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François Baroin face au piège de l’obsession auto-réalisatrice du rapprochement de la droite avec le FN
©Reuters

Digue

François Baroin a déclaré, visant sans le nommer Laurent Wauquiez, qu'un rapprochement LR-FN pourrait le forcer à revenir en politique. Une stratégie possiblement contre-productive.

Paul-François Paoli

Paul-François Paoli

Paul-François Paoli est l'auteur de nombreux essais, dont Malaise de l'Occident : vers une révolution conservatrice ? (Pierre-Guillaume de Roux, 2014), Pour en finir avec l'idéologie antiraciste (2012) et Quand la gauche agonise (2016). En 2023, il a publié Une histoire de la Corse française (Tallandier). 

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Atlantico : Le mercredi 25 octobre, François Baroin déclarait sur TMC : "​J’ai été de tous les combats de la droite de ces 25 dernières années contre le Front national. Tout ce qui de près ou de loin se rapprochera sous cette forme d’une coalition avec des gens du FN, je m’y opposerai de toutes mes forces. Ça sera peut-être une des causes, éventuellement, d’un possible retour.​" N'y a t il pas ici une erreur de stratégie visant à empêcher un rapprochement en lieu et place de la mise en place d'un programme permettant de séduire les électeurs du FN, notamment les classes populaires, derrière les républicains ? 

Paul-François Paoli : Le propos de François Baroin est significatif de la paralysie intellectuelle d'une pseudo droite qui ne sait ni ce qu'elle est, ni ce qu'elle veut. Baroin reconnaît donc que son seul ennemi politique a été le FN. Ses électeurs vont être contents qui croyaient parfois avoir voté contre la gauche. Dans un dossier récent du Figaro  magazine il  ne fut même pas capable de se situer dans le clivage entre progressistes et conservateurs, répondant qu'il pouvait être l'un ou l'autre selon le sens que l'on donne à ce mot. Baroin a t'il une colonne vertébrale intellectuelle? On peut en douter. Séguin, Pasqua faisaient eux de la politique et les militants du RPR les primaient avant que ce parti ne se fonde dans les eaux consensuelles du chiraquisme. Le chiraquisme, dont Baroin est un représentant, c'est l'avortement assuré de la droite. Du gaullisme, le chiraquisme n'a retenu que la fameuse formule de De Gaulle sur la France "qui n'est pas la droite et qui n'est pas la gauche non plus". Sauf que De Gaulle sut toujours s'appuyer sur des hommes de droite aussi bien à Londres qu'en 1958. De Gaulle était un conservateur profond très critique à l'égard du capitalisme et de la bourgeoisie d'argent. Il aurait probablement eu en horreur le monde dérégulé dans lequel nous sommes entrés. Le Front national est ce qu'il est mais il n'existe pas pour rien et il ne représente pas les forces du Mal. C'est un parti comme un autre qui a l'aval de millions de Français qui ne sont pas plus sots ni plus indignes que les électeurs de Mr Baroin. 

En quoi la stratégie défendue par François Baroin pourrait s'avérer contre-productive dans cette optique ? ​

Elle est contre-productive parce qu'elle ne mène à rien. Pourquoi Mr Baroin ne rejoint t'il pas le mouvement en marche? Cela au moins aurait du sens. Le clivage aujourd'hui est le suivant: soit on assume la mondialisation libérale à laquelle il faut "adapter la France", soit on pense que les conséquences de cette mondialisation peuvent être dangereuses pour l"Europe et la France en tant que civilisation et qu'il faut les en protéger. Le vrai protectionnisme est celui de la civilisation.  Le clivage est civilisationnel voire anthropologique. Wauquiez l'a compris, il ne se réfugie pas dans le discours des "Valeurs de la république" ce bouche trou de la pensée politique. Tous les intellectuels développent aujourd'hui cette thématique depuis Debray à Finkilekraut en passant par Onfray mais aussi des jeunes philosophes comme Bérénice Levet. Ce sera aussi la thématique de mon prochain essai qui parait en janvier aux éditions du Toucan.  

Quelles seraient les thématiques à développer par les LR pour justement affaiblir le Front national, et ainsi permettre une nouvelle connexion entre les classes populaires et le parti de la droite républicaine ?  

Le Front national a une légitimité. Légitimité ne veut pas dire que ce parti a raison. Cela veut dire qu'il a une raison d'Etre. Les événements de Catalogne donnent raison à ceux qui prédisaient que la direction prise par l'Europe risquait d'aboutir à des phénomènes de sécession. Affaiblir l'Etat nation, c'est concourir à renforcer des micro Etats régionaux. Séguin, Villiers, Chevènement avaient donc raison sur l'essentiel. Marine Le Pen n'a pas leur envergure et c'est une démagogue. Mais son mouvement, comme tous les populismes, traduit l'inquiétude de peuples déstabilisés. La droite doit proposer non pas la fin de l'Europe mais son resserrement au niveau d'un noyau dur comme le propose Wauquiez. Elle doit surtout en finir avec l'idéologie de Bruxelles et rompre avec le religion des droits de l'homme en vigueur à la Cour européenne. La sécurité est le premier des droits et notamment celui d'être protégé par un Etat fort, puisqu'un Etat qui n'est pas fort sur le plan régalien n'est plus un Etat. Pourquoi payer des impôts si l'Etat n'est plus capable de renvoyer des immigrés en situation irrégulière comme la Loi le prescrit ? Et s'il n'est plus capable d'assurer l'ordre public, comme c'est le cas dans certains quartiers de la région parisienne ou de Marseille ?

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