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La mafia italienne est-elle en train de réussir son implantation en France ?
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Les parrains en balade

Selon le dernier livre de Roberto Saviano qui vient de paraître, "le combat continue" réellement. La Mafia italienne ne cesse de gagner du terrain, sur ses propres terres, mais également au delà. Le hic, c'est que la frontière la plus proche, et la plus "ouverte" est celle qui mène à la France, pays où les lois ne sont pas encore adaptées à la menace. La Mafia s'implante petit à petit en France, qui, contre toute attente, semble être une véritable terre d'accueil pour ces vedettes du crime organisé de plus en plus poussées dans leur retranchement par leur propre gouvernement.

Fabrice Rizzoli

Fabrice Rizzoli

Fabrice Rizzoli (né en 1971) est co-fondateur et président de l'association Crim'HALT qui veut impliquer la société civile contre la criminalité. Il enseigne dans divers établissements universitaires. Docteur en science politique à l’université de Paris I (Panthéon-Sorbonne), il est spécialiste de la criminalité organisée et des mafias italiennes et coopère avec le Centre Français de Recherche sur le renseignement. Il a été chercheur à l'Observatoire géopolitique des drogues (OGD), chargé de mission à l'observatoire milanais sur la criminalité organisée (Omicron) dans le cadre du projet de recherche « Falcone » piloté par la Commission européenne. Ensuite, il a été officier de protection au ministère des Affaires étrangères (Direction des Français à l'étranger et des étrangers en France), puis à la Commission de recours des réfugiés (OFPRA). Il intervient régulièrement comme consultant et conférencier sur ces thèmes. Il anime le site mafias.fr (analyse au quotidien d'un phénomène complexe). Il a écrit La mafia de A à Z (aux éditions Tim Buctu), qui regroupe 162 définitions mafieuses, de A comme "Accumulation du capital" à Z comme "Zoomafia". Il est également co-fondateur du Salon "Des Livres et l'Alerte".

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Les articles se succèdent mais manifestement, la présence mafieuse en France n'est pas une chose nouvelle comme le soulignent par exemple les deux missions parlementaires de 1992 et 2002Alors que nous apprend l’étude des mafias italiennes ?

La France : terre de repli et de joint-venture

Pour les mafias, la France est un territoire de repli. Elle permet d'échapper à la justice italienne comme en témoignent les nombreux parrains arrêtés en France. On rappellera que Bernardo Provenzano, le super boss de la mafia sicilienne en cavale depuis 40 ans, s'est fait opérer, en 2003, en toute tranquillité, dans une clinique à Aubagne.

La France est aussi une terre de co-business en relation avec le grand banditisme local. Les Italiens proposent des « parties » de drogues. Par exemple, les clans français, en particulier corso-marseillais, mettent chacun une somme pour une tonne de cocaïne. Les Italiens, en particulier les Calabrais, en lien direct avec les cartels colombiens, font arriver la drogue jusqu'à Marseille et le partage commence. Parfois, le système de la joint-venture s'inverse comme dans le cas du braquage d'un camion de billet fiduciaire permettant aux mafieux de la Camorra de fabriquer pour 15 milliards de vrais-faux dinars.

La France : terre de blanchiment

Gianni Pellegrino : « Michele, j'ai une bonne nouvelle »
Michele Pellegrino : « Dis-moi. »
G.P : « J'ai obtenu un chantier. »
M.P : « Lequel ? »
G.P : « Le caravelle. C'est à Eze pour 19 000 mètres cube d'excavationJe l'ai pris pour 12 euros l'excavation et pour 18 euros le transport. Le tout à 30 euros ...Eh, j'ai conclu des contrats pour un million d'euros... »

Cette écoute, opérée par la police italienne en 2008, concerne deux mafieux de la 'Ndrangheta, mafia calabraise, qui blanchissent en France. Les milliards accumulés par les mafias sont blanchis dans l'HORECA (hôtellerie, restauration et café) et autres boîtes de nuit, au sein des casinos ou dans d’autres secteurs tels que l’immobilier.  Par exemple, à Menton, une entreprise, appartenant aux mafieux cités dans l'écoute, ont accompli, le terrassement du Royal Plaza, bâtiment abritant la communauté d’agglomération de la Riviera française (CARF) et la maison de la justice...

La France : terre d'avenir pour les mafias ?

La police française n’est plus totalement aveugle, mais elle n'est pas encore armée comme le peut être celle de l'Italie : pas de statut de collaborateur de justice qui font sortir définitivement les criminels professionnels de leur milieu, pas de procureurs indépendants pour mener à bien des enquêtes contre les politiciens corrompus, pas de loi de dissolution pour infiltrations mafieuses (les conseils municipaux de Bordighera et Vintimille ont été dissous)…

Enfin et surtout, il manque à la France une loi de réutilisation à des fins sociales des biens confisqués au crime organisé. En France, les arrestations se succèdent mais les biens demeurent aux mafieux. Or, les avoirs mafieux doivent revenir à la société !

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