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Si vous avez aimé la pagaille sociale provoquée par le projet El Khomri, vous adorerez le référendum sur l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes
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Atlantico Business

Le monde des affaires ne voit pas comment le climat social pourrait s’apaiser. Le conflit avec la CGT n’est pas purgé et on va revenir dans un débat polémique et stérile avec le dossier de l’aéroport de Saint-Martin-des-Landes. Tout cela sur fond de crise financière engendrée par les risques d’un Brexit. Quel mois de juin !

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Tout se passe comme si les gouvernements démocratiques ne savaient pas gérer autrement que par la crise, ou par l'expérience d’échec. Faute d’expliquer honnêtement la difficulté d’une situation, les systèmes politiques démocratiques ont tous le chic, par lâcheté, ou par incompétence, d‘aggraver leurs difficultés et de provoquer des crises, plutôt que d’expliquer et de convaincre des nécessités du changement.

David Cameron n’avait pas besoin de provoquer un psychodrame en proposant un référendum sur la sortie de son pays de l’Europe. Il ne l’a surement pas voulu puisqu’il est contre. Il a voulu être réélu en proposant au peuple britannique de se prononcer sur l’Europe, tout simplement parce qu’il n’a jamais eu le courage d‘expliquer aux sujets de sa gracieuse Majesté à quoi servait l’appartenance à l’Europe. Le résultat c’est qu’on est arrivé à la veille d’une situation qui va plonger les économies occidentales dans la crise de confiance et la dépression, à tel point que les partisans du oui en viennent à répliquer aujourd'hui, que si les Anglais choisissent le Brexit, ils auront deux ans pour s’y adapter et refaire machine arrière. Quel gaspillage !

Le gouvernement français est dans une position encore plus difficile. La loi Travail qui était une bonne loi, progressiste, moderne et dont la vocation correspondait au problème le plus urgent, à savoir décoincer le marché du travail. Cette loi Travail a été si mal expliquée, si mal défendue, qu‘elle a servi de catalyseur au mécontentement social et politique et qu’elle a provoqué une invraisemblable chienlit qui a bloqué le pays pendant trois semaines et gâché l'ouverture de l’Euro de football. 

La situation s’est un peu calmée, mais les syndicats ne savent plus où ils habitent, moyennant quoi ils sont débordés et la chienlit va continuer. Contrairement à ce que le gouvernement dit, certains dépôts de carburants sont encore bloqués. A la Sncf, qui est devenu l’exutoire des luttes sociales et le principal champ de bataille, la grève a été reconduite. Sur les ordures ménagères, la maire de Paris, Anne Hidalgo, a été tellement lente à réagir et faire nettoyer les rues de Paris, qu’on se demande si elle n’avait pas intérêt à prolonger les ennuis et les nuisances. 

Les chauffeurs de taxis qui se souviennent avoir demandé la peau des Uber menacent tous les jours de bloquer l’accès aux stades. Dans le ciel d’Air France, les commandants font grève, alors que leurs frères de KLM s’énervent de tant d’arrogance corporatiste.

Bref, tout continue comme avant, avec cette fois-ci, une perte de contrôle des grandes centrales. On est loin de la loi Travail, on est loin du plus élémentaire sens des responsabilités. On est loin des règles de base du dialogue social. 

C’est dans ce contexte-là, coléreux et nerveux, que l’Euro va se dérouler match après match. 

Mais ça ne sera qu’une parenthèse un peu nerveuse, parce qu’après l’Euro, la guérilla politique va repartir au parlement et la chienlit sociale va reprendre au gré des humeurs et des corporatismes. 

Va s’y ajouter, le débat surréaliste qui va entourer le référendum régional concernant le projet de l’aéroport de Saint Martin des Landes. Fin juin, en plein tour de France, on discutera non pas de l’intérêt économique d'un aéroport pour le Grand-Ouest, mais on débattra de la place des écologistes dans le processus démocratique, on redonnera la parole à des gens dont on pouvait croire que leurs échecs les avaient éliminés du jeu politique. 

Ce qui est terrible dans cette situation c’est que le gouvernement s’est mis dans la difficulté tout seul. Par incompétence. 

Il devait mieux expliquer la loi Travail et notamment l’article 2 qui concerne directement ceux qui sont au chômage et dont personne ne s’occupe à commencer par les syndicats. 

C’est le gouvernement qui a ouvert la boite de pandore des négociations. Par lâcheté, et par peur du désordre, il a engendré un immense désordre. 

Quand il y a deux mois, il a cédé face aux chauffeurs routiers sur la question de leurs heures supplémentaires, on savait que le gouvernement allait perdre la bataille de la confiance. Tous ceux qui avaient un petit avantage à défendre se sont précipités au bureau des plaintes. 

Personne n’a obligé le gouvernement à gérer la question de l’aéroport de Nantes comme il l’a fait. Tergiverser, n’écouter personne ou tout le monde, laisser faire, laisser parler pour terminer par l'organisation d’un référendum dont les résultats ne seront pas légitimes. On le sait. 

Si le oui à l'aéroport l'emporte, les partisans du non diront que l’assise démocratique n’était pas suffisante. 

Si le non l’emporte, les partisans du oui diront que le vote a été manipulé et que les vrais acteurs ont besoin de cet équipement.

Qui aura pris ses responsabilités dans cette affaire ? Personne. 

L'équilibre d’un pays dépend de la capacité de ses gouvernements à dire la vérité et à faire ce qu’ils ont dit. 

Les gouvernances disent rarement la vérité, et ne font guère ce qu’ils ont dit et c’est normal, puisqu’ils mentent en permanence. 

Quand on leur fait le reproche de ne pas dire la vérité, les responsables politiques concèdent que l’opinion publique ne comprend pas toujours les intérêts à long terme. L’opinion n’accepte la réforme que devant une crise forte qui pourrait les atteindre. La crise rend intelligent mais les leaders gouvernementaux n'ont pas le courage de nous éviter une crise. Moyennant quoi, ils prennent des risques insensés.

Quel risque, parce qu’il y a des cas où la crise n’accouche pas d’une solution. Il y a des cas où la crise engendre une catastrophe. En 2008, personne ne voulait croire qu’une banque aurait pu faire faillite. Et pourtant. Plus loin dans l’histoire, en 1914, il n’y avait aucune raison sérieuse et grave pour que l’Europe rentre dans un conflit qui restera le plus meurtrier du siècle. Et pourtant, la multiplication des bêtises humaines et la confrontation des egos mal placés de certaines élites ont entrainé l’irréparable. 

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