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Macron fait son marché à la casse de la politique. Cela va t-il casser Macron ?
©Thomas SAMSON / AFP

Les entrepreneurs parlent aux Français

Même les voitures neuves ont besoin de pièces détachées. Cela nécessite une visite à la casse, on y déniche toujours une pièce qui présente une apparence et quelques caractéristiques qui la rende utilisable et acceptable.

Denis Jacquet

Denis Jacquet

Denis Jacquet est fondateur du Day One Movement. Il a publié Covid: le début de la peur, la fin d'une démocratie aux éditions Eyrolles.  

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Même les voitures neuves ont besoin de pièces détachées. Cela nécessite une visite à la casse, on y déniche toujours une pièce qui présente une apparence et quelques caractéristiques qui la rende utilisable et acceptable. Maintenue derrière une carrosserie neuve on en perçoit à peine la présence, sauf quand ses déficiences anciennes produisent un bruit difficile à masquer et rappellent à l’extérieur qu’elle appartenait à un ensemble défaillant. Elle fait le travail qu’on lui demande, essentielle, comme chaque pièce, mais une miette noyée dans un ensemble plus vaste. Elle permet à la voiture neuve, en panne de reprendre ou poursuivre sa route, se remettre en Marche, pendant que les autres restent sur le bas côté. Un peu comme le borgne au pays des aveugles !

C’est le choix fait par Emmanuel Macron. Une pièce politique qui allait être mise à la casse, mais encore utile pour franchir les kilomètres qui le sépare d’une possible victoire. Une pièce politique marquée au fer rouge de son inconstance, de son inconséquence et de sa mièvrerie faussement centriste mais vraiment opportuniste, qui rappelle que la politique et l’honneur ne font pas bon ménage. Bayrou arrivait en fin de carrière, pour avoir trahi tellement de camps qu’il n’en trouvait d’autres que le sien. Ou las casse. Le fonds de commerce de 2007 fondait à chaque élection comme le sous-menton avec l’âge, et les 18% du passé valait désormais 4 ou 5% au mieux. En 2022, il serait passé sous le score de Copé, qui reste en la matière ce qui existe de plus proche de la définition du néant politique. Le trou noir. Le score qui vous est assuré par la fidélité des membres proches de votre famille. Il ne restait dans le parti de Bayrou que quelques sourds et malentendants que l’on avait pas informé par le langage approprié, de la disparition de leur « leader ». Et sa numéro2, Marielle, encore un M, dont le visage de papyrus parvient encore à s’insérer dans quelques débats destinés à faire croire que le Modem est autre chose que son homonyme électronique. Un engin qui faisait de drôles bruits quand on tentait de se connecter à internet. Cela fut utile, et même original, mais qui finit, lui aussi, à la casse.

L’intégrité en politique, ne survit pas au besoin de pouvoir. L’honneur est à géométrie variable et préfère l’arithmétique. Or pour l’élection de 2017, tout se jouera dans un mouchoir (usagé) de poche. Fillon qui a dégoûté une partie de son électorat, âgé, pour qui l’intégrité est une vertu cardinale, et la démission sa preuve éclatante en cas de scandale, va l’abandonner et mettre en péril ses chances de faire un score suffisant pour être qualifié au second tour. Mélanchon à moins d’un changement de dernière minute préfèrera la défaite seul à la victoire à plusieurs, et empêchera Hamon de dépasser les 12% que son programme inepte lui permettra à peine d’atteindre. Marine fera carton plein, car le peuple croit bêtement, à travers elle qui est un pur produit du système, qu’elle est là pour ensevelir ce système. Du fait de la crasse de notre classe politique, elle pourra pourtant maintenir l’illusion de propreté et obtiendra 35% ou plus. Et fera honte à ces adversaires qui ont moins bien compris la France. La France, ou plutôt le monde, car le phénomène de rejet et de colère est mondial.

Face à tous ces aveugles, il y a le borgne. Emmanuel Macron. Ce Ministre qui nous a impressionné par sa capacité de surprendre. Qui prononça pour la première fois des mots qui étaient tabous en France. Le travail, les monopoles, la richesse. Qui tenta de démontrer que la France passait avant les intérêts partisans. Ce Macron là nous servait alors une soupe chaude, qui devenions les pauvres, les orphelins, d’une classe politique indigne de ce pays.

Puis la campagne s’est chargée de rendre tiède, pour ne pas dire froide, la soupe servie. Néanmoins attendons l’annonce de son programme. A ce jour, les 35 heures, le contrôle des chômeurs, la suppression du RSI, les crimes contre l’humanité, ont sérieusement écorné nos certitudes face à sa volonté de réforme sincère et nous attendons le contenu d’un paquet cadeau qui était très vendeur. Comme tout politique il a compris que la soupe tiède convenait à tous les palais, surtout quand on voulait avaler au centre et pas de travers. Du coup, le corps entrepreneurial est devenu plus circonspect face à ce visage qui n’a pas changé, mais dont la voix a mué. Des discours plats dotés des sous-entendus et « d’entre lignes », qui ravissent ceux qui ont fait l’agrégation et connaissent leurs classiques, mais qui laissent sur leur faim ceux qui ne sont pas venus pour prendre une leçon littérature grecque ou de tout autre pays non endetté.

Et pour parachever cette suite de couacs médiatiques, arrive la pièce défectueuse. Bayrou. Celui dont la veste craque d’avoir été trop retournée. La girouette la plus « venteuse » que le centre nous ai donné à découvrir. Le rentier qui aura vendu ses voix à la gauche quand c’était nécessaire, pour se prostituer pour la droite le jour où la Marie de Pau, sa dernière source de revenu possible, pouvait lui être réservée pour bons et loyaux transferts de voix. Celui qui fait bégayer l’histoire à chaque élection est le prototype de ces personnages fuyants, à la main molle, qui aurait fait des miracles lors de la troisième république et se sont égarés dans la cinquième. Ces personnages obséquieux et insondables, dont la couleur s’adapte à l’environnement pour mieux s’y fondre, sans plus de respect pour les électeurs qui l’ont élu, qu’ils n’en ont pour eux même. Ces personnages qui évitent les miroirs pour ne pas réaliser qu’ils n’ont pas de reflet. Sur ce pari gagnant électoralement, Macron a certainement gagné 4% et perdu 2.5%. Il a gagné la légion fondante de ceux qui votent encore pour lui par réflexe pavlovien, atteint d’Alzheimer pour la plupart, et perdu les entrepreneurs en contrepartie. Ou plutôt une partie. Ceux qui sont intègres renoncent déjà à Macron, les autres maintiendront leur vote. Par dépit. A cause de cette hérésie, l’élection se fera contre quand elle aurait enfin pu se faire pour quelqu’un.  Dommage.

Pour les entrepreneurs qui nous sont proches, c’est dur. Voter par dépit est terrifiant. Et pourtant, et Emmanuel Macron doit parier la dessus, car le réalisme n’a d’équivalent en politique que le cynisme, il pourrait néanmoins conserver notre vote, car nous ne voyons plus à qui d’autre le confier. Macron ne sera certainement pas le réformateur que l’on espérait, mais au moins ne ruinera pas définitivement la machine. Pas comme Marine, pas comme Hamon, pas comme Fillon que son infamie poursuivra longtemps. Il y a de larges chances que nous lui conservions notre vote, mais en traînant des pieds, en faisant des marques au sol devant l’isoloir, ce moment où il faudra choisir celui qui sera le moins nocif pour la France, quand le nombre de talents disponibles pourrait nous assurer un candidat, et encore mieux, une candidate, pour qu’il l’on voterait les yeux fermés. Cette fois encore, il faudra voter en se bouchant le nez et en interdisant à sa conscience de se mêler de ce que nos mains feront devant l’urne. Tout cela ne présage rien de bon pour la France.

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