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Comment le citoyen prend part aujourd'hui aux débats et aux décisions dans l'action publique
©REUTERS/Philippe Wojazer

Bonnes feuilles

L'action publique semble aujourd'hui faire face à une équation impossible, entre réduction des moyens et multiplication des mécontentements. Les approches traditionnelles de la réforme sont mises en échec. A cette approche décliniste, l'Etat en mode start-up oppose une autre vision, celle d'une action publique réinventée, plus agile et collaborative, "augmentée" par l'innovation technologique et sociale. Extrait de "L'Etat en mode start-up", de Thomas Cazenave et Yann Algan, aux éditions Eyrolles 1/2

Yann Algan

Yann Algan

Yann Algan est doyen de l'École d'affaires publiques de Sciences Po et professeur d'économie, spécialiste de l'économie numérique et collaborative.

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Thomas Cazenave

Thomas Cazenave

Thomas Cazenave est inspecteur des finances, directeur de cabinet adjoint du ministre en charge de l'Économie, de l'Industrie et du Numérique, enseignant à Sciences Po et à l'Ena.

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Le palais omnisport de Laugardalschöll n’avait jamais reçu une telle foule en ce froid matin du 6 novembre 2010. Et pour cause : cet attroupement n’était pas là pour supporter comme de coutume l’équipe sportive locale, mais… pour écrire une constitution 2.0  ! Suite à la crise financière de  2008 et à la banqueroute de ses banques, le peuple islandais a en effet réclamé d’élaborer lui-même une nouvelle constitution pour reconstruire le pays. Mille personnes tirées au sort ont donc été réunies dans un palais omnisport pour se mettre d’accord sur les grandes priorités et les valeurs à inscrire dans la constitution. Puis une Assemblée constituante de 25 membres a été élue, avec pour mission de rédiger plus en détails cette nouvelle constitution. Mais, particularité notable, tout le peuple islandais pouvait participer à cette entreprise, notamment grâce à Internet. Les Islandais pouvaient soit assister aux réunions des 25, soit les suivre en direct sur YouTube. Chaque semaine, le projet de texte était publié en l’état et les Islandais pouvaient, sur une page Facebook, par e-mail ou sur Twitter, proposer des amendements, faire de nouvelles propositions ou demander des éclaircissements. L’Assemblée constituante se devait de répondre ou de prendre en compte les remarques des internautes. Bien que cette constitution ait été fortement amendée par le Parlement islandais, l’Islande peut se targuer d’avoir, la première, inventé la constitution 2.0. Cet exemple illustre bien le nouvel esprit de la démocratie qui souffle sur de nombreux pays.

Le nouvel âge de l’action publique sera celui des citoyens

Cette aspiration des citoyens à se réapproprier le destin de leur nation et les choix auxquels nos sociétés font face se concrétise dans leur plus grande participation aux débats et aux décisions publiques, avec le passage à une démocratie plus délibérative et participative. La décision devient légitime, car procédant de la délibération publique entre les citoyens qui confrontent des visions différentes du bien commun. Les budgets participatifs comme ceux de la Ville de Paris, de Belfort ou de Porto Allegre en sont une illustration. Les grandes consultations, les jurys citoyens ou encore les plateformes collaboratives permettant aux citoyens de faire des propositions sont d’autres façons d’associer la société à la prise de décision.

On voit aussi se développer l’implication des citoyens à la délivrance même du service public. Certes, le service public (administration, collectivités, hôpitaux publics…) restera probablement pour longtemps le premier acteur de l’action publique. Mais il s’appuie davantage sur les citoyens pour rendre le service. Le citoyen devient coresponsable et coproducteur du bien public. Ce rôle n’est pas nouveau quand on considère par exemple l’ampleur et l’ancienneté du bénévolat au sein des sociétés, mais il change d’échelle, notamment grâce au numérique, et devient de plus en plus informel. La participation des citoyens peut être de nature différente : remonter une observation (concernant des accidents, des vols, des avalanches, des problèmes de voierie, etc.), participer à un projet scientifique, contribuer à l’entretien quotidien de proximité (comme à Boston où des citoyens sont en charge de veiller à l’accessibilité des bornes incendie), ou encore intervenir directement auprès d’autres personnes pour leur rendre un service. La santé est à ce titre un domaine très propice à la co-production du service public avec des initiatives permettant d’inciter et d’organiser différentes contributions (familles, voisins, bénévoles, associations, professionnels) pour s’occuper d’une personne vulnérable ou âgée ou encore des expérimentations visant à donner aux patients eux-mêmes et à leur entourage les moyens de mieux prévenir les crises ou l’évolution de la maladie.

Cette participation peut aussi se faire indirectement via la mobilisation d’acteurs autres que l’administration dans l’action publique. On peut penser bien sûr aux associations et aux entreprises qui se voient confier des missions de service public, mais aussi et de façon croissante à des acteurs innovants. En France, des solutions sont ainsi trouvées grâce à des « start-up d’État », petites structures composées de designers et de développeurs qui ont pour mission, sous l’égide du secrétariat général pour la modernisation de l’action publique, de trouver de façon accélérée une solution à un problème concret, en lien avec l’administration et les usagers.

Extrait de L'Etat en mode start-up, de Thomas Cazenave et Yann Algan, publié aux éditions EyrollesPour acheter ce livre, cliquez ici

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