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Justice, rentrée 2017 : les projets Belloubet n'effacent pas la cata Taubira
©AFP

Tribunaux et prisons

De prisons en tribunaux, Mme Nicole Belloubet, présente garde des Sceaux, arpente la France judiciaire et carcérale. Louable effort, car apprécier la réponse régalienne au crime est utile. Ainsi, Mme Belloubet s'informe, visite, commente, songe à moderniser l'appareil judiciaire et à réformer la procédure pénale.

Xavier Raufer

Xavier Raufer

Xavier Raufer est un criminologue français, directeur des études au Département de recherches sur les menaces criminelles contemporaines à l'Université Paris II, et auteur de nombreux ouvrages sur le sujet. Dernier en date:  La criminalité organisée dans le chaos mondial : mafias, triades, cartels, clans. Il est directeur d'études, pôle sécurité-défense-criminologie du Conservatoire National des Arts et Métiers. 

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Certes, elle n'échappe pas aux vénielles gaffes de débutant : des téléphones en prison ? Oui ou non ? Fixes ou mobiles ? Euh... Et les tics de femme de gauche "séduite" par une "Protection judiciaire de la Jeunesse" incapable de "protéger" les jeunes qu'on lui confie ; PJJ donc fort hostile à toute évaluation réelle de son boulot... (Combien de récidives ?)

Mais là n'est pas le pire. Le pire est que sous les projets-Belloubet, sur le terrain des tribunaux et prisons, prévaut toujours la cata-Taubira (oublions charitablement l'inconsistant zombie qui lui succéda).

Car aujourd'hui, voici la réalité judiciaire et pénale française, telle qu'elle nous remonte du terrain par divers canaux professionnels ou syndicaux :

- Magistrats et personnel pénitentiaire menacés, intimidés, furieux ou inquiets,

- Prisons-passoires tournant parfois à la prison-chaos,

- Encore trop de décisions de justice absurdes ou scandaleuses,

- Appareil judiciaire-pénitentiaire antédiluvien et asphyxié.

• Les magistrats et le personnel pénitentiaire

Dans leurs bureaux de divers tribunaux "sensibles" (banlieue parisienne, Marseille, Nantes, Nord), ou devant les Palais de justice, des magistrats sont menacés, droit dans les yeux, par des voyous ou leurs complices. Pour seule protection - parfois - un vigile blême de peur, peu tenté d'intervenir. Publiquement, certains magistrats (Grenoble, Thonon-les-Bains) dénoncent une justice sinistrée et le règne des voyous sur leur ville. Et leurs conditions de travail, et le surmenage : ensemble, les six juges d'application des peines du TGI de Nanterre traitent ainsi un millier de dossiers par an. En jours effectifs de travail (déduit les congés, corvées diverses, etc.) cela fait un dossier par jour - ce qui est absurde.

Pour les surveillants de prison, c'est plus violent encore : Fresnes : un surveillant est lynché devant chez lui par d'ex-détenus, dents cassées, 21 jours d'ITT. A Villepinte des surveillants cernés par des voyous hostiles, menacés de mort sur le parking. Idem à Bois-d'Arcy. Villepinte, encore : cinq voitures de surveillants incendiées sur un parking jouxtant la prison. Fleury-Mérogis : bagarres au quotidien entre détenus et gardiens - idem bien sûr, dans des prisons de province. Toul : jet d'huile bouillante au visage d'un surveillant, gravement brûlé. A la "prison de haute-sécurité" de Condé-sur-Sarthe, un gardien menacé d'égorgement reçoit au crâne et au dos des coups d'un stylet artisanal de 15 cm. Ainsi de suite, à Osny, par exemple. Bilan de juillet- août 2017 dans les 187 prisons françaises : 480 agressions, parfois graves.

• Prisons-passoires, prisons-chaos

Fouille d'une seule salle commune, toujours à Condé-sur-Sarthe ; on y trouve vingt armes blanches (capables de tuer) bricolées sur place, de la drogue et du matériel informatique. Téléphones portables en prison : 33 500 saisis en France en 2016 - déjà 19 300 au premier semestre 2017. Or un portable, c'est une caméra et l'expédition de vidéos hors de prison :

- des gardiens filmés et ensuite, agressés à la sortie

- des "gangs de prison" dirigeant leurs trafics depuis leur cellules

- des systèmes de sécurité et de contrôle filmés pour préparer une évasion

- des islamistes diffusant leur propagande, des plans d'attentats, etc...

A Aiton (Savoie) des détenus visage découvert publient une vidéo où ils dansent, fument des joints, jouent à des jeux-vidéo, accréditant l'idée choquante de prisons-Club-Med.

Tous les syndicats (UFAP-UNSA, FO, CGT) s'alarment. D'autant que désormais, les drones aggravent encore la situation. Valence, août 2017 : un drone livre dans la cour de la prison  ... Quoi d'ailleurs ? Nul ne sait, car le colis disparaît illico presto au nez de gardiens bernés.

• Décisions judiciaires/pénitentiaires absurdes, florilège

- Un détenu de 23 ans (pour vol avec violence) déjà évadé, participe à une "promenade dans les bois". Profitant d'un "sentier escarpé", surprise ! Il s'évade

- "Déjà condamné à huit reprises", un détenu sort pour des obsèques - et bien sûr s'évade. 

- Détenu-cambrioleur, il pille le voisinage lors de ses huit permissions de sortie,

- En semi-liberté à la prison de Saint-Quentin-Fallavier, l'homme de 24 ans tire à la Kalachnikov sur des rivaux, puis rejoint calmement sa cellule,

- Limoges : un Mahorais poignarde un comparse. Or auparavant, il a déjà blessé sa victime. Déféré, il a alors été laissé libre (de réitérer...) en attendant de comparaître.

• Appareil judiciaire-pénitentiaire antédiluvien

Une honte et un scandale : 

- des ordinateurs hors d'âge - souvent, de la génération, inconnue des moins de 40 ans, "d'avant la souris"... Des logiciels "autistes", incompatibles entre eux ; des juges incapables de retrouver - dans leur propre système ! - des données sur le passé de condamnés, parfois donc libérés au petit bonheur. Magistrats également incapables d'accéder aux fichiers policiers des antécédents judiciaires.

- A la maison d'arrêt du Val d'Oise, des cellules aux serrures en carton-pâte, crochetable avec un fil de fer. Serrures d'un modèle équipant, dit-on, 80% des prisons françaises.

- Enfin, les brouilleurs pour bloquer les portables illicites en prison. Depuis 2002 et la loi permettant ce brouillage, on va d'un bricolage pas cher au suivant, sans plan permettant de régler pour de bon le problème, ce que la technologie permet désormais.

Tel est l'héritage-Taubira & consorts, à régler désormais par Mme Belloubet.

Sans compter, à la charnière terrorisme-banditisme, l'énorme souci des "ratés de la chaîne pénale" où des djihadistes se jouent du système judiciaire et ce par incapacité (jusqu'à présent) des magistrats à comprendre et sanctionner les hybrides entre terreur et crime.

La Garde des Sceaux doit donc agir vite et fort - d'autant que les policiers de base et leurs épouses et compagnes reprennent le sentier de la guerre. En mars dernier "rupture police-justice" s'inscrivait en caractères d'affiche sur leurs banderoles. Or une chose est claire : un Etat de droit ne supporte pas longtemps une telle rupture.

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