Hypnose
Mais pourquoi les adeptes de plus en plus nombreux de l'ASMR passent-ils des heures à visionner des pages de livres se tourner ou des battements d'ailes de papillon ?
Devant les écrans, ils sont de plus en plus nombreux à visionner des vidéos d'ASMR, cette nouvelle technique de relaxation qui permet de vous faire masser directement par internet. Mais le phénomène laisse de nombreuses personnes sceptiques.
Atlantico : Relativement inédite, l'ASMR est une technique de relaxation apparue depuis quelques années sur internet. Le principe : à partir d'une vidéo Youtube, n'importe quel internaute peut directement se faire "masser" derrière son écran, à l'aide de stimuli auditifs. Quels sont les effets provoqués par le visionnage de ces vidéos sur le cerveau ?
Mireille Tardy : La connaissance que nous avons du fonctionnement tant de l’audition que du cerveau et de son développement nous permet d’avancer dans des hypothèses dont un jour sans doute les techniques de neurosciences nous apporterons des précisions. Le phénomène auditif ne se résume pas seulement a un décodage perceptif de fréquences et d’intensités en fonction du temps. Les sons décodés au niveau de l’oreille interne sont ensuite transmis au cerveau sous forme d’influx électrique. Mais cette transmission est en fait un long et complexe traitement de cet influx nerveux auditif le long des voies nerveuses et des centres –relais, jusqu’aux aires cérébrales. Le message est perçu et transmis avec d’autant plus de facilité s’il répond à des règles de cohérences de fréquence et d’intensité en fonction du temps et si ces caractères sont répétitifs. Et il me semble que c’est la tendance des vidéos de l’ASMR. Mais surtout, le long de la transmission et des traitements, les voies auditives vont contacter diverse associations, extrêmement nombreuses : avec les autres voies sensorielles (vision en particulier, mais sensibilité kinesthésique, olfaction, goût), mais aussi sensibilité des organes divers…) et par ailleurs, association avec les structures cérébrales de la sensibilité et l’émotion (négative ou positive) ainsi qu’avec les structures cérébrales sièges des fonctions cognitives, dont la mémoire. C’est l’activation prolongée de tout cela, plus importante chez certaines personnes sensibles (système réticulé activateur), qui va provoquer cet état proche parfois de la transe. D’autant que l’éducation, l’environnement a au fil du temps privilégié une sensibilité à des sons (le développement du langage dans la langue maternelle en est un exemple) alors que l’oreille et surtout le cerveau peuvent développer une sensibilité plus importante que ces vidéos peuvent exciter. Il ne faut pas non plus évacuer le rôle de la mémoire qui peut aussi réactualiser des souvenirs auditifs en particuliers plaisants. Il y a donc une activation cérébrale multiple et complexe qu’un traitement d’une information auditive plaisante et prolongée peut déclencher.
Pourquoi certaines personnes y sont plus sensibles que d'autres ? Les vidéos d'ASMR peuvent-elles être comparées à de l'hypnose ?
je pense que certaines personnes ont un cerveau « plus réactif » (rôle du système réticulé activateur des transmissions nerveuses quelles qu’elles soient, plus actif). De plus certaines ont une « écoute » plus développée sur le plan esthétique personnel. Certains mélomanes peuvent ainsi connaitre un plaisir extatique à écouter leur morceau favori. Et oui, je pense que l’on peut comparer ou en tout cas rapprocher le phénomène de l’ASMR de l’hypnose et de certaines techniques de la sophrologie.
L'ASMR peut-il avoir un bienfait sur le corps, ou au contraire un effet néfaste? Peut-on envisager, à l'avenir des thérapies à base d'ASMR ?
l’ASMR a des effets positifs généralement sur l’ensemble du corps en raison des associations nerveuses des voies nerveuses auditives avec les voies diverses dont je parlais dans la 1ère réponse. Mais le problème de l’ASMR est en particulier le niveau sonore de la stimulation : l’état proche de la transe qu’elle peut entrainer chez certains peut entrainer à augmenter le son et à exagérer l’effet ce qui pourrait léser l’oreille (nuisance sonore) et entrainer des lésions plus générales par sur- stimulation Ce serait le risque de toute addiction. Mais je ne pense pas que l’on en soit là car c’est plus une recherche de relaxation qui en est l’objet me semble-t-il. Par ailleurs, des thérapies pourraient l’utiliser en la maitrisant justement à un niveau correct pour l’oreille et la relaxation corporelle : en particulier dans le cadre des acouphènes ou de l’hyperacousie où la sophrologie rend déjà de grands services.
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