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Une maladie diagnostiquée ? Ni Internet, ni les statistiques ne sont une panacée pour s’informer et se rassurer
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Bonnes feuilles

Une fois le cancer diagnostiqué, il est nécessaire d'en savoir davantage à propos de son état et des options thérapeutiques qui s'offrent. Cet ouvrage pratique s'articule autour de questions/réponses ciblées concernant les cancers les plus fréquents et répertorie les principaux termes médicaux et législatifs en vigueur. Extrait de "Cancer. Les bonnes questions à poser à votre médecin", de Nicole Delépine et Gérard Delépine, aux éditions Michalon 1/2

Gérard  Delépine

Gérard Delépine

Gérard Delépine est chirurgien orthopédiste, et l'un des précurseurs de la chirurgie conservatrice dans les sarcomes osseux et la pose de prothèses. Il est reconnu dans le monde entier pour ses travaux depuis plus de 20 ans.

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Nicole  Delépine

Nicole Delépine

Nicole Delépine ancienne responsable de l'unité de cancérologie pédiatrique de l'hôpital universitaire Raymond Poincaré à Garches( APHP ). Fille de l'un des fondateurs de la Sécurité Sociale, elle a récemment publié La face cachée des médicaments, Le cancer, un fléau qui rapporte et Neuf petits lits sur le trottoir, qui relate la fermeture musclée du dernier service indépendant de cancérologie pédiatrique. Retraitée, elle poursuit son combat pour la liberté de soigner et d’être soigné, le respect du serment d’Hippocrate et du code de Nuremberg en défendant le caractère absolu du consentement éclairé du patient.

Elle publiera le 4 mai 2016  un ouvrage coécrit avec le DR Gérard Delépine chirurgien oncologue et statisticien « Cancer, les bonnes questions à poser à mon médecin » chez Michalon Ed. Egalement publié en 2016, "Soigner ou guérir" paru chez Fauves Editions.

 

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Que pensez-vous d’Internet ?

Beaucoup de cancérologues vous auront strictement interdit d’aller sur Internet. Mais vous êtes adulte et libre. Ce qui ne veut pas dire qu’il faut gober n’importe quoi et le traitement miracle du Dr Chose ou Machin qui vous guérira à tous les coups sans les inconvénients des vilaines chimios qui ne peuvent que tuer. Vous êtes sonné mais pas débile et vous allez vous maîtriser pour éviter toute manipulation, tant celle de la science dite officielle que celle des nombreux prédateurs et imposteurs du Net mais aussi du libraire.

Sorti de votre consultation, vous pouvez ouvrir Internet mais choisissez plutôt les bases de données scientifiques. Évitez les forums au moins au début, où – il est vrai – on peut lire tout et son contraire, trouver toutes les recettes bienveillantes et promotions quasiment commerciales dissimulées, sur les molécules qui guérissent tous les cancers, ce qui n’est jamais vrai… Soyez vigilants !

Vous renseigner sur les banques de données en trouvant le descriptif de votre essai sur le site clinical trials.gov est une bonne technique, d’autant que vous pourrez imprimer votre essai et en parler avec votre médecin ou vos connaissances. Regardez au passage les autres essais sur la même maladie que la vôtre, souvent plusieurs dizaines ou plus en cours (ouverts) ou clos. Vous vérifierez ainsi que le protocole qu’on veut vous imposer n’est pas le seul traitement possible.

Quelles sont mes chances de m’en tirer ? J’en ai pour combien de temps ?

Question à cent sous à laquelle le médecin honnête ne peut pas répondre. Il n’a d’ailleurs pas tous les éléments lors des premières consultations sans les résultats des bilans d’extension, ni la qualité de la chirurgie qui pourra ou non être réalisée et qui transforme les chances de guérison de façon très importante.

Il n’a pas de boule de cristal, il n’est pas Dieu, que vous y croyiez ou non, il ne sait pas comment vous pourrez réagir psychologiquement, votre force intérieure et le soutien des vôtres, votre tolérance aux traitements complémentaires qu’on vous proposera ou imposera.

Ne croyez pas plus celui qui dit : "Vous en avez pour trois mois et mettez vos affaires en ordre", que celui qui jure qu’il va vous guérir. La tentation pour les médecins de se prendre pour Dieu est bien connue et trop répandue et la diminution de leurs pouvoirs de décision réels en raison des pouvoirs exorbitants médico-administratifs dans les prescriptions n’a fait que croître cette tendance de certains à jouer à Méphisto, pour compenser sûrement. Fuyez ces personnages de théâtre qui pourtant, trop souvent, rassurent les patients. Une si grande assurance ne peut être basée que sur l’expérience ! Un comble. Imposture. Nenni ! Au contraire, le médecin humble, humain, saura vous assurer de son engagement dans la suite de votre traitement et vous aider à chaque étape à faire le meilleur choix. Ses incertitudes sur l’avenir devraient vous rassurer sur son honnêteté.

Actuellement, depuis les plans cancer (2003 à nos jours) qui ont verrouillé de plus en plus le libre choix de votre traitement par le cancérologue, les patients semblent, à travers leurs témoignages, rencontrer deux sortes d’individus : le cancérologue pervers qui d’emblée dit au patient : "Si vous êtes encore là dans un an, vous aurez de la chance" à l’opposé de celui qui assure à un malade atteint d’une pathologie grave à haut risque de rechute – même avec le meilleur traitement possible – : "Je vais vous guérir" puis en fin de traitement : "Vous êtes guéri". Je reste perplexe devant cette évolution des attitudes médicales radicalement modifiées en une vingtaine d’années en même temps que la bureaucratisation de notre système de santé.

Mais docteur, les statistiques donnent bien une idée valable de mes chances de guérison !

Les statistiques ne sont que des nombres établis sur un ensemble de malades qui ne préjugent en rien du devenir d’un individu unique, vous. Si 99% des patients guérissent d’une maladie A, que vous décédez de la même maladie, vous êtes mort à 100% et nos belles statistiques ne consoleront pas votre enfant ! Avant de répondre à vos questions sur les chances de guérison selon l’extension de la maladie, il faut absolument intégrer cette idée que vous n’êtes pas une statistique, mais une personne unique qui réagira de façon personnelle et originale. C’est très important. Si vous n’arrivez pas à vous convaincre de cela, ne lisez pas le paragraphe suivant et ne posez jamais ces questions à aucun médecin. Il ne pourra que vous répondre sur des statistiques. C’est comme les sondages, on leur fait dire ce que l’on veut devant un patient précis. Prudence !

Extrait de "Cancer. Les bonnes questions à poser à votre médecin", de Nicole Delépine et Gerard Delépine, aux éditions Michalon, mais 2016. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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