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Hausse de la CSG: pourquoi Macron a raison
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Dans le désert idéologique qui règne au sein de la République En Marche, on entend peu de voix pour expliquer une mesure essentielle (et encore timide) d'Emmanuel Macron: la hausse de la CSG en compensation de la suppression des cotisations salariales. Il est pourtant nécessaire d'assurer le service après vente de cette mesure juste et salutaire.

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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La hausse de la CSG est mal expliquée et mal comprise. Elle est pourtant une mesure salutaire, moralement légitime et économiquement rationnelle. Voici pourquoi.

L'assurance maladie, ou le grand détournement de la solidarité

Le tableau ci-dessous, tiré du rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale 2017, illustre parfaitement la problématique française du financement de l'assurance maladie. Sur 200 milliards environ de recettes, 70 milliards proviennent de la CSG, 92 milliards proviennent des cotisations ou des compensations de cotisations, 32,5 milliards proviennent de différents impôts (comme les taxes sur les cigarettes), et 3 milliards proviennent d'autres régimes. 

Autrement dit, la santé "mutualisée" est encore financée à 45% par les cotisations sur le travail, à des taux élevés. En particulier, ces ressources proviennent d'une cotisation de près de 13% sur les employeurs. Lorsqu'un employeur verse 1.000€ à l'un de ses salariés, il doit verser 130€ à l'assurance maladie. 

Toute la question est de savoir si cette contribution d'une valeur importante au moment où la France compte 3,5 millions de chômeurs se justifie moralement et économiquement ou pas. 

Les retraités grands consommateurs de soins

Or les retraités consomment beaucoup plus de soins et de biens médicaux que les salariés. Une étude de 2010 du Haut Conseil pour l'Avenir de l'Assurance Maladie (HCAAM) a produit un graphique qui l'illustre clairement. On y voit qu'une personne âge de 90 ans consomme en moyenne 8.000 euros par an de soins et de biens médicaux quand un salarié de 45 ans en consomme quatre fois moins.

Le choix français de financement de la maladie consiste donc à demander à ceux qui ne consomment pas et qui travaillent de payer pour ceux qui consomment et qui ne travaillent pas. C'est ce qu'on appelle couramment la solidarité. 

Toute la question est de savoir si les termes de cette solidarité sont aujourd'hui trop importants ou pas. Ceux qui pensent que la solidarité est équilibrée prôneront un maintien de la CSG en l'état. Ceux qui pensent qu'elle repose trop sur les salariés et ne sollicite pas assez les consommateurs de soins soutiendront une hausse de la CSG. 

La question de la "vérité des prix"

Sur le fond, il est possible d'objectiver une partie de ce débat en rappelant la mécanique de l'assiette de la CSG. Celle-ci porte sur la totalité des revenus (y compris ceux du capital), alors que les cotisations sociales ne concernent que les salariés. Grâce à la CSG, donc, toute augmentation de la dépense de santé en France est immédiatement répercutée sur l'ensemble de la population, y compris les "riches" qui ne vivent pas de leur travail mais de leur capital (puisque les revenus de celui-ci sont soumis à la CSG alors qu'ils ne sont pas soumis à cotisation). 

Avec les cotisations, seule la partie de la population qui ne consomme pas assume le coût induit par ceux qui consomment. La hausse de la CSG permet donc de faire la vérité des prix, au moins partiellement, là où les cotisations favorisent un effet de passager clandestin, puisqu'elles autorisent les consommateurs à ne pas payer le prix de leur consommation.

En ce sens, c'est-à-dire selon une logique de management du risque assurantiel, la fiscalisation de l'assurance maladie voulue par Emmanuel Macron est vertueuse. Mais il est vrai qu'elle suppose un ajustement de l'effort fourni jusqu'ici par les consommateurs, ce qui est toujours douloureux. 

La solidarité: quelques rappels

On regrettera quand même qu'il ne se trouve personne au sein de la majorité pour rappeler les importants efforts fournis ces dernières années en faveur des retraités et de leur accès aux soins.

En particulier, la CMU-C, couverture maladie universelle complémentaire prévoit un remboursement par la collectivité du reste à charge des plus pauvres. Cette prestation s'adresse aux personnes qui disposent d'un revenu inférieur à 800 euros. 

Pour tous ceux qui vivent avec un revenu situé entre 800 et 1.000 euros par mois, une aide à la complémentaire santé (ACS) permet d'accéder à un contrat de "mutuelle" pour éliminer les restes à charge. 

Si un geste doit être fait en faveur des retraités impactés par la hausse de la CSG, il est plutôt à rechercher dans les plafonds de l'ACS. Étant entendu que la mise en place de celle-ci sous François Hollande rappelle que les retraités ont largement bénéficié de la solidarité de ceux qui travaillent. 

Une question de fond: le travail doit-il payer la maladie?

Toutes ces questions ne peuvent occulter la problématique majeure soulevée par le financement de l'assurance maladie: est-il normal que la prise en charge des soins soit liée au travail? Le débat devra bien être posé un jour, car il ne coule vraiment pas de source.

Article publié initialement sur Entreprise.news

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