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Présenter les valeurs de Nicolas Sarkozy comme la "France moisie", c'est faire injure au peuple
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Valeurs actuelles

Le président de la République ébauche ce samedi matin dans Le Figaro Magazine la base de ce qui pourrait ressembler à un programme présidentiel. Il insiste ainsi sur trois valeurs : travail, responsabilité et autorité.

Chantal Delsol

Chantal Delsol

Chantal Delsol est journaliste, philosophe,  écrivain, et historienne des idées politiques.

 

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Atlantico : Dans son interview au Figaro Magazine, Nicolas Sarkozy insiste sur trois valeurs principales : le travail, la responsabilité et l'autorité. Quel sens donne, selon vous, Nicolas Sarkozy à ces valeurs ?

Chantal Delsol : Il faut en effet souligner d’abord que ces « valeurs » (il vaudrait mieux parler de « principes » parce que « valeur » signifie strictement quelque chose de relatif) sont partagées par tous les candidats.

Si nous disions à François Hollande qu’il refuse le principe d’autorité, il se récrierait, et idem pour le travail et la responsabilité. La différence sera dans le contenu de ces mots qui, pour revêtir un sens général et commun, n’en reçoivent pas moins des significations diverses. Il suffit de regarder comment le terme « démocratie » était compris par les pays libéraux, par les pays de la Soviétie et par Khomeini…

Il est probable que la gauche entendra par autorité celle de l’Etat davantage que celle des groupes intermédiaires comme la famille ; qu’elle soumettra la responsabilité à sa portion congrue – celle des contrats qui ont été signés en bonne et due forme, et encore tant que dure le désir-, tandis que la droite étendra la responsabilité à des dettes plus anciennes que nous ; qu’elle limitera le travail à un labeur, lié à la subsistance et en attente de loisir, tandis que la droite associe davantage le travail à une œuvre de culture.

De quelle façon ces valeurs entrent-elles en résonance avec la société française d'aujourd'hui ? Peuvent-elles s'imposer dans la campagne ?

La société française n’est pas uniforme, comme on sait. Ces principes entrent en résonance avec l’électorat de droite et sont probablement perçus comme une violence par l’électorat de gauche. Ils s’imposeront dans un camp et seront combattus par l’autre. Quand on dit que la droite et la gauche n’existent plus, ceci en est la démonstration contraire.

De nombreux commentateurs ont perçu dans l'expression de ces valeurs un positionnement particulièrement ancré à droite de Nicolas Sarkozy...

C’est la préférence pour ces principes-là qui marque le positionnement à droite. Car encore une fois, la gauche ne récuse pas ces valeurs, mais outre qu’elle les comprend autrement, elle ne les place pas en premier lieu. La gauche préférera l’égalité, par exemple, et confèrera à l’égalité la première place partout et toujours. La différence est là, prioritairement.

La France a-t-elle trop négligé ces valeurs ces dernières années ? 

On les néglige, c’est vrai, parce que la gauche est meilleure que la droite en communication, et parvient à jeter la mauvaise conscience dans les esprits de droite en les persuadant que ces principes sont portés par un peuple inculte, ringard et lourdingue – la « France moisie ».

Je dirais que c’est le contraire. Si nous ne défendons pas l’autorité des groupes intermédiaires, il n’y aura plus que l’Etat et nous glisserons vers l’autoritarisme d’Etat. Si nous ne défendons pas le travail, nous glissons vers la société des loisirs qui est à la fois puérile et assistée, donc composée de sujets davantage que de citoyens. Si nous ne défendons pas la responsabilité, l’autonomie personnelle se dissout dans l’assistance. Dans tous les cas, ce qui peut apparaître comme une joyeuse licence nous entraine vers la servitude, car ce que nous serons incapables de faire par nous-mêmes, seuls ou en groupes, c’est l’Etat qui devra le faire. Tocqueville avait bien décrit cet Etat despotique et doux de la démocratie déclinante.

Nicolas Sarkozy ne néglige-t-il pas la valeur "liberté" dans cette interview ?

Il aurait pu l’ajouter. Elle se trouve au cœur des trois principes énumérés : le travail permet à l’individu de s’identifier à son acte personnel ; la responsabilité est liée à la liberté puisque la liberté consiste, non pas à faire tout ce que l’on veut, mais à choisir ce dont on est responsable ; et l’autorité, qui consiste à se faire obéir sans employer la force, est un corollaire de la liberté.

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