intention une fois de mettre le feu dans les maisons de ceux qui ont récité la salat [prière] chez eux sans aucune excuse ».(3)

Les imams des mosquées Abou Bakr et Omar étaient virulents : sur la chaire de la mosquée Omar, par exemple, l’imam Younès Tlili appelait les moudjahidine de Sarajevo « martyrs » tués par « les infidèles serbes »(4)). Ils étaient pourtant prudents en public. Leurs sermons du vendredi n’étaient que la face visible de l’iceberg : les textes qu’ils demandaient à leurs ouailles de lire le prouvent, tout comme le changement qu’on observait chez les fidèles qui fréquentaient leurs mosquées. Il était bien plus facile d’être franc lors des contacts privés. Ces contacts étaient nombreux : soirées entre amis ou sorties de prédication, deux à deux, un mari se faisant accompagner de sa femme pour aller réislamiser les couples dont la pratique religieuse était faible ou inexistante, et les pousser à aller prier et prêcher avec eux, à cesser de fréquenter les mécréants et de consommer du vin et du cochon ; à envoyer leurs enfants à la madrassa de la mosquée, à porter des habits islamiques, et surtout, à faire leurs prières aux heures exactes, à la demi-minute près, en étant rigoureusement tournés vers La Mecque. Et si possible à prier à la mosquée quand on était un homme, et dans le secret de sa chambre quand on était une femme. 

Ils leur disaient de bien frotter tous leurs ongles, leurs doigts et leurs talons durant les ablutions, car la partie de leur corps qui n’aurait pas été soigneusement frottée à l’eau, irait en enfer, où elle serait soumise à un feu si fort que leur cervelle en bouillirait (5). Ils leur disaient de faire des rangs rigoureux et de se coller les uns aux autres à la mosquée, d’imiter l’imam de façon stricte, de se prosterner sur sept points de contact osseux, de ne pas lever la tête pour prier comme faisaient les chrétiens et les juifs (car Mahomet laissait entendre que ceux qui faisait cela pourraient avoir une tête ou un corps d’âne) ; ils leur disaient de bien épier les paroles de l’imam le vendredi, car l’imam concluait en disant « Amen » ; et s’ils prononçaient ce mot en même temps que lui, leurs péchés passés leur seraient aussitôt pardonnés. Ils leur interdisaient de manger de l’ail ou de l’oignon quand ils venaient à la mosquée pour ne pas faire fuir les anges ; ils leur disaient de ne pas faire de hadath (péter), car cela annulerait la prière et ils devraient recommencer. C’est le démon, le sheytan, qui pétait. Il pétait quand il entendait l’appel du muezzin. Cela le mettait dans tous ses états et il prenait la fuite pour se réfugier à des dizaines de kilomètres de là. 

Ils leur parlaient de l’enfer, où l’on buvait de l’eau bouillante non sucrée et du pus, et où la moindre torture était d’avoir les talons dans un feu si fort qu’il ferait bouillir jusqu’à la cervelle. Ils leur citaient Mahomet selon lequel, d’après Ghazali, « Il y a en enfer 70 000 vallées et dans chaque vallée il y a 70 000 cloisonnements, et dans chaque partie, il y a 70 000 boas et 70 000 scorpions. À peine le mécréant ou l’hypocrite a-t-il fini sa vie, qu’il subit tout cela. » (6)

Ils leur parlaient aussi des plaisirs du paradis, où ils auraient d’après eux le droit, non seulement de boire du vin, mais aussi de coucher avec un nombre beaucoup plus grand de femmes, avec des coïts très longs, ces femmes étant elles-mêmes très grandes, comme l’aurait été Adam d’après le Hadith (30m). Le croyant atteindrait lui-même cette taille en arrivant au paradis, où les fruits viendraient à lui comme par enchantement selon son désir, où de beaux adolescents, des enfants chrétiens ou juifs destinés à être ses esclaves au paradis, seraient là pour le servir. Les prédicateurs rivalisaient de verve quand il s’agissait d’assembler les versets coraniques et les hadiths pour faire un discours suscitant le désir des amateurs, et les assurant que les djihadistes auraient un paradis meilleur que les autres.

Notes :

1. Alexandre del Valle, Islamistes de France. Stratégies de conquête : du faible au fort. Outre-Terre, 2003/2 (n° 3).

2. Moslem, L’Authentique.

3. Gilles Kepel, Les Banlieues de l’islam, Le Seuil, 1987 et 1991, p. 184.

4. Alexandre del Valle, op.cit.

5. Sauf mention contraire, cette information, ainsi que toutes celles qui viennent dans cette page jusqu’au milieu de la page suivante, se trouvent dans des hadiths authentiques tirés des recueils de Bokhari ou de Moslem.

6. Ghazali, Ihia’ Ouloum-ad-dine, (4 vol.), Kiriata Fotra, Samarrag, Indonésie, 1957, vol. 4, p. 515.

Extrait de "L’Islamisme et les Femmes" de Lina Murr Nehmé, publié chez Salvator.

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