Edito
Comment éviter que l’amélioration de la croissance ne soit pas un feu de paille
Tout le problème consiste aujourd’hui à maintenir un certain élan retrouvé et à ne pas retomber dans une stagnation légendaire.
La croissance économique est désormais solidement installée. Tel est le diagnostic de Christine Lagarde, la directrice du Fonds monétaire international qui va relever la semaine prochaine ses perspectives pour l’ensemble des pays. Et pour une fois, la France n’est pas en reste. L’Insee vient ainsi d’ajouter un petit dixième de point à ses calculs pour 2017. Après avoir au fil des mois pronostiqué 1,5% d’amélioration des performances du pays sur une base de départ de 1,1% pour l’ensemble de 2017, elle est passée à 1,7% et maintenant 1,8%. Le gouvernement applaudit car il faut remonter à 2011 pour trouver une perspective équivalente. Et tout relèvement des comptes est pain bénit pour le ministre des finances qui a tant de mal à boucler son budget, en raison des baises d’impôts programmées.
L’économie française bénéficie de deux moteurs : l’investissement des entreprises qui se réalise à tous les niveaux et l’équipement des particuliers, essentiellement dans le domaine du logement, car les achats de maisons et d’appartements neufs ainsi que la rénovation ont le vent en poupe. Ce dynamisme est encouragé par le moral des chefs d’entreprises qui n’a jamais été aussi élevé depuis dix ans. Conséquence : le chômage recule : la barre fatidique de dix pour cent sera abandonnée à la fin de l’année, avec un niveau ramené à 9,4%, avec une création nette de deux cent mille emplois. Seul point noir pour l’instant : le commerce extérieur, dont le déficit est revu en hausse de 15 milliards d’euros à 63 milliards, car la reprise des affaires se traduit par un gonflement des importations : 80% des investissements sont le fruit d’achats à l’étranger, tandis que l’amélioration du pouvoir d’achat des ménages repose pour 20% sur un développement des entrées de produits venus d’’audelà des frontières.
Tout le problème consiste aujourd’hui à maintenir un certain élan retrouvé et à ne pas retomber dans une stagnation légendaire. Car certains signes témoignent que le mouvement actuel ressemble plus à une légère brise qu’à un emballement profond. En premier lieu, le reste de l’Europe progresse à un rythme bien supérieur, évalué à 2 ,2 % pour cette année. C’est dire que les contraintes qui pèsent sur notre pays maintiennent un handicap dans la compétition internationale. En second lieu, la consommation des ménages s’améliore seulement d’un pour cent, nos compatriotes s’étant remis à épargner, notamment sur le fameux livret de caisse d’épargne par méfiance de l’avenir. Le pouvoir d’achat ralentit quelque peu à 1,6% au lieu de 1,8% l’an dernier, tandis que l’emploi va progresser plus lentement au deuxième semestre en raison de la suppression de 140 000 emplois aidés. Des craintes subsistent donc pour l’année 2018, tant les forces du conservatisme et de l’immobilisme sont présentes dans ce pays. Pour éviter de retomber dans les ornières du passé, il est indispensable que le gouvernement continue d’avancer dans la voie des réformes malgré les obstacles dressés sur sa route. Cela suppose d’ accélérer la réforme de l’Etat social, sans doute la plus délicate quand on voit comment le pouvoir a déjà reculé dans la négociation avec les transporteurs routiers. Cela implique aussi que la population se prenne en mains, évite toujours de se lamenter et cesse de préfèrer dans les conflits du travail ce qu’on appelle le chèque valise plutôt qu’un bon reclassement, accepte aussi que certains patrons aient envie de réussir et de gagner de l’argent, sans que ce dernier soit exclusivement consacré à des tâches de redistribution. En clair il faut remettre en cause cette exception française qui a fait perdre tant de places à notre pays dans la compétition mondiale.
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