Le FN veut fédérer les Français juifs et masochistes

Il est possible qu’il y ait des juifs attirés par le Front national (il y a bien des poisson-chats et des gens qui apprécient les Mon Chéri à la liqueur), mais ils ne doivent pas être bien nombreux. Ça n’empêche pas Marine Le Pen, entre deux valses de « Strauss sans Kahn », de tenter de les convaincre qu’un parti à peu près aussi philosémite qu’un complotiste du 11-Septembre est devenu leur nouvelle Jérusalem idéologique.

Ainsi, c’est le Nouvel Obs qui attire mon attention sur l’existence d’une espèce d’OVNI sobrement intitulé « Union des Français Juifs », une entité à la rhétorique tellement grotesque qu’on se demande si son projet n’est pas surtout de fédérer les Français juifs et masochistes.

Parce que l’affreux du moment, pour l’extrême droite, est clairement l’immigré d’origine nord-africaine ― mais sans doute aussi parce que dans l’esprit des Le Pen père et fille comme dans celui de pas mal de « progressistes », juifs et musulmans sont nécessairement antagonistes ―, ce genre de retape semble effectivement couler de source.

Le hic, c’est qu’on peut difficilement passer son temps à critiquer la représentativité d’un organisme comme le CRIF (ce qui se défend) et prétendre que trois pelés anonymes constituent la pointe émergée d’un quelconque iceberg (j’écris iceberg, mais j’aurais pu écrire icestein ou iceman, ne commencez pas…). Les Français se trouvant être juifs, on s’épuise à le répéter, n’ont pas plus d’homogénéité politique que les Français roux ou unijambistes et il faut précisément avoir le cerveau saturé de préjugés à leur égard pour s’imaginer les enrôler aussi grossièrement.

Il faut dire que la Marine ne ménage pas ses efforts dans ce sens, depuis qu’elle a repris la boutique. Entre son interview manquée sur Radio J et son voyage arlésien en Israël, on sent qu’elle cherche à tirer le maximum de sa lecture en diagonale du « Judaïsme pour les nuls ».

Notez qu’il y au moins un type pour lequel ça tombe sous le sens, cette alliance chimérique de la carpe (farcie) et du lapin (blanc) : Alain Soral, un moniteur de boxe passé du stalinisme au nationalisme ultra-droitier dont l’histoire d’amour avec le FN s’est terminée en eau de boudin lorsqu’il a découvert que, derrière les « détails » et autres « Durafour-crématoire », c’était un gros cœur sioniste qui battait la chamade.

Mais bon, on me dit que je ne devrais pas leur faire de la pub, à nos trois pelés anonymes, et qu’en parler ici, même pour les ridiculiser, c’est prendre le risque de les populariser. Même pas peur : la pub, ça ne marche que lorsqu'on a quelque chose à vendre.